Les Marocains et Daech

DR

ChroniqueUn récent sondage montre que les Arabes, et les Marocains en particulier, n’ont pas forcément une image négative de Daech.

Le 26/12/2015 à 18h43

L’année qui s’achève a tristement consacré Daech comme acteur majeur sur la scène mondiale. L’Etat terroriste a multiplié les attentats et les crimes. Il a surtout répandu partout un message de guerre et de peur. Mais tout le monde a-t-il reçu le même message ? Le monde arabe en général, et le Maroc, en particulier ont-ils une vision homogène de ce qui a secoué le monde ?

Un institut de sondage basé à Doha, connu pour son sérieux, a publié en début de semaine les résultats d’une enquête portant sur l’appréciation de Daech dans le monde arabe. Le Maroc a fait partie des douze pays sondés. Si le résultat du sondage est inquiétant pour la moyenne arabe, il l’est encore plus pour le Maroc.

3% des Marocains interrogés ont une image «très» positive de Daech, et 5% ont une image «assez» positive. Cela nous fait 8% qui tiennent la bande de criminels dirigés par Aboubakr al-Baghdadi en haute estime. 8% qui restent en dehors du consensus marocain et mondial. 8% qui ne partagent pas la condamnation, dans le monde entier, des crimes de Daech. 8% qui approuvent en substance ces crimes et les justifient.

L’autre chiffre qui fait froid dans le dos, est celui des Marocains ayant une image «très» négative de Daech. Autrement dit qui rejettent Daech sans appel, qui condamnent clairement et sans réserve. Les Tunisiens, les Jordaniens, les Libanais, les Irakiens obtiennent des chiffres supérieurs à 90 %. La moyenne arabe est de 80%. Et les Marocains, combien sont-ils à rejeter sans appel la bande d’al-Baghdadi ? 68% seulement. Seuls les sondés mauritaniens font pire que le Marocains, avec seulement 6%.

En extrapolant, nous avons donc seulement deux Marocains sur trois qui condamnent fermement. Un Marocain sur trois ne sait pas trop quoi penser, entre ceux qui ont une perception assez négative de Daech, ceux qui sont neutres et refusent de se prononcer, et ceux qui ont perception assez ou très positive.

L’autre question du sondage a porté sur les origines de Daech : la bande d’al-Baghdadi est-elle le produit de son propre environnement ou une simple invention des puissances étrangères ? Les Marocains sont quand même 33% à soutenir que Daech est une «invention» étrangère et un instrument manipulé par les puissances occidentales. Un Marocain sur trois rejette la faute sur l’autre, cet ennemi invisible que l’on désigne sommairement par l’Occident. Mais en face, les autres pays arabes arrivent à faire pire, avec des chiffres dépassant largement les 50%.

Bien entendu, ce sondage doit être pris pour ce qu’il est : un outil scientifique et un indicateur parmi d’autres. La marge d’erreur existe, mais elle est faible.

Le sondage réalisé par The Arab center for research and policiy studies nous envoie dans les cordes. Il nous laisse groggy, sonnés pour un bon moment. Il nous dit que, malgré sa barbarie, Daech compte des adeptes, beaucoup d’adeptes parmi nos congénères. Ainsi va le monde dans lequel nous vivons. Triste.

Par Karim Boukhari
Le 26/12/2015 à 18h43