Comment le chef de l'armée a opposé une fin de non-recevoir aux Algériens

Pancartes anti-Gaïd Salah brandies lors des manifestations du 26 Avril 2019

Pancartes anti-Gaïd Salah brandies lors des manifestations du 26 Avril 2019 . DR

Le chef d'état-major de l'armée algérienne a opposé mardi une fin de non-recevoir aux revendications des manifestants en Algérie, qui réclament la mise en place d'institutions de transition ad hoc pour gérer l'après Abdelaziz Bouteflika, poussé à la démission le 2 avril.

Le 01/05/2019 à 11h14

La présidentielle prévue le 4 juillet en Algérie -dans les délais prévus par la Constitution-- pour élire un successeur à M. Bouteflika, est la "solution idéale pour sortir de la crise", a affirmé mardi le général Ahmed Gaïd Salah dans un discours.

Les manifestants exigent depuis le 22 février le départ de l'ensemble des figures du "système" au pouvoir en Algérie, en tête desquelles le chef de l'Etat par intérim Abdelkader Bensalah et le Premier ministre Noureddine Bedoui, deux anciens proches de Bouteflika.

Le parti au pouvoir, le Front de libération nationale (FLN), a pour sa part élu mardi un nouveau secrétaire général: le député et homme d'affaires Mohamed Djamiai, 50 ans, remplace Moad Bouchareb, désigné par Bouteflika l'année dernière.

Alors que, comme chaque mardi, depuis le début du mouvement de contestation, des milliers d'étudiants ont défilé dans le centre d'Alger et dans plusieurs villes d'Algérie, Gaïd Salah a appelé à "instaurer un climat de sérénité et d'entente".

Dans un message à l'occasion de la fête du travail, il a exhorté le peuple algérien à chercher des "solutions consensuelles" pour satisfaire "ses revendications légitimes à une vie décente et son aspiration résolue à un changement radical avec le régime, pratiques et symboles", selon l'agence APS.

Mais les contestataires refusent que les structures et personnalités de l'appareil hérité de Bouteflika organisent la présidentielle, alors que ses vingt années de pouvoir ont été marquées, selon eux, par des fraudes électorales.

Ils réclament un processus de transition hors des institutions et délais prévus par la Constitution, gérée par des structures spécialement mises en place et chargées de mener le pays vers une IIe République.

Pilier du régime durant 15 ans, devenu de facto l'homme fort de l'Algérie depuis qu'il a lâché Bouteflika, rendant sa démission inéluctable, le général Gaïd Salah a souligné mardi exclure que l'armée permette une transition hors du cadre constitutionnel.

Il a réitéré "l'attachement profond du commandement de l'armée (...) à la Constitution" et a martelé "la détermination" de l'armée "à ne pas s'écarter de la voie constitutionnelle, quelles que soient les conditions et les circonstances".

Le général Gaïd Salah a également assuré que l'armée veillerait à ce que les enquêtes judiciaires ouvertes sur des dossiers de corruption visant des personnalités liées au régime soient préservées des "pressions ou diktats".

La justice enquêtera "sans exclure aucun dossier et en se gardant de toute mesure arbitraire ou de règlement de comptes", a-t-il précisé.

"Plusieurs dossiers lourds de corruption" concernant "des faits de spoliation des fonds publics avec des chiffres et des montants faramineux" ont été transmis à la justice par "les services de sécurité", a-t-il également indiqué, promettant que "l'opération" anticorruption ne fait que commencer et assurant que l'Algérie sera "assainie définitivement de la corruption et des corrupteurs".

Depuis le départ du pouvoir d'Abdelaziz Bouteflika, le 2 avril, la justice a ouvert une série d'enquêtes pour corruption visant des personnalités. Cinq puissants et richissimes hommes d'affaires, dont quatre proches de Bouteflika et de son frère et conseiller Saïd, ont été placées en détention provisoire.

Le général Gaïd Salah a récemment appelé la justice à "accélérer la cadence" des enquêtes, une demande assimilée à une "injonction" par ses détracteurs.

Le 01/05/2019 à 11h14