Saïf, 3 ans, kidnappé à Marrakech, rapatrié de Londres

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A trois ans à peine, Saïf aura vécu la plus grande mésaventure de sa vie. Né à Marrakech de mère marocaine, son père pakistano-britannique le kidnappe et l’emmène à Londres. Ce vendredi, il retrouve sa mère et son pays grâce à un combat héroïque menée essentiellement par des femmes. Récit.

Le 11/11/2016 à 18h49

Saïf est âgé de trois ans à peine. C'est bien jeune pour vivre la plus traumatisante mésaventure de sa vie. C'est pourtant le cas de cet enfant qui s'est trouvé séparé de sa mère pendant plusieurs mois. En effet, le 13 août dernier, son père, Britannique d’origine pakistanaise, l’avait kidnappé à Marrakech pour l'emmener avec lui à Londres.

Une histoire d’amour, vraiment?

Fatima Zahra, maman de Saïf, a fait la connaissance de celui qui va être son futur mari (et bourreau) en 2008. En 2011, ils sont fiancés et Saïf voit le jour le 28 février 2013. Les visites du mari commencent à se faire rares et il ne débourse pas un seul centime pour sa femme et son fils.

En juillet 2014 enfin, leur mariage est légalisé et, en 2016, ils se rendent tous au consulat britannique au Maroc pour préparer leurs papiers.

Le père de Saïf ne dira cependant jamais qu’il a réussi à obtenir un passeport pour son fils.

Fatima Zahra, elle, découvre que son Roméo est déjà marié à Londres et père de trois filles âgées de moins de deux ans.

Un kidnapping à la hollywoodienne

Le 13 août dernier, Fatima Zahra est absente du domicile qu’elle partage avec sa mère, veuve, et sa sœur qui poursuit sa scolarité dans la ville ocre.

Son mari arrive chez elle et dit à sa mère qu’il voulait emmener Saïf à la piscine de l’hôtel où il est descendu. Sa belle-mère refuse fermement.

L'homme fait semblant de partir puis revient au bout de quelques minutes pour arracher l’enfant à sa grand-mère et l'embarquer dans une voiture prête à démarrer et qui roulera à tombeau ouvert.

Mise au courant, Fatima Zahra fait des pieds et des mains pour retrouver son enfant, mais doit bientôt se rendre à l’évidence. Son fils est déjà dans le ciel en direction de Londres.

Quand des femmes s’engagent pour des femmes

Le hasard a fait que Fatima Zahra, la mère éplorée, trouve sur son chemin un groupe de femmes qui l’aideront à récupérer son fils. L'une de ses connaissances la met en contact avec des responsables de «Al-Hasaniya Moroccan Women's Centre for Arabic Speaking Women», un centre qui soutient les femmes en difficulté en Angleterre et dont la co-fondatrice est Souad Talsi, d’ailleurs représentante du CCME (Conseil de la communauté marocaine à l’étranger) à Londres.

Mouna El-Ogbani, assistante juridique au centre «Al-Hassaniya» se charge des aspects liés au procès et porte l’affaire devant la Haute cour.

«Nous ne pouvions pas rester les bras croisés face à un enfant séparé de sa mère et enlevé à son environnement», déclare Souad Talsi à Le360.

La responsable du CCME se dit d’ailleurs convaincue que tout ce drame venait du fait que le mari voulait un garçon après avoir déjà eu trois filles.

Souad Talsi se déplace en septembre à Marrakech pour rencontrer Fatima Zahra. A son retour, elle emmène dans des bagages mille et une preuve attestant que Fatima Zahra n’était pas celle dont le mari disait tant de mal devant les juges pour tenter justifier le rapt de l’enfant. Les juges se rendent à l’évidence et donnent raison à la plaignante, le 8 novembre, ordonnant au père de rendre l’enfant à sa mère.

Entre-temps, son passeport et celui de Saïf ont été confisqués. 

Au moment où nous mettions en ligne, l’avion ramenant Saïf chez lui, accompagné de Souad Talsi, vient d'atterrir à l'aéroport Ménara de Marrakech.

Par Abdeladim Lyoussi
Le 11/11/2016 à 18h49