Sommet européen à Bruxelles: accord sur la migration incluant le Maroc

Le siège de l'Union européenne à Bruxelles.

Le siège de l'Union européenne à Bruxelles. . DR

Les dirigeants de l’UE, réunis en sommet à Bruxelles, sont parvenus vendredi à un accord sur la question de la gestion des flux migratoires, prévoyant notamment de soutenir les Etats membres ainsi que les pays d'origine et de transit, en particulier le Maroc, pour prévenir la migration illégale.

Le 29/06/2018 à 18h06

«Compte tenu de l'accroissement récent des flux en Méditerranée occidentale, l'UE soutiendra, financièrement et par d'autres moyens, tous les efforts consentis par les États membres, en particulier l'Espagne, et les pays d'origine et de transit, en particulier le Maroc, pour prévenir la migration illégale», lit-on dans les conclusions du Conseil européen.

Dans ces conclusions, adoptées après plus de huit heures de discussion sur ce dossier délicat, l’Italie ayant menacé jeudi soir de bloquer toute négociation des Vingt-huit lors du sommet européen à défaut de solidarité sur les questions migratoires, le Conseil européen rappelle qu'une politique migratoire européenne qui fonctionne «passe nécessairement par une approche globale en matière de migrations qui associe un contrôle véritablement effectif des frontières extérieures de l'UE, une action extérieure accrue et les aspects intérieurs, conformément à nos principes et valeurs».

«Il s'agit d'un défi non seulement pour un seul État membre, mais aussi pour l'Europe dans son ensemble», note le Conseil représentant les 28 leaders européens qui se disent déterminés à poursuivre et à renforcer cette politique pour empêcher que ne se reproduisent les flux incontrôlés de 2015 et endiguer davantage les migrations illégales sur toutes les routes existantes et émergentes.

En ce qui concerne la route de la Méditerranée centrale, les dirigeants de l'UE conviennent d'intensifier encore les efforts déployés pour lutter contre les passeurs opérant à partir de la Libye ou d'ailleurs.

L'UE continuera à cet égard de «se tenir aux côtés de l'Italie et des autres États membres situés en première ligne» et «renforcera son soutien en faveur de la région du Sahel, des garde-côtes libyens, des communautés côtières et méridionales, de conditions d'accueil humaines, de retours humanitaires volontaires, d'une coopération avec d'autres pays d'origine et de transit, ainsi que de la réinstallation volontaire».

«Tous les navires qui opèrent dans la Méditerranée doivent respecter les lois applicables et ne pas faire obstacle aux opérations des garde-côtes libyens», soulignent les dirigeants européens.

Par ailleurs, afin de «casser définitivement» le modèle économique des passeurs et d'empêcher ainsi des pertes tragiques de vies humaines, ils insistent sur la nécessité de «supprimer l'incitation à entreprendre des voyages périlleux», à travers «une nouvelle approche, fondée sur des actions menées en commun ou de manière complémentaire entre les États membres, à l'égard du débarquement des personnes secourues dans le cadre d'opérations de recherche et de sauvetage».

Dans ce contexte, ils invitent le Conseil représentant les 28 Etats membres de l’UE et la Commission européenne à «examiner sans tarder le concept de plateformes régionales de débarquement», en coopération étroite avec les pays tiers concernés ainsi que le Haut-commissariat pour les réfugiés HCR et l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).

Ces plateformes, précisent-ils, devraient fonctionner «en distinguant entre les situations individuelles, dans le plein respect du droit international et sans créer de facteur d'appel».

Sur le territoire de l'UE, ils soulignent que les personnes secourues, conformément au droit international, devraient être prises en charge sur «la base d' un effort partagé, par un transfert dans des centres contrôlés établis dans des États membres, uniquement sur une base volontaire, où un traitement rapide et sûr permettrait, avec le soutien total de l'UE, de distinguer les migrants en situation irrégulière, qui feront l'objet d'un retour, des personnes ayant besoin d'une protection internationale, auxquelles le principe de solidarité s'appliquerait».

