Londres: 58 personnes considérées mortes dans l'incendie de la tour Grenfell

Des pompiers inspectent ce qu'il reste de la tour Grenfell ravagée par un incendie, le 16 juin 2017 à Londres.

Des pompiers inspectent ce qu'il reste de la tour Grenfell ravagée par un incendie, le 16 juin 2017 à Londres. . AFP

Au moins cinquante-huit personnes sont considérées comme mortes dans l'incendie de la tour Grenfell de Londres, a annoncé la police samedi, en pleine polémique sur la réaction de la Première ministre Theresa May, accusée de n'avoir pas pris la mesure du drame.

Le 17/06/2017 à 22h12

"Cinquante-huit personnes (...) sont portées disparues et donc je dois tristement présumer qu'elles sont mortes", a indiqué Stuart Cundy, un haut responsable de la police de la capitale britannique. "Ce nombre de 58 pourrait changer. J'espère que ce ne sera pas le cas, mais il pourrait augmenter", a-t-il ajouté, précisant que sur ce nouveau bilan, provisoire, 30 décès étaient confirmés et que 16 corps découverts dans cet immeuble de logements sociaux avaient été transportés à la morgue.

L'officier a souligné que l'opération de recherche des corps prendrait du temps, "des semaines", peut-être davantage, en raison de l'état de la tour, ravagée par un incendie d'origine inconnue dans la nuit de mardi à mercredi. L'ampleur du bilan, qui s'alourdit de jour en jour, a choqué l'opinion publique et provoqué la colère des proches des victimes et des membres de leur communauté.

Samedi encore, des manifestants ont brandi des pancartes "Justice pour Grenfell" non loin du 10, Downing Street, où se trouvent les bureaux de la Première ministre conservatrice Theresa May.

Sombre humeur nationale

Dans ce climat de deuil, la reine Elizabeth II a adressé à ses sujets un message d'une gravité inhabituelle alors qu'ont lieu les célébrations pour son 91e anniversaire. "Cette année, il est difficile de ne pas ressentir la très sombre humeur nationale", déclare-t-elle en invitant les Britanniques à puiser dans leurs ressources, dans leur histoire, pour répondre à la "succession de terribles tragédies" des derniers mois: trois attentats sanglants et l'incendie de la tour Grenfell. "Quand il est mis à l'épreuve, le Royaume-Uni se montre déterminé face à l'adversité", insiste la très populaire souveraine.

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La reine s'était rendue vendredi au chevet des victimes de l'incendie. L'image d'Elizabeth II discutant avec des membres de la communauté locale a offert un contraste saisissant avec la réaction de Theresa May qui, après s'être rendue sur place jeudi sans rencontrer la population, y est retournée le lendemain sous les huées.

La dirigeante a reçu samedi à Downing Street un groupe de résidents et de victimes, au lendemain d'une journée de protestations lors de laquelle des manifestants ont envahi la mairie de quartier de Kensington et Chelsea (ouest de Londres), où se trouve la tour, aux cris de "Honte à vous", "Tueurs". Autant de questions qui seront passées au crible par les enquêteurs pour déterminer pourquoi le feu a pris, et "comment il a progressé", a indiqué Stuart Cundy, promettant que les éventuels responsables seraient traduits en justice.

Selon le service de santé public NHS, 19 personnes étaient toujours hospitalisées samedi, dont 10 dans un état critique. Près de 600 personnes habitaient dans cet immeuble de 120 appartements.

Amazing Grace

Face à la détresse des victimes, Theresa May a annoncé le déblocage de cinq millions de livres, ainsi qu'un relogement pour tous les sinistrés dans les trois semaines. Elle a aussi répété vendredi soir qu'elle était "profondément affectée" par les récits "terrifiants" des survivants. Insuffisant pour une partie de la presse britannique: "Un leader qui a peur de rencontrer ses concitoyens est fini", lançait le Guardian dans un éditorial implacable. Evoquant la tour Grenfell et sa sinistre façade calcinée, le journal estimait que cette "tombe dans le ciel sera à jamais le monument de Theresa May".

Les autorités locales sont accusées de ne pas avoir entendu les cris d'alerte concernant la sécurité du bâtiment de 24 étages parce qu'ils provenaient d'une population majoritairement modeste. De nombreux résidents ont affirmé qu'il n'y avait pas d'issue de secours, pas d'extincteur, pas d'alarmes incendie. Le revêtement installé l'an dernier sur la façade aurait en outre favorisé la propagation de l'incendie.

Pour le moment, seules deux victimes ont été nommées. Il s'agit de Mohammed Alhajali, un réfugié syrien de 23 ans qui étudiait l'ingénierie civile, et d'une photographe britannique de 24 ans, Khadija Saye.

Sept Marocains figurent probablement parmi les victimes, a annoncé le ministère marocain des Affaires étrangères.

Le sinistre a suscité un vaste élan de solidarité: plus de 3 millions de livres ont été récoltées en faveur des victimes et les dons de vêtements et de nourriture affluaient.

Près de la tour samedi, des membres de la communauté ont chanté des prières sur l'air d'Amazing Grace, devant des dizaine de bouquets de fleurs déposés en hommage aux victimes. "Cela n'aurait pas dû arriver", a déploré Inderjit Bhopal, un pasteur méthodiste. "Au XXIe siècle, on doit pouvoir offrir des logements sûrs".

Le 17/06/2017 à 22h12