Rififi chez les dirigeants du Polisario

Mohamed Lamine Bouhali (au centre) voit d'un oeil torve la nomination d'Abdellah Lahbib Bilal à un poste qu'il a occupé pendant quinze ans, celui de la "défense".

Mohamed Lamine Bouhali (au centre) voit d'un oeil torve la nomination d'Abdellah Lahbib Bilal à un poste qu'il a occupé pendant quinze ans, celui de la défense. . dr

Le remue-ménage opéré par Mohamed Abdelaziz au sein de la direction du Polisario au lendemain d’une réélection controversée à la tête du front suscite une vague de mécontentement. Tour d’horizon.

Le 16/01/2016 à 12h19

Y a du rififi à Rabouni ! La valse de changements opérée par Mohamed Abdelaziz, au lendemain de sa réélection pour un 12ème mandat à la tête du front séparatiste, n’a pas été du goût de ses lieutenants, en tout cas la majorité d’entre eux. En tête des mécontents, un certain Mohamed Lamine Al Bouhali, défroqué de son uniforme de «ministre de la défense» contre une combinaison peu valorisante de «ministre de l’urbanisme et du peuple des territoires libérés» ! Dégradation ? Promotion ? «Je suis prêt à exercer au plus bas de l’échelle de l’armée plutôt que d’occuper un poste de responsabilité civile», a-t-il grogné récemment dans une déclaration à un site séparatiste, «Al Mostakbal sahraoui» pour ne pas le nommer.

Incarnation de «l’aile radicale» du Polisario, Mohamed Lamine Bouhali, rival non déclaré de Mohamed Abdelaziz, ne s’est pas contenté de manifester publiquement ce coup de colère. Comme le rapportait Le360 dans son édition de jeudi 11 janvier, 50 éléments du Polisario, munis d’exemplaires de la «RASD», ont organisé, le 12 courant, un sit-in devant le siège de la «présidence», à Rabouni, en signe de soutien à Bouhali, pour être dispersés vingt minutes plus tard par des éléments de la garde présidentielle et de la «gendarmerie», avant qu’une quinzaine parmi eux ne reviennent sur les lieux, où elle est restée jusqu’à 18H00.

Autre mécontent, et il n’est pas des moindres. Il s’agit de Brahim Ghali, prédécesseur de Bouhali à la tête dudit «ministère de la défense» devenu «ambassadeur du Polisario à Alger» après avoir été chassé de Madrid, suite à une plainte pour « génocide » déposée par le sahraoui Dahi Aguai auprès de l’Audience nationale, plus haute juridiction en Espagne.Brahim Ghalia a décliné à son tour sa nomination au poste de «responsable du secrétariat général de l’organisation politique du Polisario" en mettant en avant ses engagements vis-à-vis des membres de sa famille établis à Alger.

Au suivant… Bachir Mustapha Sayed, frère du fondateur du Polisario, feu El Ouali Sayed, a également rejeté le poste de «conseiller auprès de la présidence». Selon les sources du Le360, il a eu une altercation avec le prétendu «premier ministre» Abdelkader Taleb Omar au sujet de l’insignifiance du «portefeuille» qui lui a été attribué.

Sur la même lancée, Omar Mansour n’a pas apprécié son évincement de son ancien poste de représentant du Polisario à Paris, estimant que les nouveaux changements ne sont pas réfléchis et sont loin de répondre aux attentes du «peuple sahraoui».

Dans la même foulée, Mohamed Salem Bayssate, l’un des dirigeants du front, a rejeté le pseudo-«poste de wali du camp de Laâyoune» dénonçant son insignifiance.

Voyez, on pourrait allonger la liste des mécontents mais abrégeons : Ce souffle de colère traduit un véritable malaise couvant au sein de la direction du front et qui, à moins d’un rétropédalage de la part de Mohamed Abdelaziz, risque de se transformer en mouvement de fronde. D’après les sources du Le360, Mohamed Lamine Bouhali, «faucon des faucons du Polisario», serait en train de préparer un coup fourchu contre Mohamed Abdelaziz, mobilisant ses sympathisants qui se compteraient par milliers dans les camps de Lahmada Tindouf. «Les habitants des camps de Tindouf soutiennent que le remplacement de Bouhali (Ndlr : par Abdellah Lahbib Bilal) à la tête du ministère de la défense constitue une offense au passé héroïque de ce cadre et un signe de renoncement de la direction du Polisario à la lutte armée».

Côté femmes du front, la même vague contestataire gagne les camps. Les habitants mettent en doute la capacité d’une certaine Meriem Salek Hmadda et Fatma Bella à gérer convenablement les camps d’ «Aousserd» et « Boujdour», déjà ravagés par de graves problèmes, dont la pénurie de l’eau potable, l’insécurité et la détérioration des services sanitaires.

Par Ziad Alami
Le 16/01/2016 à 12h19