L’importateur des eaux Mondariz attaque en justice Ali Amar

Ali Amar.

Ali Amar. . DR

Khalid Ouasti, gérant de la société qui importe les eaux minérales Mondariz au Maroc, a déposé plainte contre Ali Amar. Ce dernier a publié un article dans lequel il avance des arguments fallacieux, en vue notamment de nuire à l'image du secrétaire particulier de Mohammed VI.

Le 29/05/2018 à 15h17

Khalid Ouasti, gérant unique de la société LODEP qui importe les eaux minérales Mondariz au Maroc, a déposé plainte contre Ali Amar, directeur de publication du site d’information Le Desk. Raison de cette plainte: un article publié le 23 mai dans Le Desk, signé Ali Amar, et intitulé «De l’eau espagnole d’El Majidi détaxée à Marjane». L’article en question est tellement truffé de contrevérités qu’il est difficile de ne pas croire à une démarche volontaire de nuire à autrui et d’induire en erreur le lecteur. Il ne faut pas chercher loin pour trouver les premières contrevérités. Elles sautent aux yeux dès le titre et les premières phrases du chapeau où Ali Amar écrit: «L’eau minérale galicienne Mondariz importée par Loubna El Majidi, sœur de Mounir Majidi, secrétaire particulier du roi». Faux! L’eau minérale Mondariz n’est pas importée par Loubna El Majidi, mais par son mari Khalid Ouasti, qui a un patronyme qui permet sans doute moins aisément de trouver un raccourci pour nommer le secrétaire particulier du roi. Donc, l’auteur de l’article choisit l’imprécision dans l’espoir de faire tenir pour vrai ce qui est faux.

Qui ne connaît pas Ali Amar, qui se targue pourtant d’être rigoureux et précis et passe son temps à relever les approximations de ses confrères, peut s’étonner qu’il louche tellement dans la direction de Mounir El Majidi au point de ne pas voir dans les statuts de la SARL LODEP que le gérant unique s’appelle Khalid Ouasti et non pas Loubna El Majidi qui n’est actionnaire, comme il le rappelle, qu’à hauteur de 40%. Bien entendu, c’est tellement arrangeant de citer la sœur pour atteindre le frère… Le plus étonnant pour celui qui ne connaît pas Ali Amar, c’est que deux jours plus tard, ce dernier reprend pour se défendre de ce qu’il nomme «une cabale aux relents complotistes menée tambour battant sur les réseaux sociaux», un argument exactement à l’opposé de la lecture qu’il vient de faire à propos des actionnaires de la société LODEP. 

Suite à la publication de son reportage-fleuve qui fait l’apologie des eaux Sidi Ali, Ali Amar a été sévèrement dénoncé par la presse et les réseaux sociaux pour avoir passé sous silence les liens d’alliance entre l’actionnaire de référence du site Le Desk, Ali Belhaj et Miriem Bensaleh qui administre la société «Eaux minérales d’Oulmès»: le neveu du premier est marié avec la fille de l’ancienne patronne des patrons. Amar réfute que les liens d’alliance, dénoncés par la presse et les internautes, aient été pour quelque chose dans la publication de l’article. Il nie «une prétendue entente d’intérêts». Et de conclure pompeusement: «Il s’agit là d’un pur procès d’intention qui ne repose sur aucun argument factuel, mais des affirmations dénuées de tout fondement.» Une personne connaissant mal Ali Amar peut encore s’étonner qu’il s’évertue dans l’article sur les eaux Mondariz à mentir sur l’identité de l’importateur de l’eau espagnole, rien que pour établir un lien de parenté avec un proche du roi sans présenter ni fait, ni preuve de nature à lui conférer le statut de protagoniste dans un sujet qui ne le concerne pas, alors que ce même Ali Amar affirme que la causalité entre l’alliance de son actionnaire de référence avec la patronne des eaux Sidi Ali et son reportage laudatif est un hors sujet.

L’importateur de Mondariz est en règle avec le fiscQue reproche Ali Amar à l’importateur des eaux Mondariz au Maroc? De ne pas soumettre ses bouteilles à un «marquage fiscal». Notons bien qu’Ali Amar ne parle pas de fraude au fisc, mais utilise une expression vague pour faire des glissements sémantiques inexacts et laisser croire que la société importatrice de l’eau espagnole se soustrait à ses obligations fiscales. En somme, Ali Amar commence par affirmer avoir constaté que nombre des bouteilles Mondariz, mises en vente à Marjane, ne comportent pas de timbre fiscal. Selon nos informations, la redevance de cette vignette due à SICPA, s’élève à 0,01 centime par bouteille. Mais comme la valeur de cette vignette est insignifiante, Ali Amar affirme plus loin que la société LODEP n’est pas assujettie à la TIC (taxe intérieure de consommation) qui équivaut à 8 centimes par litre d’eau importée.

Comment Ali Amar a-t-il pu arriver à la conclusion que la société LODEP importait ses eaux sans payer la TIC? Il se garde bien de nous le dire ou d’en apporter les preuves. A-t-il contacté la société incriminée pour avoir sa version des faits et vérifier les accusations dont il l’accable dans son article? Là encore, Ali Amar se réfugie derrière cette phrase bien commode et qui ne convainc personne: «la société n’était pas joignable par téléphone». Pourtant, nous avons appris qu’Ali Amar n’a jamais contacté la société ni son gérant. Il a écrit un article à charge, résolument déséquilibré, sans se soumettre au b.a.-ba de l’exercice journalistique, à la seule fin de diffamer.

