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Arabie saoudite: le rallye Dakar pour faire comme le Qatar

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L'Arabie saoudite, qui accueille le rallye Dakar pour la première fois en janvier, affiche la volonté croissante de se faire un nom dans le milieu du sport, avec l'idée d'y recourir comme levier pour améliorer son image sur la scène internationale.

Ces derniers mois, le royaume ultra conservateur a sensiblement accéléré ses investissements dans le domaine sportif, où ses temps de passage affichent un net retard sur ses concurrents régionaux, les Émirats arabes unis et surtout le Qatar.

Fin décembre, Cristiano Ronaldo et ses coéquipiers de la Juventus Turin ont foulé la pelouse du stade de l'université du Roi-Saoud à Ryad pour la Supercoupe d'Italie. Du 8 au 12 janvier, viendra le tour de Lionel Messi, à l'occasion de la Supercoupe d'Espagne, deux mois après une première prestation de la superstar argentine lors d'un match amical contre le Brésil.

En cette fin d'année, le pays a également accueilli la star de la boxe Anthony Joshua, une épreuve de Formule électrique, un tournoi exhibition de tennis ou encore des combats de catch.

Mais l'un des plus gros coups en date reste l'organisation, du 5 au 17 janvier, du Dakar, qui se déroulait depuis plus d'une décennie en Amérique du sud et doit rester dans la région pour les cinq prochaines années.

Dans sa course au leadership au Moyen-Orient, Ryad a choisi de faire lui aussi du sport un instrument de "soft power", sous l'impulsion du prince héritier Mohammed ben Salmane, qui a engagé le royaume dans une politique de diversification de ses ressources, et de relative ouverture.

Mais l'Arabie saoudite a vu son image déjà terne devenir carrément sulfureuse ces dernières années avec l'affaire du journaliste critique Jamal Khashoggi tué au sein du consulat saoudien d'Istanbul, l'intervention militaire controversée au Yémen ou encore ales tteintes aux droits humains en particulier vis-à-vis des opposants.

Cette année, au moins 187 prisonniers ont été exécutés, selon un décompte de l'AFP établi à partir de données officielles, soit le chiffre le plus élevé depuis plus de 20 ans, d'après Amnesty International.

Et si les Saoudiennes ont désormais le droit de conduire, des militantes ont été emprisonnées, voire torturées, pour s'être mobilisées en faveur des droits des femmes, ont affirmé des ONG.

"Il y a une politique très offensive pour accueillir de grands événements sportifs, pour faire venir des personnes (...), pour diffuser une autre image de l'Arabie saoudite partout dans le monde", explique à l'AFP Carole Gomez, chercheuse à l'Institut des relations internationales et stratégiques (Iris).

Mise en place à partir de 2015-2016, cette "diplomatie sportive" s'inscrit dans le cadre d'un vaste programme intitulé "Vision 2030" qui a pour objectif de diversifier les ressources du royaume, à ce jour ultradépendant du pétrole, rappelle-t-elle.

En investissant dans le sport, et à la faveur de retombées positives pour son image, Ryad espère notamment donner du poids à sa récente offensive touristique: le pays a commencé à délivrer des visas touristiques en 2019, à grand renforts de publicités.

Dans cette optique, l'organisation du Dakar, avec ses images de bolides fonçant dans des déserts immaculés et diffusées dans 190 pays, apparaît comme une aubaine. "L'idée est de vanter les beautés des paysages, les infrastructures qui peuvent vous accueillir si vous venez en voyage, et de faire une carte postale de l'Arabie saoudite", résume Carole Gomez.

Pour Quentin de Pimodan, expert du royaume sunnite à l'Institut de recherche pour les études européennes et américaines, pas de doute: "Le rallye Dakar va servir l'Arabie saoudite comme le Tour de France sert la France". "Il mettra en valeur les paysages et le patrimoine au moment où le royaume s'ouvre aux touristes internationaux".

Cette politique vaut toutefois à Ryad des accusations de "sportwashing" de la part d'ONG et d'opposants. Avant la Supercoupe d'Italie, la veuve de Jamal Khashoggi a jugé "désolante" la tenue du match à Ryad.

Certains sportifs, comme les stars du golf Tiger Woods ou Rory McIlroy, ont aussi décliné une invitation lucrative à prendre part à un tournoi organisé dans le pays.

S'agissant du Dakar, plusieurs ONG, dont Human Rights Watch (HRW), ont déjà fait connaître leur position. Selon elles, le prestigieux rallye servira "d'opération de communication et de diversion visant à faire oublier les crimes du régime".

Les conditions contractuelles de ce Dakar en Arabie saoudite ne sont pas connues dans le détail. Mais, s'ils sont conscients du caractère controversé de leur choix, les organisateurs préfèrent louer la "volonté d'ouverture" de Ryad, alors qu'un tel événement n'aurait pu se tenir sans les réformes voulues par Mohammed Ben Salmane.

"Il sera intéressant de voir comment ça se déroule, comment c'est vécu, quelles sont les retombées et les suites", fait valoir Carole Gomez. Le Dakar saoudien va-t-il susciter enthousiasme ou critiques parmi les compétiteurs et les suiveurs? "C'est cela qui permettra de voir si c'était ou pas une fausse bonne idée".

Par Le360 (avec AFP)

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