COP22: pourquoi Alger dépêche une délégation de haut niveau à Marrakech

Abdelkader Bensalah, deuxième personnage de l'Etat algérien après le président Abdelaziz Bouteflika, est arrivé hier lundi à Marrakech, en compagnie du ministre des AE Ramtane Lamamra.

Abdelkader Bensalah, deuxième personnage de l'Etat algérien après le président Abdelaziz Bouteflika, est arrivé hier lundi à Marrakech, en compagnie du ministre des AE Ramtane Lamamra. . dr

Une fois n’est pas coutume! Ce sont deux hauts responsables de l’Etat algérien qui ont fait le déplacement au Maroc pour prendre part à la Conférence internationale sur le climat (COP22). Les raisons pour lesquelles Alger a tenu à se faire représenter à un niveau élevé.

Le 15/11/2016 à 13h04

De hauts responsables algériens prennent part à la réunion de haut niveau qui se tiendra ce mardi 15 novembre à Marrakech en marge de la Conférence internationale sur le climat (COP22), sous la présidence du roi Mohammed VI et du SG sortant de l’ONU, Ban Ki-moon.

Le président du Conseil de la Nation, Abdelkader Bensalah, deuxième personnage de l’Etat après le président Abdelaziz Bouteflika, conduit en effet une importante délégation à la grand-messe de Marrakech, constituée, entre autres, du ministre algérien des Affaires étrangères et de la coopération internationale, Ramtane Lamamra.

Bien sûr, Alger ne pouvait se permettre de s’absenter d'un événement aussi crucial que la COP22. L’Algérie n'a pas encore ratifié l’Accord de Paris sur le climat mais entend le faire "très symboliquement" à Marrakech. Mieux encore, elle entend marquer sa participation en dépêchant à Marrakech une représentation de très haut niveau. Ramtane Lamamra, après une longue série de boycotts de la destination Maroc depuis sa nomination en 2013 en tant que ministre des Affaires étrangères, a fait cette fois le déplacement au Maroc. La présence du chef de la diplomatie algérienne, réputé être farouchement hostile à l'intégrité territoriale du Maroc, n'est pas fortuite.

Elle participe d'une volonté politique de rapprochement algérien du Maroc, exprimée, vendredi dernier, par le Premier ministre algérien Abdelmalek Sellal. Dans une interview accordée au quotidien londonien Ashark al-Awsat, à la veille de son déplacement à Ryad, en Arabie Saoudite, aujourd'hui même, le chef de l'Exécutif algérien avait clairement exprimé la disposition de son pays à "régler tous les différends avec Rabat", y compris et, surtout, celui qui continue d'"empoisonner" les relations algéro-marocaines, le dossier saharien.

A ce sujet, Abdelmalek Sellal avait indiqué que le dossier saharien relevait du ressort des Nations unies. Cette indication n'est certes pas une nouveauté, Alger ayant toujours joué un double jeu sur ce conflit affirmant d'une part, que c'était "une question de principe" et, dans la pratique, complotant contre la première cause nationale. Mais relevée dans la bouche du Premier ministre algérien, cette déclaration ne peut en aucun cas laisser indifférent. Elle rejoint la position du Maroc qui a toujours invité Alger à cesser son "ingérence" dans une affaire interne à un pays voisin et dont le traitement se fait dans le cadre d'un processus de négociations parrainé par l'organisation des Nations unies. 

S'il est difficile de croire à un changement de cap diplomatique à Alger à l'égard du conflit saharien, force est de constater qu'il y a un infléchissement dicté par des considérations d'ordre géostratégiques. Alger sait que tout rapprochement avec l'Arabie Saoudite passe nécessairement par le Maroc. Une source diplomatique assure à Le360 que Ryad déploie des efforts diplomatiques intenses pour rapprocher les positions de Rabat et d'Alger.

En outre, Alger, confrontée à une crise financière et économique sans précédent, ne peut indéfiniment se cramponner à une position qui s'est révélée, au fil de quarante ans de conflit autour du Sahara, être infructueuse et contre-productive. Elle sait aussi que le statu quo sur ce dossier ne sert aucunement ses intérêts, politiquement (isolement sur la scène internationale), économiquement (le coût du non-Maghreb vaut une perte de 10 milliards de dollars à la région)...

A quoi il faut ajouter la menace terroriste pesant sur la région et l'Algérie en particulier, cernée à sa frontière est par la succursale libyenne de Daech et, à sa frontière sud, par Aqmi de Abdelmalek Droukdel et de mokhtar Belmokhtar, pour ne pas parler de Boko Haram (Nigeria) ou du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (MUJAO)...

Le règlement de toutes ces problématiques passe par une coopération tous azimuths avec les autorités marocaines. Un rapprochement algéro-marocain est aujourd'hui plus que jamais nécessaire. Espérons que le déplacement à Marrakech de la délégation algérienne de haut niveau constituera ce premier pas dans un processus de rapprochement inévitable!

Par Ziad Alami
Le 15/11/2016 à 13h04