USA. Avec Trump, le Ku Klux Klan rêve d'une improbable renaissance

Le Ku Klux Klan, une organisation raciste vieille de 150 ans.

Le Ku Klux Klan, une organisation raciste vieille de 150 ans. . DR

Dans le sillage de la victoire de Donald Trump et la poussée du mouvement extrémiste "alt-right", une organisation raciste vieille de 150 ans se verrait bien pousser des ailes. Le Ku Klux Klan (KKK) pourrait organiser samedi 3 décembre, son premier rassemblement depuis l'élection.

Le 01/12/2016 à 19h22

"Le nombre de nos membres augmente de jour en jour, (...) on a reçu 1.000 demandes d'information depuis l'élection", affirme Gary Munker, qui se présente comme un porte-parole de ce mouvement qui prône depuis 1866 une Amérique blanche et chrétienne, devenu synonyme de lynchages et d'assassinats.

Comme l'ex-leader du KKK, David Duke, qui a soutenu Donald Trump pendant la campagne -un soutien avec lequel Trump a pris ses distances-, Gary Munker reconnaît avoir été séduit par le discours du magnat de l'immobilier, notamment par ses attaques contre les immigrés.

Dissimulé sous sa cagoule et sa tunique blanches, emblématiques de ce mouvement né dans le Sud des Etats-Unis, Gary Munker assure que la branche du KKK à laquelle il appartient, les Loyal White Knights (les "loyaux chevaliers blancs"), compte quelque 700 personnes à Long Island où il réside, et 1.200 dans l'ensemble de l'Etat de New York.

"Les gens commencent à se réveiller, à prendre conscience de ce qui se passe", affirme ce père de famille de 36 ans. Gary Munker dit avoir rejoint il y a cinq ans les Loyal White Knights -le premier de la quarantaine de groupuscules qui forment le KKK- après avoir vu son quartier tranquille et "essentiellement blanc" changer du tout au tout avec l'arrivée de HLM et d'une population beaucoup plus bigarrée.

Gary Munker, qui reste flou sur sa profession de peur de perdre son emploi, fait partie des membres actifs du KKK. Originaire d'une zone rurale de Long Island, il distribue régulièrement dans les villes alentours, des tracts appelant à rejoindre l'organisation.

Son dernier tractage remonte au 17 novembre, sur un parking de la petite ville de Patchogue, qui figure sur la carte du racisme américain depuis l'assassinat en 2008 d'un immigré équatorien par des lycéens. La découverte des tracts a poussé, le dimanche suivant, quelque 200 personnes à manifester contre le racisme.

Loin des assassinats et des croix enflammées qui ont fait la réputation du Ku Klux Klan dans le passé, la distribution de tracts est aujourd'hui "la première activité" du KKK et avec 14 Etats concernés, celle qui lui "assure une visibilité nationale", explique Carla Hill, chercheuse au Centre sur l'extrémisme de l'Anti-defamation league, une grande association juive de lutte contre l'intolérance.

Mais les derniers chiffres disponibles, dit-elle, ne suggèrent aucune résurgence du mouvement, quoi qu'en dise Gary Munker: 74 distributions de tracts ont été recensées depuis début 2016, contre 86 en 2015.

Les Loyal White Knights ont annoncé pour samedi 3 décembre, un rassemblement en Caroline du Nord, sans précision d'heure ou de lieu pour l'instant.

Mais même si le rendez-vous se concrétise, il ne devrait pas attirer les foules, au vu des dernières manifestations du KKK qui n'ont guère dépassé les quelques dizaines de participants, selon Carla Hill.

Pour Mark Potok, spécialiste du Southern Poverty Law Center, un observatoire de l'extrémisme, si les "nationalistes blancs" ont indéniablement progressé depuis l'arrivée à la Maison Blanche de Barack Obama, le Ku Klux Klan, avec 6.000 membres maximum aujourd'hui contre plus de 40.000 dans les années 60 et plusieurs millions dans les années 20, n'a aucune chance de rebondir.

L'élection de Donald Trump a certes, pour ces hérauts de la race blanche, "ouvert un espace politique qui leur permet de présenter leurs idées comme légitimes", alors qu'"ils n'étaient plus pris au sérieux depuis 50 ans". Ainsi que l'a montré la conférence aux accents néo-nazis qui s'est tenue à Washington le 20 novembre dernier autour du leader d'extrême droite Richard Spencer.

Mais ces extrémistes "intellectuels" qui répondent à la nouvelle appellation "alt-right" "ont du mépris pour le Klan", explique Mark Potok. Car les membres du KKK, à l'histoire émaillée de violences, "ne peuvent pas, comme Richard Spencer, prétendre vouloir juste défendre les droits des Blancs sans détester personne".

Gary Munker, adepte de chasse et de pêche, reconnaît d'ailleurs se méfier du message plus lisse de l'alt-right: "Nous, nous sommes chrétiens, eux prennent tout le monde. Rien que ça me fait douter de leur intégrité", dit-il.

Le 01/12/2016 à 19h22