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La cérémonie des JO de Paris: génie créatif ou subversion inutile?

Zineb Ibnouzahir. © Copyright : Le360
En France, ce jour-là, on a défendu l’inclusion, la sororité, la diversité et l’égalité, en mettant à l’honneur les minorités de la communauté LGBTQ+, mais sans se soucier de cette énorme incohérence qui consiste à interdire à Sounkamba Sylla, membre de l’équipe de France d’athlétisme, française et musulmane (l’Islam, la deuxième religion de France), de porter un voile lors de la cérémonie d’ouverture.

Vendredi soir, le monde entier (ou presque) avait les yeux braqués sur son écran de télévision pour regarder en direct, ou en léger différé, la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques 2024 à Paris.

Un show époustouflant de 3h45 minutes qui nous a rappelé à quel point Paris est l’une des plus belles villes du monde. La Seine, le Grand Palais, la Conciergerie, l’Académie française, la Tour Eiffel… les grands monuments de France, qui font la grandeur et la célébrité de la capitale, étaient les personnages principaux de cette cérémonie époustouflante à plus d’un titre.

On ne peut qu’applaudir ce grand spectacle qui s’est déroulé sous nos yeux émerveillés et qui pour la première fois de l’histoire des JO se déroulait dans plusieurs sites de la ville, et non dans un stade. La magie était bel est bien présente ce soir-là dans la ville des Lumières.

Mais –parce qu’il y a toujours un “mais” quelque part– cette cérémonie d’ouverture, qui aurait pu se cantonner à son rôle premier, à savoir de faire découvrir au monde à travers la musique, les chants, la danse et les feux d’artifice, la culture du pays hôte, est sortie des sentiers battus quitte à verser dans le wokisme et dans un deux poids deux mesures dérangeant à plus d’un titre.

Parmi les valeurs que la direction artistique de l’évènement a choisi de mettre en avant, la sororité. De grandes figures féminines françaises ont été mises en lumière, dans le cadre d’un tableau artistique sur la sororité, d’Olympes de Gouge, rédactrice de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne en 1791, à Simone Veil, figure majeure de la droite républicaine qui a fait adopter la loi dépénalisant l’Interruption volontaire de grossesse, en passant par l’avocate Gisèle Halimi, qui a contribué à l’instauration de la loi Veil concernant l’IVG en 1975. À traves ces dix figures féminines majeures, la France affirme haut et fort les valeurs qu’elle défend, on ne peut qu’applaudir.

Mais cette sororité a été bien vite oubliée dès la mise en scène du tableau Liberté où une Marie-Antoinette, décapitée, est apparue à l’une des fenêtres de la Conciergerie, la tête entre les mains de son corps sans vie, chantant le chant révolutionnaire de ceux qui lui ont donné la mort: «À ça ira, ça ira, ça ira (…) les aristocrates on les pendra»… Mauvais goût et insulte à l’histoire de France pour certains, génie créatif aux yeux des autres. À dire vrai, ce tableau sanguinolent sur fond de musique hard rock est surprenant à plus d’un titre et les internautes n’ont pas manqué de mettre le doigt sur ce qui cloche. «Nous avons aboli la peine de mort, et nous la célébrons devant le monde entier», dénonce Charles Prats, un ex-magistrat. «À quel moment quelqu’un a pu trouver que c’était une bonne idée de glorifier une décapitation dans le contexte actuel?», questionne Gabrielle Cluzel, de Boulevard Voltaire. Mais une chose est sûre, c’est que ce tableau qui chante les louanges de la révolution française contraste terriblement avec cette admiration subsiste encore en France pour le faste et les codes de la monarchie, qui étaient d’ailleurs les invités d’honneur du dîner fastueux organisé par la présidence française au sein du Palais de Versailles en l’honneur du Roi Charles III en septembre 2023.

Mais, ce qui a choqué à travers le monde et divisé la France en deux, ce sont surtout les représentations de l’inclusion et de l’égalité. Des valeurs sportives importantes, mais dont la représentation nous laisse sceptique tant la retranscription de ces valeurs a choisi de verser dans la subversion.

