France: tout (re)commence pour Emmanuel Macron, réélu président de la République avec 58,55% des voix

Réélu pour un second mandat, Emmanuel Macron lève le poing et tient la main de son épouse, Brigitte Macron, après sa victoire à l'élection présidentielle française, au Champ de Mars à Paris, le 24 avril 2022.

Réélu pour un second mandat, Emmanuel Macron lève le poing et tient la main de son épouse, Brigitte Macron, après sa victoire à l'élection présidentielle française, au Champ de Mars à Paris, le 24 avril 2022. . Ludovic MARIN / AFP

Le 25/04/2022 à 11h04

VidéoReconduit à l'Elysée lors d'un scrutin historique avec 58,55% des voix, Emmanuel Macron est confronté dès ce lundi 25 avril 2022 à une France au moins aussi fracturée politiquement que lors de sa première élection en 2017.

Historique, l'exploit qui voit le sortant être le premier chef d'Etat réélu hors cohabitation depuis l'instauration du vote au suffrage universel direct en 1962.

Historique, au moins autant, le score de Marine Le Pen (41,45%), qui gagne près de huit points et fait franchir pour la première fois à l’extrême-droite la barre de 40% des suffrages.

La campagne électorale, marquée par le Covid et par la guerre en Ukraine, avait montré une forte lassitude démocratique. Celle-ci se retrouve dans le niveau de l'abstention dimanche, à 28%, soit davantage qu'il y a cinq ans (25,44%), et un record depuis la présidentielle de 1969 (31%).

«Il y a cinq ans, il y avait 10 millions de voix d'écart entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron. Aujourd'hui il n'y en a plus que 5,5 millions», a résumé Mathieu Gallard, directeur d'études à Ipsos sur franceinfo. «Plus d'un tiers du corps électoral a décidé de ne pas faire de choix.»

Dans ce contexte, la victoire sans appel du sortant de 44 ans reste «un exploit politique d'Emmanuel Macron assez personnel», a jugé hier soir, dimanche 24 avril 2022 sur LCI le politologue Jérôme Jaffré, commentant «un score très net qui donne du jeu politique pour les semaines à venir, à condition que le président sache tirer toutes les leçons d'un tel scrutin».

«Pas la continuité du quinquennat qui s’achève»Lors de son discours de victoire au Champ de Mars, sur fond de Tour Eiffel, Emmanuel Macron a promis une «méthode refondée» pour gouverner la France, assurant que «nul se sera laissé au bord du chemin».

«Cette ère nouvelle ne sera pas la continuité du quinquennat qui s’achève», a assuré le président réélu, appelant à être «bienveillants et respectueux» dans un pays «pétri de tant de doutes, tant de divisions», avant de partir passer la nuit dans la résidence présidentielle de la Lanterne à Versailles.

Alors qu'en guise d'état de grâce, c'est un nouveau combat politique qui l'attend avec les législatives, Emmanuel Macron a aussi pris soin de s'adresser à ceux qui l'ont choisi par défaut, et même aux électeurs de sa rivale.

«Je sais que nombre de nos compatriotes ont voté ce jour pour moi non pour soutenir les idées que je porte mais pour faire barrage à celles de l’extrême-droite», a-t-il reconnu.

«Et je veux ici les remercier et leur dire que j'ai conscience que ce vote m'oblige pour les années à venir».

«Emmanuel Macron est conscient de devoir apaiser», a insisté sur RTL Elisabeth Borne, dont le nom circule pour remplacer Jean Castex à Matignon, alors que plusieurs cadres de la macronie misent sur une femme pour occuper le poste de Premier ministre.

La carte des résultats du scrutin de dimanche dessine deux France. L'une a voté Emmanuel Macron: les grandes métropoles, les classes moyennes supérieures et les retraités.

Et l'autre, celle qui a choisi Marine Le Pen, plus populaire, qui se sent souvent exclue, particulièrement dans le nord-est et le pourtour méditerranéen.

Avec plus de 60% de voix, Marine Le Pen a par ailleurs réalisé des scores historiques en Outre-mer, notamment aux Antilles, en Guyane, à la Réunion et à

Mayotte (59,10%) sur fond de défiance envers les autorités ou de contestation antipass sanitaire.

Sept semaines exactement vont s'écouler jusqu'au premier tour des législatives, le 12 juin, à nouveau qualifié dimanche soir de «troisième tour» par le dirigeant de LFI Jean-Luc Mélenchon, fort de ses près de 22% le 10 avril.

«Un contre-pouvoir fort»Marine Le Pen a choisi hier, dimanche, de voir dans son score inédit «une éclatante victoire» et la manifestation du «souhait» des Français d’«un contre-pouvoir fort à Emmanuel Macron», avant de lancer «la grande bataille électorale des législatives».

L'enjeu, pour le Rassemblement national, sera de dépasser le statut d'un parti contestataire qui, comme l'avance le politologue Jean-Yves Camus, «recueille un pourcentage considérable de voix, infuse dans la société mais n'arrivera jamais au pouvoir parce qu'il n'a pas d’alliés».

Le RN, dont Marine Le Pen ne devrait pas redevenir présidente selon son porte-parole Sébastien Chenu, compte six députés seulement dans la législature qui s'achève.

Eric Zemmour, lui, appelle «le bloc national» à s'unir mais ne peut s'empêcher de relever, cinglant, que c'est «la huitième fois que la défaite frappe le nom de Le Pen».

A l'étranger, c'est un soulagement pour les partenaires de Paris: la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen s'est réjouie de «continuer l'excellente coopération» avec la France...

... Et le chancelier allemand Olaf Scholz a salué «un signal fort en faveur de l’Europe».

«Vers une Europe forte et unie!», a déclaré de son côté le président ukrainien Volodymyr Zelensky, qui a félicité Emmanuel Macron, tandis que le président américain Joe Biden s'est dit «impatient de poursuivre» la coopération avec Paris pour «défendre la démocratie».

Le 25/04/2022 à 11h04