Nadia, Marocaine, appelle Gaza: Pour une fleur au bout d'une grenade

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C'est une incroyable et bouleversante initiative qu'ont prise, dernièrement, les Marocains, d'appeler Gaza au hasard en composant l'indicatif régional suivi de 6 chiffres quelconques, jusqu'à ce que quelqu'un réponde au bout du fil. Simplement pour dire aux habitants de Gaza qu'ils pensent à eux.

Le 18/07/2014 à 11h56

C'est une incroyable et bouleversante initiative qu'ont prise, dernièrement, des Marocains, d'appeler Gaza au hasard en composant l'indicatif régional suivi de 6 chiffres quelconques, jusqu'à ce que quelqu'un réponde au bout du fil. Simplement pour dire aux habitants de Gaza qu'ils pensent à eux. Qu'ils ne sont pas seuls. Et ces échanges ont été d'une émotion indescriptible d'un côté comme de l'autre bout du fil. Si les personnes qui ont pris cette initiative témoignent souvent de la force de cet instant où confidences, complicité et rires mêlés de larmes succédaient à la surprise, fugitive, qui s'emparait d'abord de l'interlocuteur, peu donnent des détails tels que ceux, saisissants, livrés par Nadia Baba. Cette jeune enseignante marocaine de Français a a en effet pris son téléphone pour appeler Gaza. Nadia ne se laisse pas décourager par les quelques premiers essais infructeux, et change les numéros jusqu'à ce que quelqu'un décroche. A l'autre bout du fil, une voix de femme.

Une étreinte dans la solitudeCe moment sera inoubliable pour Nadia comme il le sera pour cette femme palestinienne qui l'accueillera chez elle. C'est le sentiment qu'aura la jeune enseignante qui venait, par ce geste simple et si beau, de briser le pan d'une terrible parenthèse de la solitude et du silence. "Je viens enfin de parler avec une habitante de Gaza", rapportera-t-elle. "Elle a très vite senti mon embarras et ma tristesse. Elle n'a pas arrêté de m'appeler "ma chérie", "ma fille". Elle était heureuse de mon appel, elle était très confiante et répétait souvent : "Hamdoullah ma fille, nous résistons...". De plus, elle n'a cessé, durant toute notre discussion, de me remercier et de prier pour moi! Je n'ai pas pu parler plus longtemps avec elle de peur de fondre en larmes. Je venais pour encourager et apporter de l'affection, et c'est moi qui recevais des prières et des remerciements. Mais cette noble dame m'a donné la permission de l'appeler souvent pour prendre de ses nouvelles". Très émue, Nadia ajoutera: "Je veux vous confier que cet appel m'a créé un choc émotionnel au début. J'ai beaucoup pleuré avant de décider de partager cette expérience en vue d'apporter un soutien affectif aux Gazaouis".Il aura suffi de ces quelques instants pour que cette dame fasse désormais partie de la vie de Nadia: "Un lien très fort me lie à elle. Mais je suis très inquiète; je l'ai rappelée plusieurs fois cette semaine, elle ne répond pas. Je ne vais pas l'oublier et je compte garder le contact avec elle". Oui, elle gardera le contact avec cette femme qui a fait éclore dans sa mémoire, "par sa résistance face à l'horreur, malgré son âge, par sa générosité et son optimisme", l'image de cette femme palestinienne qui plantait des fleurs dans des grenades israéliennes.

Par Bouthaina Azami
Le 18/07/2014 à 11h56