Festival du cinéma national: De Sail à Fihri

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Le coup d’envoi du Festival national du film de Tanger a été donné ce vendredi 20 février. C'est le baptême de feu pour le nouveau directeur du Centre cinématographique marocain (CCM), Sarim Fassi-Fihri, premier responsable du 7ème Art sous le gouvernement Benkirane.

Le 21/02/2015 à 18h57

Les regards des cinéphiles marocains sont braqués sur la ville du Détroit abritant le Festival national du film de Tanger. On passera outre les films en compétition, le choix des longs-métrages devant concourir pour le sacre final, les éternelles litanies sur les subventions… Cette grand-messe du cinéma marocain a cependant ceci d’important qu’elle est devenue une tradition respectée dans le temps et l’espace.

Force est de reconnaître que beaucoup de chemin a été parcouru grâce à Noureddine Sail, ancien directeur du CCM. Rattrapé par l’âge de la retraite, mais surtout n’étant pas en odeur de sainteté avec les islamistes du PJD au pouvoir, Sail a beau résister aux conservateurs ne voyant dans le cinéma qu’un moyen de perversion, on a fini par avoir sa tête.

Le grand intellectuel qu’il est, auteur par ailleurs d’un beau roman, peu connu du public «L’ombre du chroniqueur», s’en est allé. Hélas, comme sur la pointe des pieds. Pourtant, son apport, de l’avis des connaisseurs, est des plus remarquables. Pas étonnant que le festival du Caire (Egypte) lui rende un hommage digne de lui. Feu Youssef Chahine ne disait-il pas beaucoup de bien de Sail? Mais, comme prétend un dicton, nul n’est prophète en son pays. D’autant plus navrant qu’aucun hommage au Maroc d’importance n’a été rendu à ce grand homme du cinéma, surnommé à juste titre "Monsieur Cinéma".

Son successeur Sarim Fassi-Fihri, venu du monde de la production, a, lui-pour ainsi dire- cédé face à la première bourrasque. Le film «Exodus : Gos and kings» de Ridley Scott était son premier véritable challenge. Devant arbitrer face aux voix des PJDistes l’ayant emporté au sein de la Commission de visionnage des films, il a accepté d’interdire le long-métrage à cause d’une scène qui n’aurait pourtant pas créé la «fitna» au sein de la société.

La cohabitation entre Sarim Fassi-Fihri et le PJD, grand pourfendeur de l’art, a déjà bien commencé. Résistera-t-elle face au vent de la liberté qui est l’apanage des artistes et autres cinéastes ? Car le cinéma, comme tout autre moyen d’expression libre, n’a pas besoin de compromis. Ni de compromissions.

Par Abdelkader El-Aine
Le 21/02/2015 à 18h57