El Guerguerat: à quoi jouent certains commerçants marocains originaires des provinces du sud?

Panneau annonçant le poste-frontière d'El Guergarat.

Panneau annonçant le poste-frontière d'El Guergarat. . DR

Le 31/10/2019 à 12h17

VidéoAprès avoir perturbé ces derniers jours le trafic commercial au niveau du passage frontalier d’El Guergarat, certains commerçants marocains font à nouveau monter les enchères. Des sociétés espagnoles entrent en ligne pour exiger de l’UE, du Maroc et de la Mauritanie de réagir.

Les commerçants mauritaniens, marocains, subsahariens et même européens viennent d’essuyer d’importantes pertes, estimées à plusieurs millions de dollars, suite au récent blocage de la route reliant le Maroc à la Mauritanie. En effet certains commerçants marocains, originaires des provinces du sud, mécontents d’avoir été rappelés à l’ordre pour violation des règles de transport des marchandises par camion, ont choisi la zone tampon située entre la Mauritanie et le Maroc pour procéder au blocage du trafic commercial, surtout durant la période allant du 15 et 25 octobre courant.

Ces commerçants ont en effet pris la mauvaise habitude, pour faire entrer au Maroc des marchandises à partir de la Mauritanie, d’utiliser des camions dont la longueur et la hauteur ont été respectivement allongées d’un surplus de 3 m en vue d’augmenter leur volume de cargaison, sachant que c’est la charge utile inscrite par le constructeur automobile sur le véhicule en question qui sert de référence à la douane pour fixer la taxe afférente.

Face à cette «triche», la douane marocaine a alors exigé soit l’usage de camions conformes aux normes, soit le paiement d’une amende pour le surplus du volume de marchandises (surcharge), ce qui n’a pas été du goût des commerçants en infraction. Pourtant, ces commerçants sont déjà avantagés par rapport à leurs concurrents, puisqu’ils disposent d’une réduction de droits de douane atteignant parfois les 50% pour les produits importés, mais destinés exclusivement aux provinces du sud. Ces avantages préférentiels leur ont permis d’ailleurs d’avoir le monopole sur nombre de produits d’importation transitant par le passage d’El Guerguerat.

Malgré tous ces avantages et l’écoute des autorités marocaines qui les ont reçus lors d’une réunion tenue la semaine dernière à Dakhla, ces commerçants menacent à nouveau de retourner vers le no man’s land de «Kandahar», pour y ériger des barrages et bloquer le trafic commercial. Cependant, ces protestataires semblent oublier que le passage frontalier n’est pas qu’une simple voie de trafic commercial entre le Maroc, la Mauritanie et l’Afrique, mais qu’il est devenu un axe euro-africain stratégique.

Ils ne sont d’ailleurs pas sans savoir que leur récente obstruction du passage d’El Guerguerat a entraîné l’avarie d’importantes quantités de marchandises, surtout celles exigeant des moyens frigorifiques importants comme le poisson, les fruits et légumes, causant ainsi des pertes qui se chiffrent en millions de dollars à de nombreux commerçants de multiples nationalités, dont des Européens.

Ce qui explique que de nombreuses sociétés espagnoles, spécialisées dans le transport de poisson par camions-frigos de Nouadhibou, en Mauritanie, vers l’Espagne, en passant par le Maroc, viennent de monter au créneau, rapportent les médias mauritaniens et la presse ibérique.

Ces sociétés exigent de Madrid de trouver rapidement une solution, via l’Union européenne, avec les autorités marocaines et mauritaniennes en vue d’assurer une fluidité permanente du trafic commercial à travers le passage d’El Guerguerat. En d’autres termes, pour les Espagnols et les autres usagers, la zone tampon à la frontière maroco-mauritanienne est un non-sens qu’il va falloir gommer sans plus tarder.

Face à cette nouvelle implication européenne, dont la portée est très significative, le Polisario, fermement sommé par l’ONU de ne plus s’aventurer dans la zone d’El Guerguerat, tente aujourd’hui de surfer sur le mécontentement des commerçants marocains en faisant croire que ces derniers agissent dans le cadre de son «agenda».

Par Mohammed Ould Boah
Le 31/10/2019 à 12h17