Pour faire la promotion de l’inclusion, le comité artistique a choisi de lui associer les festivités et la liberté de blasphème, si chère aux «Je suis Charlie», en mettant en scène le tableau de Leonard de Vinci, la Cène. En lieu et place de Jésus et ses douze apôtres, des Drags Queens… Un tableau qui a choqué le monde chrétien (mais pas que), ce qui se conçoit très bien, d’autant que la mythologie grecque lui a volé la vedette. La France, fille aînée de l’Église, a préféré ce soir-là mettre à l’honneur Dionysos, dieu du vin, de la fête et des vignes, incarnation de l’hédonisme et de la débauche, représenté pour l’occasion par le chanteur Philippe Katherine, nu dans un plateau rempli de victuailles, le corps peint en bleu, chantant les bienfaits de la nudité et son influence sur la paix dans le monde. Une manière aussi de rappeler, selon le chanteur, que les premiers athlètes grecs concouraient nus lors des Jeux olympiques… Certes, mais derrière cette vérité historique gravée sur d’antiques poteries, il y a d’abord la mise en avant de valeurs françaises. C’est l’objectif même de cette cérémonie après tout.

La chose s’est précisée un peu plus, avec l’organisation d’un défilé de mode mettant à l’honneur les acteurs(trices?) principaux(ales?) de Drag Race France. Nicky Doll, Paloma, Piche et Giselle Palmer ont ainsi représenté Paris, capitale de la mode. Un tableau taxé d’ode au wokisme qui représente bien cette nouvelle industrie de la mode inclusive qui gomme de plus en plus les frontières entre les genres. Apothéose de cette séquence, applaudie à tout rompre ici et censurée sous d’autres cieux, l’entrée sur scène, en défilant puis à quatre pattes, de la femme à barbe Piche, Mike Gautier, de son vrai nom, décrite comme «une danseuse, rappeuse et drag-queen française d’origine gitane algérienne». Les enfants de l’immigration algérienne apprécieront…

Que dire de la séquence filmée dans l’escalier d’un immeuble qui mettait à l’honneur le triolisme avec un trouple à deux doigts de copuler et enterrait par la même occasion les valeurs familiales traditionnelles, encore chères à une partie de la France. Quel est le rapport entre le polyamour et les valeurs du sport, nous direz-vous? Essaie-t-on d’insinuer que dans la Grèce antique, le polyamour faisait partie des mœurs? Aucunement, il est ici question de cette volonté d’affirmer une certaine exception française, laquelle s’enorgueillie de son esprit frondeur, subversif, libre et effronté. Cette séquence visait à témoigner de l’esprit libertin qui a toujours caractérisé la société française, explique-t-on, et de rendre hommage à un certain pan de la culture française, celle incarnée par Marivaux –père du Marivaudage–, mais aussi à Truffaut et en particulier son film «Jules et Jim». Encore heureux que Depardieu ne soit plus en odeur de sainteté sans quoi on aurait eu droit à la promotion des «Valseuses». Ici aussi, le parti pris est clair, net et précis, on ne choisit de cette vaste et si riche culture française qu’un pan et on envoie valser tout le reste, Hugo, Maupassant, Jacques Tati et tant d’autres. Quant au réarmement démographique auquel appelle Emmanuel Macron dans une France vieillissante, ce n’est ni pour aujourd’hui ni pour demain.

«Ce qu’il y a d’extraordinaire, c’est que tout le monde en France et dans le monde a une idée de ce que la France est. Et je veux jouer avec cela, c’est de là que je veux partir –défaire les clichés, parce que les clichés amènent avec eux d’autres choses», a expliqué Thomas Jolly, directeur artistique de la cérémonie d’ouverture à la presse. «Je veux surtout que cette cérémonie intègre tout le monde. Nous devons tous célébrer cette diversité», a-t-il ajouté. Un point de vue qui prête à sourire car décidément, chacun voit midi à sa porte, et ces œillères, les promoteurs de la culte woke n’y échappent pas.

En effet, en France ce jour-là, on a défendu l’inclusion, la sororité, la diversité ou encore l’égalité, en mettant à l’honneur les minorités de la communauté LGBTQ+ et surtout, en adoptant un certain point de vue, celui de Thomas Jolly, sa perception de la France, les valeurs et les combats qu’il défend. Un autre directeur artistique aurait-il été nommé que peut-être, la France aurait relevé cette énorme incohérence qui consiste à interdire à Sounkamba Sylla, membre de l’équipe de France d’athlétisme, française et musulmane (l’Islam, la 2ème religion de France) , de porter un voile et d’être présente avec sa délégation lors de la cérémonie d’ouverture. Pour pouvoir représenter son pays, la France, celle-ci a été contrainte de porter une casquette. Inclusion, égalité et sororité dites-vous? C’était sans compter sur l’idéologie que cache la laïcité, cette autre exception française, qui consiste à habiller Jacqueline pour mieux déshabiller Fatima.

Par Zineb Ibnouzahir

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