Quand l’Algérie et le Polisario tentent d’envahir le nord de la Mauritanie

Des soldats de l'armée mauritanienne.

Des soldats de l'armée mauritanienne. . DR

En cette période de confinement interne et de fermeture des frontières internationales, l’Algérie vient de pousser plus d’un millier de Sahraouis à quitter les camps de Lahmada pour la zone tampon. La Mauritanie a senti un coup fourré et pris les devants pour éviter une invasion de son territoire.

Le 30/04/2020 à 17h34

Alors que le patron du Polisario, Brahim Ghali, vient juste d’appeler les habitants des camps sahraouis de Lahmada à se barricader contre le coronavirus, à éviter tout déplacement dans ou entre ces camps, et même à s’éviter les uns les autres, voilà que plus d’un millier de ces Sahraouis sont autorisés à se déplacer vers la zone tampon.

Tout a commencé la semaine dernière par un communiqué du pseudo-ministère de l’Habitat du Polisario. Ce dernier y affirme qu’il «a été décidé d’autoriser certains Sahraouis à voyager» vers la zone tampon. Mais ce sont les conditions imposées à ces déplacements qui interpellent: chaque voyageur ne doit transporter que le strict minimum en carburant (100 litres maximum) et en produits alimentaires, dont certains sont nommément interdits par le communiqué du Polisario.

Ces mesures surprenantes, en ces temps de confinement planétaire, ont immédiatement mis en alerte les sites d’informations régionales du nord de la Mauritanie, par ailleurs bien au fait de tout ce qui passe dans les camps de Lahmada. Ils ont ainsi mis en garde contre ce qui pourrait être assimilé à une invasion de la Mauritanie par ces Sahraouis lâchés par le Polisario. En effet, selon l’un de ces sites, plus de 1.500 voitures ont été autorisées à rejoindre la zone tampon, étant précisé que «96 % des propriétaires de ces voitures planifient d’entrer illégalement dans l’une des régions du nord de la Mauritanie: Tiris Zemmour, Adrar et Dakhlet Nouadhibou».

Il faut rappeler que ces dernières semaines plusieurs tentatives d’infiltration de Sahraouis en Mauritanie ont été mises en échec par les forces de sécurité mauritaniennes, qui reconduisent systématiquement les contrevenants non pas vers la zone tampon, mais en les faisant entrer en Algérie par la frontière entre les deux pays. Un message clair des autorités mauritaniennes à leurs homologues algériennes pour leur signifier qu’elles ont la responsabilité de ces Sahraouis qui viennent directement, zone tampon ou pas, de la région de Tindouf pour s’infiltrer en Mauritanie.

Reste maintenant à se poser des questions sur les raisons d’une telle «autorisation massive» de sortie accordée à quelque 1.500 voitures particulières d’un seul coup et en cette période spéciale de restrictions des mouvements des personnes et des biens.

Y a-t-il dans les camps de Lahmada un trop-plein de colère, de contaminations au Covid-19, ou de raréfaction de l’aide internationale... Problèmes face auxquels le Polisario et l’Algérie se trouveraient désarmés? En tout cas, au moment où le Polisario vient de lancer un appel pressant aux ONG européennes en vue d’envoyer une aide alimentaire d’urgence aux camps sahraouis en Algérie, menacés d’une famine imminente selon lui, on apprend que la bande de Brahim Ghali vient de mettre de côté quelque 30 tonnes de produits alimentaires divers. Plus exactement, cette cargaison, selon des sites pourtant proches du Polisario, a été remise au prétendu ministère du Commerce, qui n’est rien d’autre que le «commerçant» chargé du business des dirigeants du Polisario par le biais du détournement et de la vente des produits de l’aide internationale fournie gratuitement aux habitants des camps sahraouis en Algérie.

Une chose est sûre. En prétendant aller massivement vers une zone désertique, sans provisions suffisantes, ni eau, ni électricité, ni gîte, ces Sahraouis ont bel et bien été envoyés pour tenter de forcer le passage des frontières mauritaniennes, bien cadenassées depuis la mi-mars. Une fermeture hermétique qui semble avoir étouffé l’économie des camps, dont les habitants ont par ailleurs interdiction d’entrer dans la ville algérienne de Tindouf toute proche, en raison du Covid-19. Il faut donc s’attendre, dans les prochains jours, à de probables violentes frictions entre ces Sahraouis et les forces de sécurité mauritaniennes qui ne leur feront pas de cadeau. En effet, alors que de nombreux de citoyens mauritaniens sont aujourd’hui bloqués aux frontières avec le Sénégal et le Maroc, et interdits d’entrée dans leur pays à cause des mesures draconiennes de lutte contre la propagation du coronavirus, on voit mal comment des étrangers venus d’Algérie pourraient faire exception à cette règle de fermeté. 

Au reste, il est probable que l’entrée, la semaine dernière en Mauritanie, de plusieurs dizaines de camions marocains ayant transité par le passage toujours ouvert d’El Guerguerat, où ils ont été exemptés de droits de douane avant d’être accueillis, qui plus est, par des officiels mauritaniens et l’ambassadeur du Maroc à Nouakchott, serait derrière ce énième geste d’énervement de l’Algérie et du Polisario contre la Mauritanie.

Par Mohammed Ould Boah
Le 30/04/2020 à 17h34