Benalla, l'épine dans le pied de Macron

Le président de la République française Emmanuel Macron et Alexandre Benalla le 24 février 2018 au salon de l'Agriculture à Paris

Le président de la République française Emmanuel Macron et Alexandre Benalla le 24 février 2018 au salon de l'Agriculture à Paris . AFP

Cinq mois après son limogeage, il continue d'empoisonner l'Elysée: l'ancien collaborateur d'Emmanuel Macron, Alexandre Benalla, qui affirme avoir continué à avoir des échanges régulièrement et jusque récemment avec le chef de l'Etat, plonge à nouveau la présidence française dans l'embarras.

Le 02/01/2019 à 07h35

Après avoir provoqué l'une des plus graves crises politiques du quinquennat au début de l'été, l'ancien chargé de mission du président français, n'en finit pas de faire les gros titres.

Dans un entretien accordé dimanche au journal en ligne Médiapart, Alexandre Benalla affirme être resté proche d'Emmanuel Macron après son licenciement, déclarant discuter régulièrement avec lui via l'application Telegram.

"Nous échangeons sur des thématiques diverses. C'est souvent sur le mode +comment tu vois les choses ?+. Cela peut aussi bien concerner les gilets jaunes, des considérations sur untel ou sur des questions de sécurité". Des échanges du type qu'il avait déjà avec le chef de l'Etat quand il était son homme de confiance à l'Elysée.

"J'aurais pu claquer la porte et passer à autre chose. Mais on continue à me solliciter, alors je continue à répondre", ajoute-t-il.

Des déclarations embarrassantes pour la présidence qui avait assuré ne plus entretenir de contact avec lui depuis son licenciement en juillet pour violences envers des manifestants.

Lundi après-midi, l'Elysée a réagi en accusant Alexandre Benalla d'entretenir "tout un faisceau de contrevérités et d'approximations" pour se venger.

L'ancien chargé de mission du président français précise avoir conservé sur son téléphone la preuve de ces échanges.

Selon lui, la communication s'est interrompue la semaine dernière, au moment où Médiapart révélait qu'il utilisait un passeport diplomatique pour des voyages d'affaires en Afrique. "Là, le lien est coupé", déclare-t-il.

L'ancien proche d'Emmanuel Macron a récemment effectué plusieurs voyages sur le continent africain et rencontré des dirigeants.

C'est un voyage au Tchad effectué début décembre, où Alexandre Benalla a rencontré le président tchadien Idriss Deby, qui a déclenché cet imbroglio.

Dans l'entretien avec Médiapart, Benalla affirme également avoir toujours rendu compte au président ou à son entourage de ses faits et gestes.

"J'explique que j'ai vu telle personne, je détaille les propos qui m'ont été rapportés et de quelle nature ils sont", dit-il.

Des déclarations contredites par le palais présidentiel qui a assuré de nouveau, ce lundi, que Benalla n'avait tenu l'Elysée au courant d'une partie de ses déplacements que le 20 décembre, "c'est-à-dire après que des journalistes aient appris l'existence de son déplacement au Tchad".

Sommé de s'expliquer sur l'utilisation de son passeport, Alexandre Benalla a déclaré: "Si on ne veut pas que j'utilise ces passeports, il n'y a qu'à les désactiver".

"Quand vous voyagez à l'étranger avec un passeport diplomatique, l'ambassade de France est au courant que vous arrivez", assure-t-il.

Une affirmation "purement fantaisiste" a réagi lundi le ministère des Affaires étrangères, qui a déclaré avoir "effectué plusieurs démarches" pour obtenir leur restitution.

L'Élysée a aussi réaffirmé lundi n'avoir pas été informé de l'utilisation de ces passeports.

Ces nouvelles déclarations de Benalla tombent mal pour le chef de l'Etat, déjà bien empêtré dans la crise des "gilets jaunes", et qui devait s'exprimer lundi soir à la télévision pour adresser ses voeux aux Français.

"C'est très mauvais pour Emmanuel Macron, cela accentue les doutes de l'opinion quant à sa capacité à être à la hauteur de sa fonction", commente le politologue Jerôme Sainte-Marie, sondeur à l'institut PollingVox.

Selon lui, cette nouvelle affaire Benalla "porte atteinte à la crédibilité de la parole présidentielle au moment où il en a le plus besoin". Pendant l'allocution présidentielle, des "gilets jaunes" ont prévu de se rassembler une nouvelle fois sur les Champs-Elysées pour manifester leur mécontentement.

"Cela redonne du courage aux opposants les plus résolus et accroît la focalisation du mécontentement des Gilets jaunes sur la personne même d'Emmanuel Macron", ajoute le sondeur.

L'opposition a réclamé lundi des explications à l'Élysée.

"Depuis le départ c'est une succession de mensonges, de dissimulation, au sommet de l'État", a accusé la porte-parole du parti de droite Les Républicains (LR), Laurence Sailliet sur la radio RTL.

Le 02/01/2019 à 07h35