Stocks de sécurité: le diagnostic alarmant de la Cour des comptes

DR

La Cour des comptes vient de rendre public son rapport relatif à une mission menée sur «les stocks de sécurité au Maroc» et les conclusions de ce travail sont plutôt inquiétantes. Compte rendu.

Le 10/01/2017 à 13h16

L’enquête de la Cour des comptes a porté sur des produits à intérêt économique ou social majeur pour le pays. Il s’agit notamment des produits pétroliers, du blé tendre, du sucre, des médicaments et des produits sanguins.

D’une manière générale, l'une des conclusions interpelle tout particulièrement. En effet, les limiers de la Cour des comptes soulignent que, faute de cadre légal évolutif et comportant des définitions précises, la notion de stock est mal appréhendée.

C’est ainsi qu’ils relèvent que le "stock de sécurité est confondu avec les stocks outils des opérateurs, destinés à répondre à leurs propres besoins commerciaux et non au souci national de sécurité de l’approvisionnement dans les circonstances normales et exceptionnelles".

Produits pétroliers: des stocks de dix jours au lieu de soixante!

Par segment, des lacunes assez alarmantes ont été soulignées concernant les produits pétroliers. D’abord, l’obligation réglementaire de détenir trentejours de ventes de pétrole brut par le raffineur "n’est respectée qu’à moitié avec des stocks ne couvrant que 15,7 jours de ventes à juillet 2015".

Le rapport supervisé par Driss Jettou ne manque pas de souligner que "depuis cette date, le raffineur local est en arrêt d’activité. Ce qui porte un risque supplémentaire sur la sécurité de l’approvisionnement du marché en produits pétroliers".

Et d’ajouter: "En effet, depuis l’été 2015, le marché national est approvisionné entièrement par l’importation de produits raffinés, ce qui accroît son exposition aux aléas du marché international et fait que les capacités de stockage se trouvent diminuées de celles disponibles, jusqu’à cette date, chez le raffineur local".

Pour leur part, les stocks de sécurité des produits pétroliers devant être détenus par les distributeurs, sont censés représenter soixantejours de consommation. Sauf que ce niveau n’est jamais atteint. Selon la Cour des comptes, "les écarts sont plus significatifs pour certains produits de grande consommation comme le gasoil et le butane".

Pour le gasoil, les stocks disponibles à fin 2015 ne permettaient de couvrir, en moyenne, que 24,1 jours de consommation. Et pour le butane, pour la même année, ces stocks ne couvraient que 27,5 jours de consommation.

Concernant au supercarburant, les stocks disponibles ne couvraient que 34,8 jours de consommation. Les stocks de fuel chez les distributeurs présentent la situation la plus critique avec des niveaux ne dépassant pas cinq jours de couverture en 2015.

Remarque importante: il arrive que les stocks atteignent des niveaux critiques ne dépassant pas dix jours de consommation pour certains mois.

Produits alimentaires: suivi des stocks quasi-impossible

En effet, le blé tendre et le stockage des céréales se caractérisent par le nombre élevé d’opérateurs. Le rapport rappelle qu’il existent 280 organismes stockeurs, 30 importateurs et 164 minoteries industrielles.

Ces derniers allient les modes de stockage traditionnel et moderne. Résultat: "Cette situation rend le suivi et le contrôle des stocks chez ces opérateurs plus difficiles et moins précis".

Concernant le sucre, et malgré la reconfiguration de la filière, il est à noter que "la situation des stocks de sécurité en sucre montre que les disponibilités chez l’opérateur dépassent en général l’obligation de stockage".

Produits de santé: un réglementation défaillante

En ce qui concerne les médicaments, le rapport précise que "la réglementation ne tient pas compte des spécificités des produits pharmaceutiques qui se comptent par milliers. Elle prévoit, en fait, une disposition générale et unique pour tous les produits sans tenir compte de leur criticité et intérêt thérapeutique, de la facilité ou la difficulté de s’en approvisionner, de la situation du marché: produit en monopole, existence de substituts ou d’alternatives thérapeutiques... ".

En conclusion, "ce système rend le suivi des stocks de médicaments difficile et moins efficace et ne permet pas de se focaliser sur les produits les plus critiques". Résultat: peu d’opérateurs se conforment à l’obligation de déclaration prévue à cet effet.

Dans cette même catégorie, on retrouve les produits sanguins, le document de la Cour des comptes indique que "l’insuffisance des stocks de produits sanguins est attribuable à plusieurs facteurs. Il s’agit de la culture du don qui n’est pas encore assez développée, de l’insuffisance des infrastructures d’accueil et de traitement, de problèmes organisationnels et de ressources humaines insuffisantes".

Par Imane Azmi
Le 10/01/2017 à 13h16