Dialogue social: Le «oui, mais…» des syndicats

Brahim Taougar

Revue de presseSyndicats et gouvernement ont décidé de revenir s’asseoir à la table des négociations. Le dialogue social gelé depuis plusieurs mois, réussira-t-il à sortir de l’impasse?

Le 12/11/2014 à 22h30

Deux semaines après la grève générale du 29 octobre dernier, le gouvernement tient sa promesse et invite les centrales syndicales à reprendre le dialogue. Les trois centrales qui avaient lancé le mot d’ordre de grève, à savoir la CDT, l’UMT et la FDT, ont accepté de siéger à la table pour reprendre les négociations, écrit Al Massae sur sa Une. D’ores et déjà, les syndicalistes annoncent la couleur.

Pragmatisme gouvernemental

Noubir Alamaoui, secrétaire général de la CDT, a déclaré au quotidien que le gouvernement devait accepter les revendications des syndicats car les conditions sociales des travailleurs se sont détériorées en raison des hausses consécutives décidées par l’exécutif. En clair, les syndicats attendent des «mesures concrètes», même si la logique veut qu’elles boudent le dialogue social, mettant en exergue le fait que cette décision a été prise dans l’intérêt des travailleurs. En tout cas, ce round n’abordera pas tous les problèmes posés. La lettre d’invitation du chef du gouvernement a précisé que le sujet porterait sur la réforme des caisses de retraite. C’est ce qui a d’ailleurs poussé certains syndicats à dire que le gouvernement cherchait à morceler le dialogue social, écrit Al Ahdath Al Maghribia dans ses pages intérieures.

Un round déjà reporté

Le quotidien précise que ce round avait déjà été reporté une première fois en raison des festivités de célébration du mariage du Prince Moulay Rachid. Certains leaders accusent l’exécutif de sélectivité alors qu’ils veulent aborder les problèmes de la classe ouvrière dans leur globalité. Al Massae révèle que les trois syndicats initiateurs de la grève ont tenu une réunion, hier, de la commission de coordination pour accorder leurs violons. Al Ittihad Al Ichtiraki, dans son éditorial, explique quant à lui les raisons qui ont poussé les syndicats à revenir à la table des négociations. Ces raisons forment en quelque sorte un cahier revendicatif. La décision des centrales a également été dictée par sa volonté de ne pas dissocier les centrales des grands dossiers qui intéressent les salariés. C’est à peu près le même discours qu’a tenu le quotidien Ennass, avec le témoignage d’un syndicaliste en sus. Enfin, le quotidien Al Akhbar écrit en filigranes que les centrales ont accepté l’invitation de Benkirane à contrecœur, puisque le dossier de la retraite n’est qu’un point parmi d’autres. Citant un militant, le journal indique que les centrales comptent aborder l’ensemble des sujets et refusent la parcellisation et la sélectivité dans le traitement de leurs revendications. Relativement à la réforme des retraites, un communiqué du conseil d’administration de la CMR indique que la caisse a été marginalisée par Benkirane alors même qu’elle gère les retraites de 1,5 million de personnes. Pire encore, les données sur lesquelles se base l’exécutif ne reflètent pas la réalité, vu l’opacité des chiffres et des informations.

Voilà qui promet des débats houleux lors du prochain round du dialogue social. Les syndicats refusent de voir leur dossier revendicatif morcelé, alors que le gouvernement semble ne pas vouloir s’attaquer de front à tous les problèmes.

Par Amine Haddadi
Le 12/11/2014 à 22h30