Portrait: Boris Johnson, l'aventurier du Brexit

Le Premier ministre britannique Boris Johnson, au cours d'une conférence de presse au 10, Downing street, le 24 décembre 2020. 

Le Premier ministre britannique Boris Johnson, au cours d'une conférence de presse au 10, Downing street, le 24 décembre 2020.  . Paul GROVER / POOL / AFP

Il a réussi son pari. Après avoir choisi le camp du Brexit lors du référendum de juin 2016, Boris Johnson s'est hissé au poste de Premier ministre et a affranchi le Royaume-Uni de l'Union européenne. Reste à prouver que ses promesses d'un avenir radieux n'étaient pas vaines.

Le 01/01/2021 à 16h59

Le 1er janvier marque l'entrée du pays dans le nouveau monde: "Le destin de ce grand pays est à présent fermement entre nos mains", a lancé avec des accents qui se veulent churchilliens le chef du gouvernement. Son ambition d'entrer dans l'histoire, servie par un sens politique certain, est en tous cas déjà satisfaite.

Mais Boris Johnson aura aussi montré les aspects plus contestables de sa personnalité, se voyant accusé d'imprévoyance et de légèreté dans sa gestion de la pandémie du nouveau coronavirus. Il a été la première victime de sa désinvolture, tombant gravement malade du Covid-19 en avril après s'être vanté de serrer les mains dans les hôpitaux. Mais il a aussi placé le Royaume-Uni dans le peloton de tête des pays européens les plus endeuillés.

Tout a commencé en février 2016: Boris Johnson est encore maire de Londres pour quelques mois, et ami du Premier ministre de l'époque, David Cameron, qui tente de mettre fin aux querelles de son parti conservateur sur l'appartenance à l'UE en organisant un référendum sur le sujet, convaincu de pouvoir battre les eurosceptiques.

La classe politique attend avec impatience de voir quelle position prendra le sémillant "BoJo". Déjà, il cultive soigneusement son personnage d'excentrique, ébouriffant délibérément ses cheveux, multipliant plaisanteries et gaffes, mais sachant aussi convaincre par sa verve et son charisme.

Tout le personnage est dans ce moment: il prépare deux éditoriaux pour son journal fétiche, le très conservateur Daily Telegraph, l'un soutenant le maintien dans l'UE prôné par David Cameron, l'autre plaidant pour la rupture et la rébellion. C'est ce dernier qui est publié.

"Il pensait qu'il allait perdre et c'est pour cela qu'il a fait ce choix", a affirmé David Cameron. "Il ne voulait pas renoncer à l'occasion d'être du côté romantique, patriotique et nationaliste du Brexit".

D'où tire-t-il ses convictions anti-UE? De ses années d'enfance passées à Bruxelles, où a travaillé son père Stanley, fonctionnaire européen, dans les années 70? "La seule chose à laquelle croit Boris Johnson, c'est Boris Johnson", estime Pascal Lamy, l'ancien patron de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), qui connaissait la famille Johnson.

Alexander Boris de Pfeffel Johnson est né à New York le 19 juin 1964 dans une famille cosmopolite et férue de politique. Depuis tout petit, il veut être le "roi du monde", a confié sa soeur Rachel à son biographe, Andrew Gimson.

Il suit le parcours fléché de l'élite britannique: Eton College, puis l'université d'Oxford, où il étudie les lettres classiques. Il se lance ensuite dans le journalisme au Times, qui le licencie un an plus tard pour une citation inventée. Le Daily Telegraph le repêche et l'envoie à Bruxelles, de 1989 à 1994. A coup d'outrances et d'approximations, il tourne les institutions européennes en ridicule.

Elu député en 2001, Boris Johnson ravit la mairie de Londres aux travaillistes en 2008. Il y reste huit ans et en profite pour se tailler une stature internationale, aidé par les jeux Olympiques.

Pendant la campagne du référendum, truffée d'approximations, il promet au Royaume-Uni, débarrassé des "entraves" de l'UE, un avenir florissant, où il contrôlera son immigration et récupèrera les millions versés à l'UE pour les consacrer à son système de santé.

Le Brexit voté, Downing Street semble lui tendre les bras, mais il renonce, trahi par son ami Michael Gove qui se met sur les rangs avant lui en le proclamant inapte. Il récolte les Affaires étrangères dans le gouvernement formé par Theresa May. Il s'illustre par plusieurs gaffes et lance un très remarqué "Fuck business", lors d'une réunion de diplomates, en réponse aux angoisses de la City face à la perspective d'un Brexit sans accord.

Profitant de l'incapacité de Theresa May à faire adopter par les députés son accord de sortie de l'UE, il prend sa place en juillet 2019 et convoque des législatives anticipées. Sous le simplissime slogan "Réalisons le Brexit", il décroche dans un pays lassé par les divisions et les atermoiements la plus large majorité conservatrice depuis Margaret Thatcher, dans les années 1980.

Sa vie sentimentale est elle aussi haute en couleur: après deux divorces et 5 enfants dont un illégitime, il vit avec Carrie Symonds, une spécialiste en communication de 24 ans sa cadette, dont il a eu un fils en avril.

Le 01/01/2021 à 16h59