Contacté par le360, Hicham Naciri, avocat de Khalid Ouasti qui a porté plainte contre la direction de publication du Desk, est catégorique: «nous avons les justificatifs de la Douane sur chaque bouteille Mondariz importée au Maroc et chaque centime de redevance à la TIC». D’ailleurs, on ne peut pas faire entrer une marchandise au Maroc sans payer la TIC. Pour les eaux minérales, la TIC est un impôt fixe à l’hectolitre. Ali Amar le sait, mais il veut laisser croire que la Sarl LODEP bénéficie d’un passe-droit royal. Il va désormais devoir s’en expliquer devant la justice.

En ce qui concerne la supposée absence de vignettes, constatée par Ali Amar, sur certains packs des eaux Mondariz, là aussi, nous avons appris qu’un pack non étiqueté ne rentre pas dans un magasin. A ce sujet, Ali Amar a fait l’effort de fournir une preuve sous forme d’une image photographie. Cette preuve est-elle fiable?

La preuve d’Ali Amar à l’épreuveL’auteur de l’article du Desk affirme avoir constaté l’absence d’un timbre fiscal sur près de la moitié des palettes où sont disposés les packs des bouteilles Mondariz. Et de préciser: «Un fait d’autant plus troublant que seuls les packs de front de palettes sont formés de bouteilles sur lesquelles sont apposées de petites pastilles jaunes autocollantes où figure le marquage fiscal. Celles des rangées du fond ne le sont pas.» Une photographie illustrant l’article est supposée confirmer l’absence de vignettes sur les bouteilles du fond.

Pourtant, dans ce même article, Ali Amar nous dit que les eaux Mondariz «attirent les consommateurs», «qu’elles font un tabac». Si ces eaux se vendent aussi bien, les packs de devant vont vite disparaître dans les chariots des chalands et ceux de derrière seront inexorablement en peu de temps au front. Donc, à quoi bon laisser sans étiquettes des packs au fond qui ne tarderont pas, par la force des rotations, à se positionner face aux consommateurs? La version d’Ali Amar est démentie même par le succès phénoménal qu’il prête à cette eau. Ou alors il faudrait croire que le gérant de cette société a placé devant les blocs de palettes une personne, chargée de coller des sticks sur les packs de derrière dès qu’ils sont mis à nu par les clients. Invraisemblable.

Ce qui est en revanche possible, c’est qu’une main malveillante ait décollé les étiquettes pour la prise de la photo. Quand on connaît le parcours d’Ali Amar, le moins que l’on puisse dire c’est que son nom a souvent été associé à des affaires interlopes. En 1994, il a falsifié une attestation de blocage d’une somme astronomique dans la banque où il travaillait, en contrepartie de l’argent reçu d’un client. Ce qui lui a valu une condamnation à un an de prison ferme pour «corruption, abus de confiance, faux et usage de faux».

En 2013, il a été viré du site d’information slateafrique, fondé notamment par Jacques Attali et Jean-Marie Colombani, pour plagiat et parce qu’il écrivait des reportages sur le Maroc à partir… de la Slovénie. D’autres affaires et plaintes, relevant du droit commun, mettent à rude épreuve l’honnêteté d’Ali Amar. Celui qui a falsifié des documents et triché plus d’une fois peut-il le faire encore? Au regard de la mauvaise foi qui transparaît de bout en bout dans l’article sur l’importateur des eaux Mondariz au Maroc, cette hypothèse est plausible.

Une tentative de diversion contre la campagne de boycottDeux raisons semblent justifier l’article diffamatoire d’Ali Amar. La première consiste à détourner l’attention du boycott populaire qui frappe les eaux Sidi Ali. Quand on fait jouer la fibre nationaliste d’une eau marocaine contre une eau espagnole, la préférence locale prévaut. Seulement, Ali Amar se garde bien de dire que dans le secteur des eaux minérales, trois sociétés marocaines (Eaux minérales d’Oulmès, Sotherma et Brasseries du Maroc) trustent le marché marocain avec 94% de parts. Quant aux eaux Mondariz, elles ne détiennent même pas 0,5% du marché marocain.

Si les Marocains se ruent comme l’affirme Ali Amar sur Mondariz, c’est que son prix est concurrentiel et que la qualité de cette eau, qui a reçu selon le site officiel de la marque le prix de meilleure eau au monde, plaît aux consommateurs. Il n’existe toutefois aucune commune mesure entre les parts de marché de Sidi Ali et Mondariz qui ne peut ni inquiéter ni concurrencer le leader des eaux minérales au Maroc.

La deuxième raison de l’article est plus pernicieuse. Ali Amar prétexte d’une eau importée par le beau-frère de Mounir El Majidi pour tenter de salir l’image du secrétaire particulier du roi. De là, on peut s’interroger sur les motivations réelles de cette manœuvre. Qui sont les personnes derrière cet article? Ali Belhaj, l’actionnaire de référence du Desk, est un homme politique affilié au PAM. A-t-il une implication dans une attaque aussi directe contre Mounir El Majidi? L’article d’Ali Amar est lourd d’insinuations sur une partie qui non seulement profite de la campagne de boycott, mais l’entretient pour faire des affaires juteuses. En laissant croire mensongèrement que cette campagne profite à l’importateur de Mondariz, c’est surtout un proche du roi que l’auteur de l’article et ses commanditaires espèrent livrer à la colère populaire.

Par Tarik Qattab
Le 29/05/2018 à 15h17