Même avec autant de blé, on aura du pain sur la planche...

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ChroniqueAujourd’hui, nous avons enfin un nouveau gouvernement qui vaut ce qu’il vaut, mais il faut ce qu’il faut. Et l’on apprend que la production céréalière de l’année 2017 va atteindre le chiffre record de 102 millions de quintaux. Si ce n’est pas de la baraka...

Le 18/04/2017 à 10h55

Qu’on l’admette ou pas, ce gouvernement va bénéficier, lui aussi, de la baraka. Je ne sais pas si c’est parce qu’il est dirigé, lui aussi, par une formation qui se présente non pas comme plus musulmane que les autres, mais plus pieuse qu’elles, mais certains indices sont flagrants.

Je vais vous en donner un seul : bien avant qu'il ne soit formé, très laborieusement d’ailleurs, ce gouvernement a été précédé par des précipitations sans précédent. Ces pluies, si vous vous souvenez bien, s’étaient étalées sur une période assez longue, ce qui a permis à nos terres assoiffées de prendre tout leur temps pour bien s’imprégner d’une eau bénite qui tombe d’un ciel enfin clément, et en ce qui nous concerne, cela nous a permis de prendre notre mal en patience et de rêver à des jours plus fructueux.

Résultat: aujourd’hui, nous avons enfin un nouveau gouvernement qui vaut ce qu’il vaut, mais il faut ce qu’il faut, et en même temps, on apprend, par la bouche même de notre super ministre qui a plusieurs cordes à son arc et de nombreux départements à sa charge, que la production céréalière de l’année 2017 va atteindre le chiffre record de 102 millions de quintaux, soit, m’a-t-on précisé de source matheuse, 208 % d’augmentation par rapport à l’année passée. Si ce n’est pas de la baraka, ça lui ressemble quand même un grand chouya.

Donc, qui dit céréales, dit blé, et qui dit blé, dit oseille, et qui dit oseille, dit fric. Personnellement je ne sais pas trop ce que peut faire au juste 102 millions de quintaux en cash, mais ça doit faire un bon pactole tombé d’un ciel qui, je le répète, nous pardonne, ou plutôt, LEUR pardonne beaucoup de bêtises. Bref, tout cela, vous l’avez compris, ça va être du pain béni pour ce nouveau gouvernement lequel, au moment où je suis en train de lui casser du sucre-semoule sur le dos, n’a pas encore commencé le début des préliminaires de son mandat lequel, si tout va bien pour lui, devrait durer 5 ans.

En tout cas, on peut dire que ça démarre plutôt pas mal. Mais, en attendant de découvrir dans les jours à venir ce qu’il nous réserve comme bonnes surprises, ou, à Dieu ne plaise, comme mauvaises, il y des trucs qui risquent de nous faire douter de tout cet espoir chronique avec lequel nous, le peuple marocain dans son entièreté, nous n’avons jamais cessé de vivre. 

Qu’est-ce qui me fait dire ça ? Plusieurs choses. D’abord, ce gouvernement lui-même. Je m’étais promis de ne rien dire et d’attendre qu’il commence son boulot, mais franchement, quand je vois cette composition ratatouilleuse, ou ratatouillenne, je ne sais pas comment on dit, bref, ce mélange des genres et des espèces, je suis très dubitatif quant au résultat. En effet, pour pouvoir jouer ensemble, au foot, au hand, au basket, ou au hockey sur gazon, il ne suffit pas de porter la même tenue, ou même de chanter en choeur l’hymne du club, il y a une condition absolument indispensable, c’est que toute l’équipe doit savoir où se trouvent les buts à viser. Or, du peu que je sais des formations qui forment l’actuel gouvernement, il n’y en a pas une seule qui ressemble à l’autre, il n’y en a pas une qui pense comme l’autre - et là, je vais être dur - il n’y en pas une qui aime l’autre.

Vous pouvez me trouver satiriste extrémiste, mais, vous allez voir ce que vous allez voir. Quand on aura mangé l’immense quantité de pain provenant de tout le blé, avec ou sans son, de cette année, et quand, pour digérer, on aura bu toute l’eau, qui sera elle aussi très abondante cette saison, on va les voir venir, un à un, nous expliquer qu’une bonne récolte n’est pas suffisante pour garantir une bonne année, et qu’il y a un tas d’autres paramètres micro et macro, sans parler de la crise anglaise, des élections françaises, des combats en Irak et en Syrie, du référendum controversé en Turquie, des tirs de missiles yankees, de la baisse du prix des phosphates, de la remontée de celui du pétrole, des fluctuations des cours du dollar, de l’euro et même de la monnaie de Zinzibar qui n’est autre que le shilling Tanzanien, et d’ailleurs je ne suis pas ici pour vous apprendre la géographie. Bref, toutes les excuses seront bonnes à vous servir pour vous persuader que si ça ne va pas des masses, ce n’est pas de leur faute, mais celle de Voltaire qui n’a pas fini, le pauvre, de payer pour tous les politiciens incapables de cette planète.

Bon, je ne voudrais pas vous saper le moral, mais je ne voudrais pas non plus vous laisser berner par les balivernes. Cela dit, si tout ce que je raconte vous embête, faites comme si je n’ai rien dit. Après tout, on croit bien au père Noël, alors pourquoi pas... aux Frères ennemis.

Maintenant, je n’ai plus qu’à vous dire vivement un bon moulin à vent.

Et vivement mardi prochain.

Par Mohamed Laroussi
Le 18/04/2017 à 10h55