Contamination au Covid-19 après vaccination: les statistiques préliminaires d'une étude menée à Casablanca

Des Marocains attendent leur tour dans un centre de vaccination Covid-19, à Casablanca, le 9 août 2021.

Des Marocains attendent leur tour dans un centre de vaccination Covid-19, à Casablanca, le 9 août 2021. . FADEL SENNA / AFP

Les résultats préliminaires d’une étude menée à Casablanca auprès de 543 personnes détentrices d'un schéma vaccinal complet viennent confirmer que la vaccination devient de moins en moins efficace au fil du temps. En voici des statistiques préliminaires, détaillées par le Pr Jaâfar Heikel, épidémiologiste, et qui a dirigé ce travail d'enquête.

Le 11/01/2022 à 14h52

Une étude menée à Casablanca par une équipe de chercheurs, dirigée par l’épidémiologiste Jaâfar Heikel le confirme, sans conteste: l'efficacité vaccinale baisse progressivement dans le temps, après une primovaccination complète. Ce travail d'enquête a été mené sur 543 personnes correctement vaccinées, mais ayant présenté des symptômes de la maladie au moins deux semaines après la deuxième injection du vaccin, lesquels symptômes ont été confirmés par un test PCR positif.

Selon les résultats préliminaires de cette étude, 64,3% des personnes ont été testées positives au Covid-19 trois mois après avoir été correctement vaccinées.

«L'efficacité vaccinale baisse donc progressivement dans le temps, d’où l’intérêt d’un booster shot, cette dose de rappel qui augmente significativement la réponse immunitaire contre le coronavirus», explique, interrogé par Le360, le professeur Jaâfar Heikel, spécialiste des maladies infectieuses, et détenteur d'un PhD en épidémiologie.

Dans le détail, 17% ont eu une infection dans les 30 jours suivant leur vaccination, 10,6% ont eu le Covid-19 entre 1 et 3 mois après avoir été correctement vaccinés, 49,9% ont eu le Covid-19 entre 3 et 6 mois après et 14,4% ont été déclarés positifs plus de six mois après avoir correctement complété leur vaccination. La moyenne de protection et de non-infection est donc de 108 jours après les deux doses du vaccin.

Concernant le fait de savoir si le taux d’efficacité vaccinal varie en fonction des classes d’âge et du sexe des vaccinés, les résultats préliminaires de cette étude démontrent que le sexe n’influence en aucun cas la réponse immunitaire.

«Il n'y a pas de différence entre les femmes et les hommes. Chacun a le même risque de faire une infection. Toutefois, les premiers résultats disponibles font ressortir que plus de 58% des personnes, qui ont été infectées dans les trois mois suivant leur vaccination, sont âgées entre 45 et 64 ans et que 51% des plus jeunes ont développé une infection dans le premier mois post-vaccinal», précise le professeur Heikel.

En ce qui concerne le groupe sanguin et le surpoids, le médecin spécialiste en maladies infectieuses indique n’avoir relevé aucune différence quant à la réponse immunitaire des personnes infectées au Covid-19.

«Par contre, les personnes vaccinées non diabétiques ont 7,2 fois plus de risques de se faire infecter par rapport aux diabétiques et les sujets vaccinés non hypertendus ont 10,4 fois plus de risques de contracter le Covid-19, probablement parce que les diabétiques et les hypertendus, se sachant à risque, font plus attention au respect des mesures barrières», ajoute-t-il.

En outre, le Pr Jaâfar Heikel indique que «98,5% des personnes correctement vaccinées et qui ont contracté le Covid-19 ont développé des formes bénignes, contre 1,5% qui ont connu une évolution grave ou sérieuse».

«Pour le moment, nous sommes en train d'étudier les cas des personnes qui ont eu trois doses de vaccin. Et jusqu'à présent, les résultats dont nous disposons montrent qu’elles ont moins de risque d'être infectées par rapport aux personnes qui n'ont eu que deux doses du vaccin. Je rappelle que ces résultats sont encore préliminaires», précise l’épidémiologiste.

«Evidemment, ces résultats concernent essentiellement des personnes de Casablanca, principalement du milieu urbain. Ce n'est pas une étude qui est représentative de l'ensemble des données nationales, mais qui permet de donner un certain nombre d'orientations et qui soulève un bon nombre d'hypothèses, qu'il faudra confirmer dans d'autres études. Cela a le mérite de donner de l’information supplémentaire sur ce qu'il se passe en matière du Covid-19 au Maroc. Nous devons informer pour mieux prendre en charge les patients et optimiser la gestion de la crise, ce qui aidera les politiques publiques», détaille le médecin.

Aujourd’hui, le nouveau variant hautement transmissible du coronavirus, Omicron, devient dominant, rappelle ce professeur de médecine. Plusieurs personnes vaccinées ont contracté le Covid-19, d’où l’importance d'un rappel vaccinal et du respect rigoureux des mesures barrières.

Rappelons que l’ensemble des indicateurs de suivi de l’épidémie de coronavirus sont à la hausse: le Maroc est désormais passé au niveau rouge de la transmission du virus. En une semaine, les nouvelles contaminations ont augmenté de 231%, passant ainsi de 10.658 cas sur la période du 27 décembre au 2 janvier, à 35.307 cas la semaine dernière (du 3 au 9 janvier).

Cette troisième vague est donc très rapide, avec un temps de doublement de 4 jours, alors que ce chiffre était de 8 jours au cours des quatre premières semaines de la vague Delta, et de 14-15 jours au cours des quatre premières semaines de la première vague.

«C'est aujourd’hui très important qu'il y ait la vaccination avec, au minimum, les deux doses et ensuite compléter par une troisième dose, étant donné qu'avec le temps, on a plus de chances de se faire infecter, particulièrement lorsque c'est un variant qui est extrêmement transmissible. Les personnes, même vaccinées, peuvent, certes, avoir le virus, mais elles auront moins de formes graves», plaide le professeur Heikel, en conclusion de cet entretien.

Par Hajar Kharroubi
Le 11/01/2022 à 14h52