L’endettement des entreprises et des ménages menace la stabilité financière

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Le rapport sur la stabilité financière vient de tomber. Etabli par la direction du Trésor et les trois autorités de régulation de marché des capitaux (ACAPS, AMMC et Bank Al-Maghrib), le document décrit de manière détaillée les différents risques qui menacent le système financier national.

Le 24/07/2018 à 16h18

Le déficit du régime des pensions civiles de la Caisse marocaine des retraites (CMR), l’endettement des ménages et des entreprises non financières, la marge de solvabilité ne représentant pas la réalité du secteur des assurances, la vulnérabilité des banques aux chocs exogènes susceptibles d’impacter la qualité du crédit sont autant de menaces pesant sur la stabilité financière au Maroc.

- Le rythme d’accroissement de la dette des entreprises non financières a certes baissé. Mais le taux de défaut de ces entreprises, soit 10,1%, demeure à un niveau encore significatif. L’analyse de l’endettement d’un échantillon d’environ 72.000 entreprises non financières publiques et privées, dont les données ont été fiabilisées, fait ressortir que l’endettement à long terme des grandes entreprises (GE) représente 37% de leurs capitaux permanents en 2016 contre 23% pour la TPME. Cette analyse révèle également que les délais de paiement inter-entreprises continuent d’afficher des niveaux inquiétants notamment en ce qui concerne les TPME et certains secteurs d’activité, particulièrement la promotion immobilière, le BTP, l’industrie extractive et les services fournis aux entreprises.

- L’endettement financier des ménages s’est établi aux alentours de 30% du PIB, niveau comparable à celui observé au cours des cinq dernières années, avec toutefois un allongement des maturités des emprunts contractés, ce qui appelle à la vigilance, particulièrement en ce qui concerne les prêts à la consommation.

- L’année 2017 a été marquée par une accentuation des besoins en liquidité des banques par rapport à l’année précédente, en lien notamment avec l’augmentation de leurs achats à terme en devises, induisant ainsi un recours plus marqué aux avances de la Banque centrale. Le rapport sur la stabilité financière omet de citer le contexte de réalisation de ces achats, marqué par une forte spéculation contre une dépréciation de la valeur du dirham, à la veille de la mise en place du régime de la flexibilité du dirham. Ledit rapport note en revanche que le niveau des réserves de devises s’est replié de 3,3% par rapport à 2016 en raison justement et principalement de ces opérations d’achats de devises par les banques pour les besoins de couverture à terme de leur clientèle.

- Les exercices de stress tests réalisés confirment de nouveau la capacité des banques marocaines à conserver leur résilience face aux chocs issus des conditions macroéconomiques, de leurs expositions intra-financières et de celles émanant de leurs filiales implantées à l’étranger, particulièrement en Afrique. Elles demeurent toutefois, vulnérables aux chocs potentiels susceptibles d’impacter la qualité du crédit de leurs plus grandes contreparties.

- Les actifs liquides des compagnies d’assurances ont représenté plus de 2,5 fois leurs passifs exigibles, reflétant une forte capacité à couvrir leurs éventuelles sorties de trésorerie. La marge de solvabilité s’est située à 451%. Bien que son niveau dépasse largement le minimum exigé par le cadre prudentiel en vigueur, cette marge ne reflète pas la réalité du secteur en matière de couverture des risques encourus, dans la mesure où elle ne couvre que le risque de souscription. Le passage vers un régime prudentiel de solvabilité basée sur les risques pourrait nécessiter la recapitalisation de certaines entreprises d’assurances.

- Concernant les régimes de retraite, le niveau des prestations servies a représenté 117% de celui des cotisations perçues et leurs réserves ont atteint 293,7 milliards de dirhams, en hausse de 4,5% par rapport à 2016. La réforme paramétrique du Régime des pensions civiles (RPC) intervenue en 2016 n’a pas permis de redresser le solde global de ce régime qui est entré en phase de déficit structurel depuis 2015.

Par Ayoub Khattabi
Le 24/07/2018 à 16h18