Un faucon de la junte algérienne: faire la guerre contre le Maroc, c’est aujourd'hui, dans trois ans, ce sera trop tard

Le chef d'état-major de l'armée algérienne, Saïd Chengriha, en compagnie d'officiers algériens, lors d'une réunion en Russie, pays principal fournisseur des armes à l'Algérie.

Le chef d'état-major de l'armée algérienne, Saïd Chengriha, en compagnie d'officiers algériens, lors d'une réunion en Russie, pays principal fournisseur des armes à l'Algérie. . DR

Le journal français «L’Opinion» cite un faucon du régime algérien qui parle des inquiétudes de la junte depuis le rétablissement des relations entre Rabat et Tel-Aviv. Très confiant dans une supposée supériorité militaire de l’armée algérienne, cette source affirme que «faire la guerre, c’est aujourd’hui. Dans trois ans, la donne va changer».

Le 01/12/2021 à 12h06

Un article publié le mardi 30 novembre dans le journal français L’Opinion sous le titre: «L’Algérie est prête à faire la guerre au Maroc, s’il le faut…», cite une source algérienne qu’il qualifie de «faucon». L’auteur de l’article est Jean-Dominique Merchet, que le média français qualifie de spécialiste «des questions militaires et stratégiques depuis un quart de siècle».

«L’Algérie ne veut pas la guerre avec le Maroc, mais elle est prête à la faire», entend-on ainsi «dans certains milieux proches de l’armée algérienne», écrit le journal français.

«S’il faut la faire, c’est aujourd’hui, car nous sommes militairement supérieurs à tous les niveaux et ce ne sera peut-être plus le cas dans quelques années», confie au média français une source qu’il décrit comme un «faucon» du régime. Cette même source admet que l’Algérie est très inquiète de l’évolution récente des relations entre le Maroc et Israël. Ce qui préoccupe la junte, «c’est le soutien d’Israël au Maroc. Cela va changer la donne, dans un délai que l’on estime à trois ans», ajoute la source citée par le journal français.

«Pour l’instant, les Américains disent aux Israéliens de ne pas fournir de systèmes d’armes qui pourraient provoquer un déséquilibre militaire immédiat en faveur du Maroc», croit savoir la source algérienne. «Les armements qui inquiètent le plus les Algériens sont ceux relevant de la guerre électronique et des drones», commente le journal.

La prétendue supériorité de l’armée algérienneL’Opinion en arrive à dresser des scénarios en cas d’une éventuelle confrontation armée entre les deux pays voisins.

Côté algérien, plusieurs scénarios militaires seraient sur la table, alors qu’on semble privilégier une «riposte graduée». L’une des options est une «no fly-zone», une zone d’interdiction aérienne visant les aéronefs marocains – les drones en particulier–, au-dessus de la bande contrôlée par le Polisario. Un appui aérien à ses forces serait également évoqué, écrit le journal français, qui écarte l’option d’une «offensive terrestre de grand style, avec divisions d’infanterie et brigades blindées», mais pour lequel «le risque d’escalade est réel». 

Le médias français dit observer à Alger «une forme d’hubris, de complexe de supériorité qui n’incite pas à la prudence». Et de citer une source algérienne qui affirme que «militairement, nous sommes très supérieurs aux Marocains».

Dans un entretien, publié le 2 juin 2021 dans l’hebdomadaire français Le Point, le président Tebboune avait déjà fanfaronné au sujet de cette supposée supériorité de l’armée algérienne. «Nous riposterons si nous sommes attaqués. Mais je doute que le Maroc s'y essaie, les rapports de force étant ce qu'ils sont», avait affirmé le président algérien. 

D’ailleurs, le journal français L’Opinion semble être bien apprécié par le régime algérien. Abdelmadjid Tebboune a accordé à ce journal l’un de ses premiers entretiens, en tant que président, le 13 juillet 2020.

«L’armée de terre, c’est le défaut de la cuirasse marocaine», croit savoir la source du journal français. Le journaliste de L’Opinion relativise la prétendue supériorité de l’armée algérienne. «Les spécialistes le savent: la comparaison du nombre d’avions, de chars, d’hommes ou de bateaux n’a souvent guère de sens militaire. Il faut regarder dans le détail pour se faire une idée de la valeur comparée de deux armées: quels systèmes électroniques à bord des avions? Quel aguerrissement des troupes? Quelle capacité de commandement ? Quelle stratégie sur le terrain ? Autant de domaines où l’information est rare». 

«Ce que l’on sait, c’est que l’Algérie consacre beaucoup plus d’argent à son armée que le Maroc. Au cours des dix dernières années, Alger a ainsi acheté deux fois plus de matériels (10,5 milliards de dollars) que le Maroc (4,5)», rappelle le journal.

Un Marocain à la tête du fleuron de l’industrie militaire israélienneLes confidences du faucon de l’armée algérienne coïncident avec les révélations du quotidien israélien Haaretz qui a révélé dans son édition du 30 novembre, que le fleuron de l’industrie militaire de l’Etat hébreu, Israel Aerospace Industries (IAI) a vendu au Maroc des drones kamikazes sophistiqués pour un montant de 22 millions de dollars. Le drone kamikaze en question, Harop, transporte quelque 20 kg d’explosifs et peut rester en vol jusqu’à sept heures, avec une autonomie allant jusqu’à 1 000 kilomètres. Il est considéré comme un «game changers» et a montré son efficacité dans la guerre du Haut Karabagh qui a opposé cette république autoproclamée, soutenue par l’Arménie, à l’Azerbaïdjan. L’Arménie, qui dispose pourtant du même type d’armement que l’Algérie, a été défaite, en grande partie, par les drones israéliens et turcs.

A la tête de Israel Aerospace Industries, vient d’être nommé l’ancien ministre travailliste Amir Peretz, né à Bejaâd, au Maroc, parlant couramment le marocain, et qui n’a jamais renoncé à sa nationalité marocaine. La nomination d’Amir Peretz à la tête de IAI va davantage accentuer la paranoïa des chibanis qui tiennent les rênes de l’appareil militaro-politique en Algérie.

Pour les sources algériennes, citées par L’Opinion, ce qui est en jeu entre le Maroc et l’Algérie, c’est le «leadership dans la région». «Nous avons laissé le terrain aux autres et nous devons reprendre notre place en Afrique, avec la mise en place d’une stratégie diplomatique plus agressive», affirment les sources algériennes.

Au même moment où le faucon de la junte bombe le torse dans un média français, l’«indice mondial du coût de la vie», publié chaque année par le très sérieux journal britannique The Economist, vient de mettre en ligne le classement de 173 villes dans le monde. Alger, la capitale de l’Algérie, est classé parmi les dix pires villes dans le monde. Ses infrastructures sont davantage défaillantes que des capitales de pays en guerre comme la Syrie ou le Yémen.

Par Mohammed Boudarham
Le 01/12/2021 à 12h06