Le Conseil européen convient, en outre, de lancer la deuxième tranche de la facilité en faveur des réfugiés en Turquie et, dans le même temps, de transférer 500 millions d'euros de la réserve du Fonds européen de développement (FED) vers le fonds fiduciaire de l'UE pour l'Afrique, tout en invitant les États membres à contribuer davantage à ce dernier fonds en vue de son réapprovisionnement.

«Pour s'attaquer au cœur du problème migratoire, il est nécessaire de mettre en place un partenariat avec l'Afrique visant une transformation socioéconomique substantielle du continent africain, reposant sur les principes et objectifs tels qu'ils sont définis par les pays africains dans leur agenda 2063», souligne le Conseil européen qui appelle l'Union européenne et ses États membres à se montrer «à la hauteur de ce défi».

«Nous devons porter l'étendue et la qualité de notre coopération avec l'Afrique à un nouveau niveau. Cela nécessitera non seulement un financement accru en faveur du développement, mais aussi des mesures destinées à créer un nouveau cadre propice à une augmentation substantielle des investissements privés, tant africains qu'européens», plaident les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE qui souhaitent accorder une attention particulière à l'enseignement, à la santé, aux infrastructures, à l'innovation, à la bonne gouvernance et à l'autonomisation des femmes.

«L'Afrique est notre voisin, et cela doit se traduire par une multiplication des échanges et des contacts entre les populations des deux continents, à tous les niveaux de la société civile», affirment les leaders européens, convaincus que la coopération entre l'Union européenne et l'Union africaine constitue «un élément important" de leur relation qui doit être «davantage développée et encouragée».

Dans le contexte du prochain cadre financier pluriannuel de l’UE (budget européen à long terme), le Conseil européen relève la nécessité de disposer d'«instruments flexibles, qui permettent un décaissement rapide, pour lutter contre la migration illégale».

Les fonds dans les domaines de la sécurité intérieure, de la gestion intégrée des frontières, ainsi que de l'asile et des migrations devraient dès lors inclure d'importantes composantes consacrées à la dimension extérieure de la gestion des migrations, souligne le Conseil européen qui rappelle aussi la nécessité pour les États membres d'assurer le contrôle effectif des frontières extérieures de l'UE, avec le soutien financier et matériel de l'UE, et d'«accélérer sensiblement le retour effectif des migrants en situation irrégulière».

«À ces deux égards, le rôle d'appui joué par l’agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex), notamment dans le cadre de la coopération avec les pays tiers, devrait être encore renforcé par une augmentation des ressources et un mandat consolidé», précise le Conseil européen qui salue l'intention de la Commission européenne de présenter des propositions législatives en vue d'une politique européenne «plus efficace et cohérente en matière de retour».

En ce qui concerne la situation à l'intérieur de l'UE, il met en garde que les mouvements secondaires de demandeurs d'asile entre les États membres risquent de porter atteinte à l'intégrité du régime d'asile européen commun et à l'acquis de Schengen, d’où l’impératif pour les États membres de prendre «toutes les mesures législatives et administratives internes nécessaires pour enrayer ces mouvements et coopérer étroitement à cette fin».

Pour ce qui est de la réforme en vue d'un nouveau régime d'asile européen commun, le Conseil fait état de «progrès notables» sur la gestion de ce dossier mais «un consensus doit être trouvé sur le règlement de Dublin pour qu'il soit réformé sur la base d'un équilibre entre responsabilité et solidarité, en tenant compte des personnes débarquées à la suite d'opérations de recherche et de sauvetage».

Le nombre de franchissements illégaux des frontières de l'Union européenne détectés a été réduit de 95 % par rapport au pic qu'il avait atteint en octobre 2015, même si les flux sont récemment repartis à la hausse sur les routes de la Méditerranée orientale et de la Méditerranée occidentale, selon les derniers chiffres de l'UE.

Le 29/06/2018 à 18h06