"Libérez le prof de Khouribga" ou quand les Marocains font l’apologie de la violence 

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Suite à l’arrestation de l’enseignant qui a tabassé son élève à Khouribga, de nombreux messages de soutien au professeur ont inondé les réseaux sociaux. Le sociologue Mohamed Benzakour nous explique cette apologie de la violence et déplore l’absence de formation à la communication non violente.

Le 23/05/2018 à 14h12

Si la diffusion de la vidéo montrant une élève se faire violemment brutaliser par son professeur a provoqué un vif émoi chez les Marocains, l’arrestation de l’enseignant, le dimanche 20 mai, a pour sa part déclenché une vague de solidarité envers ce dernier…

En effet, sur Facebook, de nombreux internautes ont pris la parole pour défendre le professeur de mathématiques de 59 ans sous le hasthag "libérez le professeur de Khouribga". Dans leurs posts, des enseignants s’en prennent notamment à Saïd Amzazi lui reprochant d’"honorer les agitateurs" après avoir dépêché l’inspection générale du ministère de l’Education nationale au domicile de la collégienne et suspendu l’enseignant.

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Que disent ces faits sur notre système éducatif? Comment expliquer cette apologie de la violence? Comment peut-on éduquer sans recourir à la violence? Mohssine Benzakour, sociologue marocain, nous donne son avis.

D’abord la violence est omniprésente dans notre société. Elle existe dans tous les sens et sous toutes les formes: verbales, psychiques et sexuelles. Malheureusement, le recours à la sanction se fait toujours via la violence dans notre société. On pense que l’enfant ne peut être éduqué qu’à travers le châtiment corporel. C'est une réalité culturelle chez nous. Et on y croit profondément. A l'école, l'enfant fait face à un manque de respect dans la parole, à l'insulte, au mépris et à la violence physique. La violence engendre la violence. On se retrouve à reproduire le même schéma...

Que penser de la réaction d’un bon nombre d’enseignants qui justifient cette violence? Les enseignants réagissent par esprit de communauté, mais la solidarité dans ce sens n’a pas lieu d’être. Les professeurs qui défendent un collègue violent ont soit peur de tomber dans la même situation soit ils sont en train de faire la même chose à leurs élèves…

Notre société a-t-elle évolué? Peut-on dire que le châtiment corporel n'est plus accepté?Dans notre société, le professeur a toujours été sacralisé pour deux choses: pour son savoir et pour la violence qu’il exercait. Et cette violence a toujours été légitime socialement. Mais, aujourd’hui, ce n’est plus le cas. La société a évolué. L'enfant a appris à se défendre mais l’enseignant lui, n’a pas appris à gérer sa classe de manière non violente… Le savoir à lui seul n'est pas suffisant, il faut apprendre des techniques de communication non violente. Malheureusement, il n'y a pas de formation à cette forme de communication, il n'y a pas non plus d'inspection... Le chemin est encore long!

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Par Rania Laabid
Le 23/05/2018 à 14h12