Coronavirus: plus de 150 contaminations dans un complexe de trois usines à Casablanca

Moulay Hafid Elalamy, ministre de l'Industrie et du commerce.

Moulay Hafid Elalamy, ministre de l'Industrie et du commerce. . DR

La reprise de l’activité industrielle soulève un sérieux problème de santé publique au Maroc. Un important foyer de contamination au coronavirus a été identifié à Casablanca, touchant simultanément trois entreprises voisines, au cœur de la zone industrielle de Sidi Bernoussi.

Le 05/05/2020 à 21h35

Ce nouveau cluster a été repéré au sein de trois unités industrielles (Pretty Shoes, Cochazur, Shoes Diffusion), propriété de la famille Mahlou, apprend Le360 de sources sanitaires. Les trois usines fabriquent des chaussures, toutes destinées à l’export, pour la marque italienne Geox.

Parmi le personnel des trois usines, soit un total d’environ 1.000 personnes, plus de 150 cas testés positifs avaient été enregistrés à l’heure où nous mettions en ligne. Ce bilan reste provisoire dans la mesure où les prélèvements opérés jusqu’ici concernent à peine la moitié des effectifs.

L’apparition de ce nouveau foyer de contamination tombe comme une douche froide, alors que le gouvernement multiplie les actions pour inciter les entreprises à reprendre l’activité le plus tôt possible. Lors de son passage, il y a quelques jours, devant la commission des finances à la Chambre des représentants, le ministre de l’Industrie et du commerce, Moulay Hafid Elalamy, a laissé entendre que le contrôle mené par une commission mixte, composée de membres du ministère de la Santé, de l’Intérieur, du Travail et de l’Industrie, a été renforcé pour veiller au respect des nouvelles normes préventives exigées par les autorités sanitaires (port de masque, distanciation, etc.).

Les usines de chaussures de Sidi Bernoussi n’ont visiblement pas reçu la visite de la commission de contrôle. Sinon comment expliquer le fait de laisser ces trois unités industrielles tourner à plein régime, avec trois shifts 24h/24 en faisant fi des règles de distanciation imposées par l’épidémie. Pire, Le360 a appris qu’après avoir distribué des masques de protection pendant les premiers jours, il a été demandé aux salariés de se débrouiller pour s'en procurer eux-mêmes. Résultat: un grand nombre d’entre eux travaillait sans bavette.

Les unités de la zone industrielle de Sidi Bernoussi sont-elles autorisées à continuer à fonctionner comme si de rien n’était, en cas de pandémie comme en temps normal? Pourtant, les chaussures fabriquées dans ces usines ne revêtent aucun caractère stratégique pour le pays, si ce n’est pour alimenter la collection hiver 2021 de la marque italienne Geox.

Il convient de noter que le cluster de Sidi Bernoussi a surgi à quelques encablures de celui découvert à la mi-avril au niveau de la zone industrielle de Ain Sebaa. De par son ampleur, en ravageant d’un seul coup trois usines, ce nouveau foyer peut remettre en cause tous les scénarios du déconfinement et porte un sérieux coup à l’effort collectif visant à freiner la propagation du virus. Il interroge aussi sur la capacité du gouvernement à garantir un retour à la normale sans trop de dégâts, surtout humains. Ce cluster interpelle aussi sur la chaîne des responsabilités dans la protection des ouvriers en milieu professionnel. Car, faut-il le rappeler, une vie humaine vaut bien plus qu’une paire de chaussures qui ne sera portée qu’en hiver 2021.

Par Wadie El Mouden
Le 05/05/2020 à 21h35