Légiférer en temps de pandémie: voici comment le Maroc gère l'exception

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Revue de presseKiosque360. Le Maroc vient de procéder à la mise à niveau de son cadre législatif pour faire face à une situation d’urgence. Des mesures à caractère sécuritaire, socioéconomique et légal sont prévues dans le décret-loi entré en vigueur mardi dernier.

Le 27/03/2020 à 18h29

Face à une situation exceptionnelle, tout ce que fait le Maroc, il tient à bien le faire. Bien qu’ayant toute la latitude d’agir par voie réglementaire, les autorités publiques ont insisté pour inscrire leur action dans un cadre législatif bien défini. Il aura donc fallu doter le pays d’une législation relative à l’état d’urgence sanitaire. Un décret-loi a donc été élaboré, adopté en conseil de gouvernement et déposé au Parlement qui l’a validé dans les conditions prévues dans l’article 81 de la Constitution, avant de le publier au B.O., ultime étape pour son entrée en vigueur. Tout ce processus n’a pris que trois jours, écrit l’hebdomadaire La Vie éco dans son édition du 27 mars.

Ce texte, désormais entré en vigueur, offre un cadre juridique aux autorités publiques en vue de prendre les dispositions appropriées et pour décréter l’état d’urgence sur tout le territoire national, note l’hebdomadaire. Bien sûr, le Maroc n’a pas attendu aujourd’hui pour se doter d’un cadre légal lui permettant de faire face à des situations d’urgence sanitaires ou des catastrophes naturelles.

En effet, relève l’hebdomadaire, il existe depuis 1967 un décret royal (n° 554-65) portant loi «rendant obligatoire la déclaration de certaines maladies et prescrivant des mesures prophylactiques propres à enrayer ces maladies». Mais il ne parle que de l’hospitalisation forcée des personnes infectées pouvant présenter un danger pour la santé publique. Point de mesures précises de confinement de personnes saines ou potentiellement porteuses de maladie.

En outre, la situation de pandémie actuelle est certes exceptionnelle, mais en matière de crises et de catastrophes naturelles, le Maroc n’est pas en terrain inconnu. Ainsi, le processus de planification de secours a commencé dès 1958 avec la mise en place du plan de secours en cas d’incendie dans les bidonvilles (SECBI). Quelques années plus tard, on a vu la mise en place de l’organisation des secours qui a fait l’objet d’un premier plan ORSEC, élaboré en 1966. Le plan ORSEC a fait l’objet d’une refonte en 1982.

Pour revenir au décret-loi n° 2-20-292 sur les dispositions relatives à l’état d’urgence sanitaire, entre en vigueur mardi dernier, après avoir abordé les mesures sécuritaires prévues, l’hebdomadaire s’est particulièrement intéressé aux dispositions contenues dans deux articles, l’article 5 et l’article 6. Il faut relever en ce sens, écrit La Vie Eco, que le décret-loi comporte aussi, et c’est l’objet de l’article 6, des mesures ayant un impact certain au niveau économique, social et même légal.

L’article en question prévoit, en effet, la suspension de tous les délais «légaux et réglementaires». Cette disposition implique que ces délais s’arrêteront de courir durant l’état d’urgence, pour reprendre le lendemain de sa levée. Cette mesure couvre, entre autres, les délais de voies de recours en justice (pouvoir en appel ou en cassation), de prescription, d’extinction ou de reconduction de contrats. Selon les juristes, tout y passe, le code du travail avec ses nombreuses ramifications, le code des assurances, le code de commerce, les codes de procédure civile et pénale, les délais fixés par la loi relative à la protection des consommateurs, les délais exigés par certains organismes, les délais relatifs aux impôts...

L’article 5 attire également l’attention des observateurs, souligne l’hebdomadaire. Ses dispositions permettent au gouvernement «de prendre des mesures à caractère social pour protéger les personnes qui souffriront des retombées de cette pandémie», observe Omar Cherkaoui cité par La Vie éco. Le texte de loi prévoit des mesures préventives que le gouvernement est appelé à mettre en place d’urgence et des sanctions pour ceux qui refusent de les observer. «La logique voudrait qu’il y ait un équilibre entre les obligations de chaque citoyen et ses droits. C’est pour cela que le gouvernement est appelé à mettre en place, sans plus tarder, des mesures sociales» explique-t-il. Les mesures en question ne devraient pas tarder à être mises en place, relève l’hebdomadaire.

Les fonds sont là grâce à la générosité exemplaire des Marocains, personnes physiques et morales. Quant à la manière de faire parvenir les aides sociales aux personnes ciblées, les nouvelles technologies seraient certainement d’un grand apport. Le Maroc est d’ailleurs bien avancé sur ce chantier. C’est donc le moment de mettre à profit toutes les potentialités dont il dispose en la matière. Décidément, conclut l’hebdomadaire, cette situation, exceptionnelle pourrait se révéler une «fenêtre d’opportunités». Le Maroc en sortira définitivement changé.

Par Amyne Asmlal
Le 27/03/2020 à 18h29