Mais pourquoi choisissent-ils le Maroc?

DR

ChroniqueIl y a quelque chose d'immoral à cracher sur les Marocains puis à leur demander de vous aider à battre les Allemands.

Le 05/09/2018 à 18h38

Vous connaissez sans doute de ces gens un peu sadiques qui demandent aux enfants: "Qui aimes-tu le plus, ton papa ou ta maman?" J’ai assisté hier à une scène analogue sur une chaîne de télévision néerlandaise, sauf qu’il ne s’agissait pas d’un enfant mais d’un solide jeune homme de vingt ans, un footballeur talentueux, qu’on soumettait ainsi à la torture. Et il ne s’agissait pas de ses parents mais des deux pays dont il possède la nationalité: le Maroc et les Pays-Bas.

– Lequel préférez-vous? demandait le journaliste pour la cinquième fois.– J’aime les deux, répondait pour la cinquième fois le jeune homme.– Mais s’ils jouent l’un contre l’autre, pour qui êtes-vous?– Pour les deux.– Mais c’est impossible!

Finalement, poussé dans ses derniers retranchements, Noussair Mazraoui finit par avouer:– Eh bien, d’accord, s’il faut vraiment choisir, je choisis le Maroc.

Et il ajouta immédiatement:– Mais j’aime les Pays-Bas!

L’affaire agite l’opinion publique hollandaise, au-delà du petit monde du football (qui n’est d’ailleurs pas si petit que cela ici). Après le maestro Ziyech, après les frères Amrabat, après l’ex-capitaine de Feyenoord Karim El Ahmadi, voici encore un brillant footballeur, Mazraoui donc, qui choisit de porter le maillot des Lions de l’Atlas au lieu de celui de la maison d’Orange– dont le symbole est également un lion, comme il sied à une dynastie régnante.

C’est d’autant plus vexant pour la nation de Cruyff que la situation était exactement inverse il y a dix ans: le subtil Ibrahim Afellay portait le maillot orange en même temps que Khalid Boulahrouz (dit “le cannibale”) et quelques années après le sympathique Driss Boussata.

Bref, la question qui est sur toutes les lèvres est: “Pourquoi?”

Il se trouve que je lisais, ce week-end, un long article consacré à ce sujet dans le Volkskrant daté vendredi 31 août. Cet article occupait toute la page 3. Or que pouvait-on lire page 2, juste à côté? Un article sur le leader populiste Geert Wilders à propos du concours de caricatures qu’il a l’intention d’organiser. L'idée est simple: il s’agit d’envoyer à Wilders des caricatures du prophète Mohammed. La plus offensante recevra un prix et toutes les autres seront exposées au Parlement– le bonhomme peut le faire car il est député.

Ledit Wilders ne rate aucune occasion de dénigrer et insulter les Marocains, qu’ils aient ou non la nationalité néerlandaise.

Un peu plus bas, un autre sale type est évoqué, un certain Johan Derksen. Googlez-le, amis, et accordez-moi qu’il est laid comme un cachalot constipé. Il ne s’est pas lavé les cheveux depuis le Déluge, il postillonne à tout-va, il laisse sur son sillage des effluves écœurants (je peux en témoigner, l’ayant un jour croisé sur un plateau de télévision). Il n’a rien à dire mais le dit avec aplomb, le cigare au bec, dans une émission sportive où l’on s’obstine à l’inviter parce que, visuellement, il est tellement répugnant qu’il attire le public comme le ouakiri au zoo. Or quelle est l’obsession de ce triste sire? Les Marocains! Il ne cesse de dire que le football hollandais a un problème marocain: ils sont trop nombreux, ils sont bagarreurs, etc.

Il est donc inutile de se demander pourquoi tous ces footballeurs préfèrent "mouiller le maillot" pour le pays de leurs parents: parce qu’ils se sentent méprisés et discriminés par des nullités du genre Wilders et Derksen, dont ils ne veulent surtout pas être les compatriotes.

On ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre. Il y a quelque chose d'immoral à cracher sur les Marocains puis à leur demander de vous aider à battre les Allemands. C'était vrai au temps de la bataille du Monte Cassino. C’est également vrai aujourd’hui, à l’heure où les batailles se déroulent sur le gazon des stades.

PS: Aussi incroyable que cela puisse paraître, le nauséabond Derksen a eu le front d’accuser Mazraoui de manquer de loyauté envers les Pays-Bas… alors que ce sont en partie ses dérapages qui ont écœuré les Marocains d’ici! Confronté à un hypocrite éhonté, nous lui demandons, dans notre bonne vieille darija:– Est-ce là ton visage ou ta nuque?

Pour brocarder la duplicité de Derksen, Wilders et des autres, on a envie de leur dire:– C’est ta sale gu… que j’ai devant moi ou ta crinière crasseuse?

Par Fouad Laroui
Le 05/09/2018 à 18h38