Quand le PJD se projette déjà dans l’opposition

Saâd-Eddine El Othmani, chef du gouvernement et secrétaire général du PJD.

Saâd-Eddine El Othmani, chef du gouvernement et secrétaire général du PJD. . DR

Revue de presseKiosque360. Le PJD a dressé un bilan de dix ans de gestion à la tête de l’Exécutif, en louant les réalisations du gouvernement et en critiquant la politique de l’Etat, en tant qu’entités distinctes. Une schizophrénie politique qui l'a converti à l’opposition à l’approche des élections.

Le 30/05/2021 à 19h38

A l’approche des élections, le PJD, qui dirige le gouvernement depuis deux mandatures, s’est converti en parti d’opposition critiquant la politique de l’Etat et faisant l’éloge de celle du gouvernement. Le quotidien Al Massae rapporte, dans son édition du lundi 31 mai, que le parti islamiste n’hésite pas à évoquer un recul dans le domaine des libertés, de la consolidation du rôle de la gestion technocratique et de la désignation des responsables aux dépens de l’élu, ainsi que de l’iniquité dans la répartition des richesses. Le parti d’El Othmani a dressé un bilan de sa gestion tout en veillant à prendre ses distances par rapport à certaines décisions. C’est ainsi qu’il s’est ingénié à dire que le Maroc avait choisi le pluralisme politique tout en faisant la distinction entre «la politique générale dirigée par les établissements de l’Etat et les politiques publiques réservées au gouvernement».

Difficile de s’y retrouver dans cette schizophrénie politico-politicienne, notamment quand le PJD parle de plusieurs carences et défis à relever. Le parti cite notamment cette orientation qui, dit-il, cherche à vider la décentralisation administrative de son contenu démocratique et, du coup, à affaiblir la régionalisation avancée. Ce faisant, la gestion technocratique et la prédominance du rôle du responsable désigné sur celui de l’élu contribuent à faire douter les citoyens de l’utilité de la participation politique et à atomiser les acteurs politiques. Ainsi, le PJD entre dans le vif du sujet en parlant d’un renoncement au processus démocratique par l’adoption du quotient électoral sur la base des inscrits sur les listes électorales. Une suppression qui, souligne-t-il, contribue à vider l’opération électorale de sa substance démocratique, basée essentiellement sur le scrutin libre à travers le nombre de votants réels.

Le quotidien Al Massae rapporte que le parti du chef du gouvernement indique que, mis à part quelques améliorations apportées aux lois électorales, la suppression du seuil électoral dans l’élection des élus communaux va créer un désordre politique sans précédent. Les conseils territoriaux vont, poursuit le PJD, être balkanisés et causeront une instabilité dans les majorités dirigeantes, sans oublier le manque à gagner en matière de développement suite à ce choix législatif. Sur le plan des droits de l’Homme, le parti islamiste souligne que les progrès réalisés par le Royaume dans ce domaine ont été écornés par certaines formes d’atteintes aux libertés individuelles et aux données personnelles. Le parti qui dirige le gouvernement va même jusqu’à affirmer que le déroulement de certains procès a été basé sur des plaintes malveillantes utilisées à des fins politiques. 

Toutes ces violations, ajoute le PJD, contribuent à la détérioration du climat politique et ternissent l’image du pays et ses acquis politiques, constitutionnels et humanitaires. D’autre part, le parti islamiste relève la faiblesse des avancées dans la distribution équitable des richesses, et ce malgré les grands efforts déployés dans la réalisation des projets structurels et les grandes réformes institutionnelles et économiques. Une situation, poursuit le PJD, qui se transforme en tension sociale et territoriale, surtout avec l’augmentation continue du plafond des revendications des citoyens. D’autant que ce climat politique est exacerbé par la prédominance d’une culture sociale qui compte sur l’effort public de l’Etat, ainsi que par la faiblesse de la libre initiative, l’esprit d’aventure et d’innovation, conclut le parti du chef du gouvernement.

Par Hassan Benadad
Le 30/05/2021 à 19h38