Cuivre: les industriels marocains du câblage menacés par la flambée des cours et le risque de pénurie

Une part importante de la production mondiale de cuivre est utilisée pour la fabrication de matériels de conduction dans les technologies de l’énergie et de la communication.

Une part importante de la production mondiale de cuivre est utilisée pour la fabrication de matériels de conduction dans les technologies de l’énergie et de la communication. . DR

La hausse vertigineuse des cours du cuivre ces dernières semaines, et les difficultés d’approvisionnement sur les marchés mondiaux, mettent sous pression les professionnels du câblage au Maroc. Explications.

Le 18/05/2021 à 14h09

Jamais dans l’histoire le cuivre n’a coûté aussi cher. Depuis le 7 mai dernier, la tonne de cuivre s’échange sur le London Metal Exchange à plus de 10.000 dollars (10.300 dollars exactement), battant son record précédent qui datait de février 2011.

Depuis mars 2020 et le déclenchement de la crise sanitaire, le cours de ce métal fortement utilisé dans l'industrie, notamment pour la confection de circuits électriques, a plus que doublé, stimulé par une forte reprise de la demande, en particulier chinoise, un dollar relativement faible, et une offre qui peine à suivre la cadence.

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Si cette flambée des cours fait les affaires des entreprises minières qui se frottent les mains, les industriels opérant dans l’électricité et le câblage, grands consommateurs du métal rouge, sont, en revanche, en proie à de grandes difficultés.

«Les conséquences de la flambée du cours du cuivre seraient plus graves que celles du Covid-19, si les cours se maintiennent à ces niveaux ou augmentent davatange», affirme Ali El Harti, président de la Fédération nationale de l'électricité et de l'électronique au Maroc(Fenelec), joint par Le360. Parmi les trois métiers que compte la filière câblage, à savoir les fabricants, les installateurs et les distributeurs, celui des installateurs est le plus directement impacté. En effet, plusieurs d’entre eux sont liés par des contrats, passés il y a plus d’un an avec les grands donneurs d’ordre (dont l’Etat et les entreprises publiques), sur la base d’un prix de 4.500 à 5.000 dollars la tonne de cuivre. Or, entre temps, les cours ont plus que doublé.

«Certains installateurs enregistrent des pertes sèches conséquentes», souligne notre interlocuteur, qui alerte sur un risque réel de faillite pour les opérateurs dont l’activité dépend essentiellement du câblage.

Risque de pénurieA la hausse du prix du cuivre s’ajoutent les difficultés d’approvisionnement pour les industriels, au point que certains opérateurs évoquent un risque de pénurie. Il faut savoir que la quasi-totalité du cuivre utilisé dans le Royaume est importée, notamment du Chili, premier producteur mondial de ce minerai. Au début de la crise sanitaire, les mines de cuivre au Chili ont subi quatre mois d’arrêt. Les commandes ont par ailleurs été reportées.

Mais la reprise économique qui se profile, et les principales puissances qui reconstituent leur stock, occasionnent une forte concentration de la demande et des tensions sur l’approvisionnement. «Une fois que ces demandes seront traitées, les cours pourraient revenir à des niveaux plus convenables», espère Ali El Harti.

Les projections de Bank of America laissent pourtant peu de place à l’optimisme. Dans une note récente, Michael Widmer, spécialiste des matières premières, estime ainsi qu'une tonne de cuivre pourrait atteindre les 20.000 dollars d'ici à 2025, soit plus du double de son prix actuel!

Outre les installateurs, les fabricants de câbles en cuir sont également impactés. «Ils achètent deux fois moins de cuivre qu’en période normale, et ils ne peuvent servir que la moitié de leurs clients», indique El Harti.

«Les prix des câbles sont en hausse étant donné qu’ils sont directement indexés sur ceux du cuivre», fait savoir notre interlocuteur, qui n’écarte pas un risque de pénurie sur les produits finis. Une situation qui pourrait se répercuter, par ricochet, sur certains secteurs comme le bâtiment et l’immobilier résidentiel, grands consommateurs de câbles en cuir.

En attendant un hypothétique retour à la normale des fondamentaux du marché du cuivre, les opérateurs du câblage appellent à une révision des contrats passés avec les grands donneurs d’ordre, notamment ceux du secteur public.

«Certains projets menés avec l’Etat ont été stoppés à la demande de ce dernier, à cause du Covid. Aujourd’hui, nous demandons la révision des contrats passés avec une formule de révision des prix, indexée sur les cours du cuivre», préconise le président de la Fenelec.

Par Amine El Kadiri
Le 18/05/2021 à 14h09