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Le football c’est comme la vie, une génération efface l’autre

Ahmed Faras recevant le trophée de la Coupe d'Afrique des Nations 1976. © Copyright : DR
Il reste que c’est bien de se souvenir des anciens et de les honorer. Le patrimoine sportif est aussi un patrimoine immatériel à valoriser pour maintenir la flamme et consolider l’ADN du patriotisme national.

Les réseaux sociaux décriés, à juste titre pour leurs écarts, les fakes news et la propagande qu’ils véhiculent, n’ont pas que des défauts. Ils permettent de mettre en ligne des sondages, via des questionnaires, auxquels participent un grand nombre d’internautes. Ces sondages n’ont aucune validité scientifique et ne servent au final qu’à multiplier les vues au bénéfice de l’initiateur. Mais ils méritent que l’on s’y intéresse parce qu’ils reflètent au moins les goûts, les préférences et, des fois, les opinions d’une population donnée. Celle qui est abonnée au compte en question. C’est une population jeune, à laquelle celle d’avant n’a pas réussi à transmettre certains fondamentaux et une partie de son patrimoine historique. C’est valable dans beaucoup de domaines, en sport aussi.

Un des sondages qui a retenu l’attention des amateurs de la plateforme X (ex-Twitter) concerne l’élection du meilleur joueur de football marocain de tous les temps.

Le classement est surprenant pour les plus anciens d’entre nous. Le Top 5 des premiers résultats place Hakim Ziyech, Salaheddine Bassir, Achraf Hakimi, Sofiane Boufal et Marouane Chamakh en tête en attendant la clôture des votes. Des joueurs importants, qui ont marqué l’histoire sportive du pays, ne figurent même pas parmi les personnalités citées. Seuls Ahmed Faras, Mohamed Timoumi, Badou Zaki et Mustapha Hadji sont rappelés au bon souvenir des nostalgiques d’un football encore récent. Il est vrai qu’ils ont été Ballon d’Or africain et que les papas des votants ont dû garder un bon souvenir de leurs parcours, notamment en équipe nationale. Par contre aucune trace des Bamous, Petchou, Dolmy, Allal et encore moins des Larbi Ben Barek, Abderrahman Belmahjoub, le Prince du Parc ou de la fameuse triplette du Wydad Chtouki, Abdeslam et Driss. Ils sont passés aux oubliettes. C’est triste et inquiétant, honorer la mémoire des anciens et se souvenir de leurs exploits c’est aussi une source de motivation pour les nouveaux.

La nouvelle génération rend hommage à l’actualité et aux joueurs qu’elle a connu ou vu à la télé ou au stade. Elle ne connait pas les anciens. Ce n’est donc ni une question d’ingratitude, ni une affaire de préférence. C’est une affaire de mémoire mal entretenue et encore plus mal conservée.

Ce n’est pas propre au Maroc c’est aussi le cas d’autres pays prestigieux dont la culture footballistique est plus puissante.

Plusieurs explications, d’abord l’absence de titres, on a vu que des joueurs consacrés «Ballon d’Or» sont encore aujourd’hui évoqués. On se souvient tous de Said Aouita ou Nawal El Moutawakel, pas de Haddou Jaddor ni de Abdeslam Radi, pourtant médaille d’argent aux Jeux Olympiques de Rome au Marathon. C’est aussi l’absence d’images et surtout de vidéos. Très peu de traces de leurs exploits sur la plateforme YouTube, très prisée des jeunes et des moins jeunes, et lorsqu’on trouve par miracle une vidéo, elle est de mauvaise qualité, mal cadrée et très peu représentative de ce qu’était le joueur techniquement et tactiquement. Les photos que l’on peut retrouver chez quelques férus d’archives ne montrent pas grand-chose non plus, elles sont figées sur un tacle réussi, une reprise de volée ou le plongeon d’un gardien.

En réalité le football a changé et ce n’est pas du tout objectif de comparer des générations différentes. Leur environnement s’est complètement métamorphosé. Les pelouses n’ont rien à voir avec les terrains en terre battu sur lesquelles évoluaient les anciens, le suivi médical n’est plus le même, la préparation physique non plus. Être joueur c’est devenu un métier à plein temps et pour les meilleurs avec des salaires conséquents et des perspectives intéressantes de promotion vers des ligues plus importantes, en Europe ou dans les pays du Golfe. L’arbitrage, encore source de polémiques, s’est beaucoup amélioré. Les arbitres sont soutenus par la technologie. La VAR corrige un grand nombre de fautes d’arbitrages qui auraient pu échapper à l’œil nu. La retransmission systématique de tous les matchs a donné une visibilité beaucoup plus importante aux joueurs d’aujourd’hui. Tous ces éléments font qu’il devient difficile d’être objectif lorsqu’il s’agit de procéder au classement des meilleurs joueurs dans le temps.

Il reste que c’est bien de se souvenir des anciens et de les honorer. Le patrimoine sportif est aussi un patrimoine immatériel à valoriser pour maintenir la flamme et consolider l’ADN du patriotisme national.

Un musée du football est en cours de construction. Il a été placé, pour sa gestion, sous l’égide de la Fondation Nationale des Musées en vertu d’une convention signée avec la FRMF, c’est de bon augure et significatif de ce que l’on attend de ce projet.

Il sera alimenté d’archives personnelles, d’archives recueillies auprès de divers médias nationaux et probablement internationaux. Il comblera ce vide en culture footballistique dont souffrent, à leur cœur défendant les jeunes générations avides de connaissances.

Par Larbi Bargach

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