Les raisons du réchauffement climatique en Afrique

L’Afrique réelle

ChroniqueDans une précédente chronique nous avons vu que si l’Afrique se réchauffe, il ne s’agit pas d’un phénomène nouveau, et comme le propre du climat est de changer, à quoi est donc dû l’actuel épisode de réchauffement?

Le 15/02/2022 à 11h00

En 1992, dans une publication datant donc d’avant l’apparition de la notion de «réchauffement climatique global dû à l’homme», deux des plus grands climatologues tropicalistes mondiaux, les Français Yves Tardy et Jean-Luc Probst ont expliqué que les changements climatiques successifs de l’Afrique sont dus à la position du FIT (Front Intertropical) ou ITCZ (Intertropical Convergence Zone).

Selon ces deux éminents spécialistes, deux scénarios doivent être mis en évidence:

1- Lorsque le FIT est maintenu en position méridionale, soit parce que les anticyclones polaires originaires du Pôle Sud, sont moins actifs que de coutume, soit parce que les anticyclones venus du Pôle Nord sont au contraire plus longtemps et plus fortement actifs, le déficit pluviométrique est généralisé sur le Sahel, comme ce fut le cas en 1942, 1944, 1948, 1970, 1971, 1972 et 1973.

2- Lorsque le FIT remonte haut vers le nord sous la poussée des anticyclones originaires du Pôle Sud, on enregistre au contraire un excédent pluviométrique sur l’Afrique sahélienne de l’Ouest.

Ainsi, avec les mouvements du FIT qui sont sous l’influence de la montée vers le nord des masses d’air polaire venant du Pôle Sud ou de la descente vers le sud des masses d’air polaire venant du Pôle Nord, nous avons l’explication des fluctuations de température et du taux d’humidité. En réalité nous sommes en présence d’une sorte de compétition entre Hémisphère Nord et Hémisphère Sud.

Depuis les travaux d’Yves Tardy et de Jean-Luc Probst les recherches ont intégré les variations du FIT dans des cycles plus anciens afin de tenter de comprendre le phénomène. En effet, quelle est l’explication des variations du FIT?

Dans sa thèse consacrée aux changements climatiques africains depuis 165.000 ans, Mathieu Dalibard (2011) donne l’explication suivante: «les changements climatiques globaux à l’échelle du Quaternaire (période qui débute il y a 2,5 millions d’années) résultent de l’interaction de divers facteurs agissant de façon plus ou moins cycliques à court ou long termes. Les grands changements climatiques comme les cycles longs dont la période est supérieure à quelques millénaires sont dus à des variations de mouvement et de position de la Terre par rapport au soleil».

Les cycles climatiques longs, identifiés par Mathieu Dalibard, seraient au nombre de trois:1-Les cycles dépendant de la variation de l’orbite terrestre ou «cycles de l’excentricité» fluctueraient entre 400 000 et 100 000 ans.2-Les cycles dépendant de l’inclinaison de l’axe terrestre ou «cycles de l’obliquité» fluctueraient entre 54 000 et 41 000 ans.3-Les cycles dépendant de la variation de l’axe de rotation de la Terre ou «cycles de précession», fluctueraient entre 23 000 et 19 000 ans.

Durant ces trois cycles, l’interception des rayonnements solaires par la Terre change, et donc, par voie de conséquence, le climat en est affecté. L’explication serait alors que les paramètres orbitaux changeant, la quantité d’énergie solaire reçue par la Terre varierait, d’où des changements climatiques qui se produisirent selon des périodicités de 100.000, 40.000 et 20.000 ans respectivement.

Or, à l’intérieur de ces grands cycles, existeraient des cycles de moindre durée expliquant les oscillations secondaires que nous observons à l’échelle historique. En effet, si ces grands cycles influencent les changements climatiques à grande échelle que sont les phases glaciaires et interglaciaires, d’autres cycles de durée plus courte jouent un rôle important sur les fluctuations environnementales.

Par Bernard Lugan
Le 15/02/2022 à 11h00