Comment l’ex-patron du renseignement français met à nu l’obsession antimarocaine du régime algérien

Bernard Bajolet.

Bernard Bajolet. . DR

Dans son livre paru aux éditions Plon, «Le soleil ne se lève plus à l’Est», Bernard Bajolet, ex-patron du renseignement français, met en évidence la fixation antimarocaine d'un régime algérien haineux. Décryptage.

Le 24/09/2018 à 13h44

On en sait davantage sur le tropisme antimarocain du régime algérien. Et c’est grâce aux nouvelles révélations de «l’homme le mieux informé" de France, Bernard Bajolet, ex-patron de la Direction générale de la sécurité extérieure (2013-2017). Dans un livre, paru un an après son départ de la tête de la DGSE, Bernard Bajolet, également ancien ambassadeur de France en Algérie (2006-2008), démontre avec force détails et arguments comment les relations du Maroc avec la France ont obsessionnellement occupé l’esprit des apparatchiks algériens octogénaires.

Évoquant sa première prise de contact avec le président Bouteflika, après sa nomination en 2006 en tant qu’ambassadeur de France en Algérie, Bernard Bavolet affirme avoir détecté très tôt l’extrême sensibilité algérienne par rapport aux relations franco-marocaines. «Lors de notre premier entretien, en décembre 2006, quelques jours après mon arrivée, je lui fis part (au président Bouteflika, Ndlr) du message «d’amitié, d’estime et d’affection» que le président Chirac m’avait chargé de lui transmettre. Cela ne lui suffisait manifestement pas: le président Chirac ne se cachait pas d’entretenir des relations quasiment familiales avec le roi du Maroc», écrit-t-il, dans son livre-mémoire. 

«On nous a parlé de relations privilégiées avec l’Algérie. Mais en réalité, les privilèges ont été réservés au Maroc et à la Tunisie. L’Algérie, elle, n’a rien vu», lui aurait soufflé Bouteflika.

Bernard Bajolet eut à peine le temps de s’installer à Alger qu’il réalise déjà la complexité de sa tâche en tant qu’ambassadeur de Jacques Chirac. Une complexité inscrite dans la durée, puisque bien des ambassadeurs français avant lui ont eu à gérer la sensibilité algérienne quant à l’entente franco-marocaine. L'auteur rappelle que le président Houari Boumediene n’a jamais reçu en audience l’ambassadeur Guy de Commines (en poste en 1975 à Alger), pas plus d’ailleurs qu’Abdelaziz Bouteflika, alors ministre des Affaires étrangères. En cause, «le soutien du président français Giscard d’Estaing au Maroc dans le dossier du Sahara occidental».

En guise de revanche, Houari Boumediene, ainsi que son fidèle héritier Bouteflika, né à Oujda, préféraient recevoir un correspondant du quotidien «Le Monde» à Alger, en lieu et place de l’ambassadeur de France à Alger, Guy de Commines!

Pour l’ex-patron de la DGSE, le Polisario est un «pion» de l’AlgérieBernard Bajolet révèle que «le Sahara occidental était l’un des premiers sujets qu’il a soulevés avec le président Bouteflika». Lors de cet entretien, ce dernier n’a pas hésité à délivrer son pli. «Paris a toujours soutenu la position marocaine depuis l’époque du président Giscard d’Estaing», s’est plaint le président Bouteflika.

Une plainte infondée. Parole de Bernard Bajolet: «il existe une lutte d’influence à propos du Sahara Occidental entre le Maroc, «défavorisé par le partage colonial du désert», et l’Algérie, «qui instrumentalise le Polisario de défendre le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui».

Vous avez bien lu: Alger « instrumentalise» le Polisario. Un fait que l'ex-patron de la DGSE a vérifié par ses propres moyens quand, au début des années 90, alors qu’il était directeur-adjoint d’Afrique du Nord et Moyen-Orient au Quai d’Orsay, il entreprit de «rencontrer secrètement, dans un hôtel parisien, des dirigeants du Polisario».

«Cette tentative n’avait pas abouti», affirme-t-il.

Inutile de chercher à savoir pourquoi: le pouvoir de décision est entre les mains d’Alger, et non du Polisario, marionnette d’une oligarchie algérienne restée nostalgique de la tristement défunte époque de la Guerre froide.

Par M'Hamed Hamrouch
Le 24/09/2018 à 13h44