Diminution des surfaces, baisse de production, sécheresse... Les producteurs de tomates voient rouge

Tomates

Des tomates rondes. (Photo d'illustration)

À Souss Massa, région qui totalise près de 85% de la superficie totale de tomates au Maroc, les producteurs sont confrontés à un large éventail de défis: diminution des surfaces cultivables, baisse de rendement et coûts élevés de production. Un cocktail de difficultés exacerbé par le virus ToBRFV qui se répand rapidement dans les plantations, et le recul pluviométrique. Le point.

Le 15/01/2024 à 13h44

Entre caprices du climat et propagation du ToBRFV (virus des fruits bruns et rugueux de la tomate), agent infectieux qui affecte les plants de tomates en entraînant d’importantes pertes de récolte, les producteurs de cet incontournable de la cuisine marocaine luttent pour maintenir la viabilité de leurs exploitations dans la région de Souss Massa.

Interrogé par Le360, Mustapha Aouragh, producteur local de tomates, relève que la baisse des températures constatée dernièrement a été un coup dur pour les agriculteurs. Il rappelle que «le froid n’est pas propice à la tomate qui a besoin de température chaude pour sa croissance et son développement».

Les tomates étant sensibles au gel, les températures froides, en particulier près ou en dessous de zéro degré Celsius, peuvent endommager les tissus des plantes, provoquant la nécrose des feuilles, des fleurs et des fruits. La baisse du mercure peut également ralentir la croissance des plantations, réduire la floraison et la nouaison (formation de fruits) de ces plantations. De plus, les tomates sont plus susceptibles de contracter des maladies fongiques dans des conditions froides et humides, ce qui peut entraîner des pertes de récolte importantes, explique cet expert agronome.

Résultat: les rendements en tomates ont chuté à 500 kilogrammes par hectare et par jour en moyenne, contre le double auparavant. Aux difficultés climatiques s’ajoutent des coûts de production en hausse, y compris la main-d’œuvre, les engrais, l’eau et les traitements contre les maladies. «Une équation difficile pour les producteurs», regrette Mustapha Aouragh.

Le ToBRFV frappe durement les producteurs

Outre les fluctuations de température, une autre source imprévisible de pertes de récolte pour les producteurs de tomates est le ToBRFV (Virus de la rugosité bronzée du tabac). Les symptômes du ToBRFV comprennent la rugosité et la décoloration des fruits, ce qui rend les tomates non commerciales.

Il peut également provoquer des symptômes sur les feuilles, tels que des taches brunes et des déformations. Le virus se propage principalement par contact direct avec des plants infectés, par les mains des travailleurs agricoles ou par des outils contaminés.

Selon les dires de ce producteur, il s’avère que la seule solution efficace face à cette menace est l’arrachage des plantes contaminées. Par conséquent, les volumes de pertes peuvent varier considérablement d’une semaine à l’autre et d’un agriculteur à l’autre.

Amine Amanatoullah, un autre acteur clé de la région, pointe également du doigt les difficultés liées aux conditions climatiques extrêmes, et cette fois-ci il parle plutôt de la hausse des températures constatée en août dernier et qui a impacté la production d’octobre. «La canicule d’août a décimé une grande partie de nos cultures», dit-il. Les prix, traditionnellement bas en octobre, ont grimpé cette année, reflétant la rareté des produits disponibles.

Il explique que les nouvelles plantations devraient permettre d’augmenter les volumes de production. «Les plantations tardives, débutées à partir de novembre, commencent à donner leurs fruits, bien que l’un des défis actuels soit, pour certains producteurs, le poids des fruits. La canicule exceptionnelle en août a entraîné la perte de nombreuses plantes, ce qui a réduit le rendement en octobre. Je tiens à rappeler que la région a enregistré une température record de 50,4 degrés en août, au moment même où les tomates étaient en phase de plantation. Cette vague de chaleur a provoqué des brûlures sur les plantes, entraînant une perte de 22 à 25% des cultures, qui ont dû être replantées», rappelle-t-il.

Normalement, en octobre, le prix d’une caisse de 30 kilogrammes ne dépasse pas 30 à 40 dirhams, et les exportations commencent début novembre, poursuit notre interlocuteur. «Cependant, cette année, il n’y avait pas suffisamment de produits pour répondre à la demande, ce qui a entraîné une hausse des prix des légumes sur les marchés marocains. En outre, le ToBRFV pose également un problème important. Des recherches sont en cours pour développer des variétés de tomates rondes plus résistantes à ce virus», fait-il remarquer.

D’après ce producteur, les prix des tomates sont actuellement de plus en plus abordables pour les consommateurs (entre 3 et 6 dirhams le kilogramme sur le marché de gros de Casablanca, NDLR). «Cette tendance s’explique par le fait que les plantations tardives ont commencé à produire leurs fruits, ce qui a augmenté l’approvisionnement sur le marché. De plus, les exportateurs marocains ont choisi de diriger leurs produits vers le marché intérieur en raison de l’augmentation des droits de douane à la frontière mauritanienne. Cette décision a également contribué à accroître l’offre de tomates sur le marché marocain, ce qui a exercé une pression à la baisse sur les prix, rendant ainsi les produits plus accessibles aux consommateurs», conclut-il.

Par Hajar Kharroubi
Le 15/01/2024 à 13h44