Sebta et Melilla: sans contrebande depuis deux ans, un avenir incertain

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Revue de presseKiosque360. Deux ans déjà que les autorités marocaines ont décidé de mettre définitivement un terme à la contrebande en provenance de Sebta et Melilla. Mais aujourd’hui encore, l’avenir économique des deux villes semble encore incertain. Cet article est une revue de presse du quotidien Al Ahdath Al Maghribia.

Le 16/12/2021 à 20h09

Cela fait deux ans que les passages de Sebta et Melilla ont été fermés à la contrebande. Quand les autorités ont décidé d’y mettre un terme, peu de gens y croyaient. Certains ont même tenté de faire pression pour faire revenir les choses à la situation antérieure. Aujourd’hui, peu sont ceux qui croient que la contrebande pourrait redevenir un jour l’activité prédominante dans les villes riveraines.

Dans son édition du vendredi 17 décembre, Al Ahdath Al Maghribia revient sur ce dossier et dresse un tableau global de la situation. Que ce soit à Fnideq, Nador ou dans les villes avoisinantes, il ne fait plus aucun doute que les passages de Sebta et Melilla ont été définitivement fermés à la contrebande. Même de l’autre côté, les commerçants qui faisaient affaire avec les Marocains qui traversaient quotidiennement semblent s’être résignés à l’idée que la contrebande ne serait plus du pain béni.

Comme le précise le journal, les autorités marocaines ont été convaincues dès le début qu’il en était fini avec la contrebande des produits émanant des deux présides occupés. C’est pourquoi dès la fermeture des frontières en mars 2020, elles se sont activées pour lancer des chantiers visant à «compenser» les populations qui vivaient de cette contrebande. Activités alternatives, projets créateurs de nouveaux emplois….

La priorité accordée au dispositif de substitution, avec ses projets concrétisés, ceux en cours ou ceux encore en réflexion, est une preuve de la détermination du royaume à maintenir sa position vis-à-vis de la contrebande qui sévissait dans ces villes du Nord. Une preuve qui constitue également un message que les autorités espagnoles ont fini par capter, en annonçant récemment un nouveau plan dédié aux deux villes, avec d’importants moyens à mobiliser.

Pourtant, comme le fait remarquer le quotidien, l’Espagne a à maintes reprises laissé entendre que les deux passages allaient rouvrir incessamment. Elle a fini par perdre espoir, et même si les autorités qui gouvernent Sebta et Melilla ont beaucoup investi dans la modernisation des deux passages, tout le monde sait aujourd’hui qu’ils ne pourront plus ouvrir comme par le passé et que, surtout, ils ne pourront plus être une porte ouverte pour l’entrée des produits de contrebande vers le Maroc.

Face à ce constat, ajoute la même source, les autorités espagnoles ont fini par réagir. Des sources journalistiques espagnoles citées par Al Ahdath al Maghribia évoquent la constitution d’une commission interministérielle, avec pour but de dresser une feuille de route permettant de gérer les aspects commerciaux, sociaux et sécuritaires liés à la fin de la contrebande qui générait, selon les estimations, plus de 1,5 milliard d’euros de revenus pour les deux villes.

L’idée est donc clairement de trouver un moyen de compenser l’impact de cet arrêt. Pour le quotidien arabophone, il aurait mérité d'être considéré comme une opportunité inédite pour concevoir un modèle de développement propre à Sebta et Melilla. Des sources commencent même à évoquer le modèle des «îles» qui sont souveraineté de pays européens, et qui s’appuient sur leurs propres spécificités pour développer leur économie, tout en restant attachés à l’espace Schengen.

Sur ce volet d’ailleurs, Al Ahdath al Maghribia évoque plusieurs problématiques qui pourraient découler du nouveau modèle de développement qui se prépare pour les deux villes. Avec la fin de la contrebande, faut-il également mettre un terme aux exceptions dont jouissaient les deux villes, comme la possibilité de laisser les habitants des villes riveraines comme Nador et Fnideq d'y accéder? Faut-il mettre en place un système douanier équivalent à celui des pays du vieux continent pour se conformer aux réglementations Schengen?

La liste des défis que doivent donc relever Sebta et Melilla depuis l’arrêt de la contrebande sont donc bien nombreux. Mais du côté des villes avoisinantes, il en est de même. A la différence que les autorités marocaines sont déjà lancées dans une course contre la montre pour concrétiser rapidement les différents projets qui soutiendront les populations qui vivaient de cette contrebande.

Une attention particulière a été portée aux familles qui se sont retrouvées sans revenus après la fermeture des deux passages. Du coup, on a vu fleurir des initiatives qu’on n’aurait pas soupçonnées il y a encore quelques années. Comme l’écrit Al Ahdath Al Maghribia, des femmes, qui font partie de la population la plus touchée par l’arrêt de la contrebande, se sont lancées dans l’entrepreneuriat, avec le soutien des autorités locales.

Des projets, s’appuyant principalement sur les atouts forestiers et marins des villes du Nord, se multiplient également, constituant une alternative pour des femmes qui pratiquaient la contrebande vivrière. D’autres ont bénéficié des projets lancés par les pouvoirs publics, comme par exemple ceux inclus dans le Programme d'initiatives économiques intégrées qui s’étalent jusqu’en 2023, le programme d’inclusion par les activités économiques, le programme du ministère de la Solidarité et qui est consacré au développement régional ou encore le Programme de développement de l’économie solidaire.

Que ce soit au Maroc ou en Espagne, tout le monde est convaincu que les choses ne peuvent plus revenir comme elles l'étaient, avec cette contrebande qui enrichissait l’économie des présides occupés, faisait vivre des familles dans les villes avoisinantes, mais qui avait un coût énorme pour l’économie marocaine.

Par Fayza Senhaji
Le 16/12/2021 à 20h09