Sahara: Ban Ki-moon affirme ne pas maîtriser le dossier et le personnel de la Minurso vit mal la fin des vacances

Ban Ki-moon lors de sa visite à Tindouf.

Ban Ki-moon lors de sa visite à Tindouf. . DR

Ban Ki-moon a avoué sa méconnaissance du dossier du Sahara, affirmant s’en remettre à l’expertise de ses collaborateurs. Lundi, il engage une ultime action auprès des membres du Conseil de sécurité pour plaider le maintien du personnel de la Minurso qui vit des vacances dorées, payées par le Maroc.

Le 19/03/2016 à 19h54

Ban Ki-moon ne s’attendait certainement pas au retentissement planétaire de ses écarts de conduite sur le dossier du Sahara. Il est très surpris par l’ampleur médiatique au sujet d’un conflit qu’il considérait comme mineur dans l’ordre hiérarchique des dossiers dont il a la charge. Le360 a appris de sources sûres que le secrétaire général de l’ONU a confié que le conflit du Sahara n’a jamais été un dossier prioritaire à ses yeux et qu’il se consacrait à des affaires autrement plus importantes. Ban Ki-moon a ajouté que ce sont ses collaborateurs qui maîtrisent ce dossier et qu’il n’a fait que suivre les recommandations de son staff quand il s’est rendu aux camps de Tindouf en Algérie.

Le premier responsable de l’ONU avoue donc sa méconnaissance du dossier du Sahara. Il ne fait qu’exécuter ce que ses collaborateurs lui susurrent à l’oreille. Etonnante confession qui s’explique, sans doute dans l’esprit de son auteur, par l’espoir de trouver des circonstances atténuantes à la crise qu’il a provoquée. Pourtant, l’aveu d’ignorance de Ban Ki-moon peut surprendre partout, sauf au Maroc. Depuis des années, les responsables marocains n’ont cessé de répéter que le SG de l’ONU n’a jamais pris le temps de se pencher sur le dossier du Sahara et qu’il prête une écoute exclusive à ce que lui rapportent ses collaborateurs. «Ses collaborateurs lui ont toujours fait faire ce qu’ils veulent», nous précise une source proche du dossier.

En affirmant faire une confiance aveugle aux conseils de ses collaborateurs, le premier responsable de l’ONU espère se laver de toute responsabilité. Cet aveu comporte des implications qui peuvent porter à croire que le premier responsable de l’ONU ne décide pas de tout dans l’institution qu’il dirige. Car quand Ban Ki-moon exécute à la lettre les conseils de son staff sur le dossier du Sahara, ce n’est plus lui qui tient les ficelles, mais ses collaborateurs. De là à parler du SG de l'ONU en tant qu’une marionnette aux mains de ses collaborateurs, il n’y a qu’un pas, d’autant plus facile à franchir que le principal concerné admet lui-même ne pas maîtriser le conflit du Sahara et se remettre à l’expertise de ses assistants.

Ce sont donc les collaborateurs de Ban Ki-moon qui lui ont soufflé d’utiliser le mot «occupation» alors qu’aucun de ses cinq prédécesseurs, qui ont eu la charge du dossier du Sahara, ne s’est jamais départi de la neutralité et de l’impartialité à laquelle il est tenu en proférant un mot où il prend ouvertement partie dans un conflit dont il est censé aider à trouver une solution. Ce sont également ces mêmes collaborateurs qui lui ont enjoint de brandir ses deux doigts, en signe du V de la victoire, en direction des séparatistes. Et c’est également la voix de ces mêmes collaborateurs que Ban Ki-moon a entendu quand il s’est incliné devant l’étendard de la "RASD", une entité qui ne fait pas partie des Etats membres de l’ONU… dont il est le premier responsable.

Il semble que ce sont ces mêmes collaborateurs qui poussent le SG de l’ONU à lobbyer de tout son poids auprès des membres du Conseil de sécurité pour les porter à demander au Maroc de renoncer au retrait de la composante civile de la Minurso.

Personnel civil de la Minurso:la fin des haricots

L’expulsion des 84 membres civils de la Minurso par le Maroc est vécue comme un drame par les collaborateurs de Ban Ki-moon. L’argument avancé par le porte-parole de Ban Ki-moon a de quoi surprendre. «Lorsque vous êtes invités à retirer des chauffeurs, des agents chargés de la sécurité des vols, des techniciens de climatisation, des experts de communication, voire même des conseillers politiques, il devient pratiquement impossible pour une mission de remplir son mandat, à long terme», affirme à la presse Stéphane Dujarric, porte-parole du SG de l’ONU. Oui, vous avez bien lu : chauffeurs, agents de sécurité des vols et techniciens de la climatisation sont une ressource tellement rare dans le désert du Sahara que leur absence mettrait en péril l’existence même de la Minurso.

Concernant les autres, les «experts en communication» et les «conseillers politiques», on comprendra aisément qu’ils veulent faire durer leur séjour au Sahara quand on saura que les salaires du personnel civil de la Minurso varient entre 6.000 à 15. 000 dollars par mois. Ils n’ont d’ailleurs pas besoin de toucher à leurs salaires. Les frais d’hébergement et de restauration des 84 membres civils sont à la charge du Maroc. Même le carburant qu’ils utilisent bénéficie de la subvention de l’Etat pour les provinces du sud.

Depuis 1991, le personnel civil de la Minurso se la coule douce aux frais de l’Etat marocain. Les seules fois dont on entend parler de ce personnel, c’est quand il défraie la chronique avec des affaires de mœurs. Et quand ce personnel essaie de faire semblant de travailler, il envoie des rapports incendiaires contre le Maroc. Pourquoi le Maroc va-t-il continuer à subventionner les vacances interminables des 84 civils de la Minurso? Si ce personnel vit comme un arrachement son expulsion du Maroc, c’est parce qu’il perd ses avantages.

Le lobbying pour le maintien de ce personnel au Maroc va continuer. Le SG de l’ONU a placé ce sujet «en tête de l’ordre du jour» du déjeuner informel qu’il partage chaque mois avec les quinze ambassadeurs du Conseil de sécurité. Ce fameux déjeuner aura lieu lundi. La question qui se pose : celui qui a avoué n’avoir aucune connaissance du conflit du Sahara va-t-il écouter les explications de membres qui maîtrisent ce dossier ? Ou bien viendra-t-il comme à son habitude, chargé à bloc par ses collaborateurs, réciter la leçon qu’ils lui ont apprise ?

Par Aziz Bada
Le 19/03/2016 à 19h54