Trésor public: un excédent budgétaire de 16,84 milliards de dirhams dégagé à fin mars, à quoi peut-il servir?

Siège du ministère de l’Économie et des Finances à Rabat.

Le Trésor a dégagé un excédent budgétaire de 16,84 milliards de dirhams au premier trimestre 2024, contre 6,24 milliards de dirhams un an plus tôt. Cet excédent, qui provient d’un effet conjugué d’une augmentation des recettes ordinaires (11,7%) et d’une baisse des dépenses globales de 1,1%, peut faire l’objet de multiples usages. Il peut être affecté à l’investissement, au placement à court terme afin de le rentabiliser, ou au remboursement de dettes.

Le 22/04/2024 à 08h16

L’exécution de la Loi de finances (LF) au titre des trois premiers mois de 2024 a permis au Trésor de dégager un excédent budgétaire de 16,84 milliards de dirhams, un montant qui dépasse de loin le niveau enregistré durant la même période de 2023, qui est de 6,24 milliards de dirhams. Ce qui représente une appréciation de 170% sur un an.

Cet excédent provient d’un effet conjugué d’une augmentation des recettes ordinaires (11,7%), et d’une baisse des dépenses globales de 1,1%. À noter que ces évolutions, explique Samia Jirari, économiste et membre du Forum des chercheurs du ministère de l’Économie et des Finances (FCMEF), contactée par Le360, concernent les émissions, alors que les engagements se sont maintenus au même niveau affiché à fin mars 2023.

L’augmentation des recettes ordinaires englobe une hausse de 9,3% des recettes fiscales, due principalement aux taux de réalisation importants par rapport aux prévisions de la LF 2024, notamment en matière de fiscalité domestique (43,3% en termes d’IS et 29,5% pour la TVA à l’intérieur à titre d’illustration) et de recettes douanières (un taux de réalisation de 24,2% des droits de douane et 24,6% des TIC sur les produits énergétiques), explique notre interlocutrice.

S’agissant des recettes non fiscales, l’État a pu encaisser 36,2% des prévisions de la LF 2024 à la fin du premier trimestre de l’année 2024, soit une hausse de 35,2% par rapport à fin mars 2023, note-t-elle.

Pour ce qui est de la légère baisse des émissions globales, malgré une hausse des dépenses d’investissement de près de 3%, «l’élément phare» qui en ressort est le repli des dépenses de compensation de 77,7%, soit la consommation d’uniquement 5,8% des crédits alloués par la LF.

L’économiste a relevé que, lors de ce premier trimestre 2024, les dépenses de compensation ont affiché un solde nul à fin janvier, 500 millions de dirhams à fin février et un milliard de dirhams à fin mars.

L’effet décompensation du gaz butane

«Ce repli rigoureux est une résultante cartésienne de la réforme progressive de la compensation entamée par le gouvernement, ayant pour objectif de reconstituer des marges budgétaires à des fins de réorientation des subventions du blé, du gaz butane et du sucre vers d’autres chantiers, principalement la protection sociale», souligne-t-elle.

La hausse programmée des prix de la bonbonne du gaz butane y est-elle pour quelque chose? «Indubitablement la levée progressive de la subvention du gaz butane y contribue», affirme-t-elle.

À noter que le gouvernement a alloué à la compensation un budget de 16,95 milliards de dirhams cette année, contre 26,58 milliards de dirhams pour l’exercice 2023.

Vu cet important excédent budgétaire réalisé en un trimestre, peut-on s’attendre à un déficit budgétaire en dessous du taux prévu par le gouvernement, qui est de 4% pour cette année?

«Présager une amélioration du déficit budgétaire annuel prévu à travers ces premiers résultats trimestriels est prématuré à mon sens», estime l’économiste, relevant des prévisions «sommairement disparates», dont 4,5% prévus par le HCP.

D’ailleurs, comme nous l’explique l’économiste Nabil Adel, ce n’est pas pertinent d’analyser l’évolution de l’exécution de la LF au cours de l’année pour essayer d’en tirer des conclusions. Il évoque des facteurs qui peuvent biaiser une telle analyse, dont notamment les ajustements comptables ou le décalage dans le temps des dépenses. Il faut attendre la fin de l’année pour pouvoir le faire, préconise-t-il.

Excédent de trésor, un gage de la pérennité des réformes

Est-ce un bon signe d’avoir un excédent du Trésor? Un tel excédent est un signe positif qui offre une plus grande marge de manœuvre aux politiques de l’État, indique Samia Jirari. «Le rétablissement des marges budgétaires par un excédent de trésor est un gage de la pérennité des réformes. Ainsi, ce surplus offre un espace budgétaire de réserves nécessaire pour atténuer les risques budgétaires, qui signifient les écarts négatifs éventuels entre les résultats budgétaires et les projections», souligne-t-elle.

L’excédent de trésor, en fonction de la politique gouvernementale, peut faire l’objet de multiples usages; à l’instar de dépenses d’investissement, de placement à court terme afin de le rentabiliser comme de remboursement de dettes ou autres, explique-t-elle.

Par Lahcen Oudoud
Le 22/04/2024 à 08h16