L’appel du pied de Ramtane Lamamra, superbement ignoré, à son homologue égyptien

Le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, lors d'une conférence de presse à Alger, le 24 août 2021.

Le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, lors d'une conférence de presse à Alger, le 24 août 2021. . AFP

Pour tenter de dissiper la sourde crise avec l’Egypte, le chef de la diplomatie algérienne, Ramtane Lamamra, a affirmé avoir téléphoné à son homologue égyptien, Sameh Choukry. Les médias algériens ont interprété cet appel comme la preuve de l’inexistence d’un différend entre Tebboune et Al-Sissi. Pourtant, du côté du Caire, c’est silence radio.

Le 02/03/2022 à 16h16

Le ministre algérien des Affaires étrangères pensait pourtant faire ainsi diversion au mécontentement manifesté par le président égyptien Abdel Fattah Al-Sissi qui a annulé, au Koweït, une rencontre avec Abdelmadjid Tebboune. La tentative du chef de la diplomatie algérienne n’a pas eu les résultats escomptés par la propagande de la junte algérienne.

Dimanche 27 février, Ramtane Lamamra a annoncé sur son compte Twitter avoir eu un entretien téléphonique avec son homologue égyptien, Sameh Choukry.

Ramtane Lamamra affirme avoir discuté des «derniers développements sur la scène internationale en vue de se consulter et coordonner une prise de position arabe commune, conformément aux directives des présidents d’Al-Sissi et Abdelmadjid Tebboune…».

Ce tweet du chef de la diplomatie algérienne a été abondamment commenté par les médias algériens, prompts à y déceler une preuve de l’inexistence d’une crise sourde entre Le Caire et Alger. Non, le président Al-Sissi n’a pas annulé, le 23 février dernier, un sommet tripartite, qui était prévu entre lui, le président algérien et l’émir du Koweït.

Ce sont là de pures affabulations et aucun nuage n’assombrit les relations entre le Caire et Alger. La preuve: l’échange téléphonique du dimanche 27 février entre Lamamra et son homologue égyptien. C'est en tout cas là le message relayé par les médias algériens.

Mais si on regarde du côté du Caire la suite qui a été donnée à l’appel téléphonique de Lamamra, ce n'est qu'un silence lourd de sens. 

Ni Sameh Choukry, ni le ministère égyptien des Affaires étrangères, ni les médias égyptiens n’ont fait la moindre référence à l’appel du pied de Lamamra.

Pourtant, un média égyptien du lundi 28 février indique bien que «Sameh Choukry a reçu une communication téléphonique de la part du nouveau ministre des Affaires étrangères de la république du Guatemala pour discuter du renforcement des relations entre les deux pays».

Un entretien téléphonique du chef de la diplomatie égyptienne avec son homologue du Guatemala a en effet été médiatisé, et pas du tout l’appel du pied de Lamamra. Comment interpréter cela? Sinon comme une preuve supplémentaire de l’irritation du Caire à l’égard du régime d’Alger.

Au lieu de jouer les pompiers impuissants avec Le Caire, Ramtane Lamamra ferait mieux d’expliquer aux généraux séniles qui tiennent les rênes du pouvoir que l’abandon des étudiants algériens en Ukraine peut relancer le Hirak. L’Algérie est l’un des rares pays au monde à n’avoir pas, jusqu’à ce mercredi 2 mars, demandé aux étudiants algériens de quitter l’Ukraine, de peur de mécontenter l’allié russe. La mort d’un étudiant algérien dans la ville de Kharkiv a provoqué un grand émoi dans le pays. Le régime algérien a réagi en fournissant des numéros verts en Ukraine, mais aucun avion algérien n’a été mobilisé pour des opérations d’évacuation. Pire encore, le régime algérien n’a pas encore formellement demandé à ses ressortissants, qui sont en danger de mort, de quitter le territoire ukrainien.

Par Mohammed Ould Boah
Le 02/03/2022 à 16h16