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La visibilité des numéros 6 est inversement proportionnelle à leur importance

Xavi, Iniesta et Busquets sous les couleurs du Barça. © Copyright : DR
Les milieux défensifs sont appelés à fermer les angles, à anticiper les passes en profondeurs, à prévoir les intentions adverses et au final à faire preuve d’intelligence, une donnée qui n’est pas suffisamment mise en avant par le public et qu’a révélé la multiplication des caméras dans la transmission des matchs.

Les numéros en football ont été attribué pour bien marquer l’affectation des joueurs par poste. Et même si la révolution du football total a modifié l’importance des numéros, feu Johan Cruyff a rendu célèbre le numéro 14 lors de son éclosion au sein de l’Ajax d’Amsterdam, rien n’a vraiment changé.

Ainsi le numéro 1 était attribué au gardien, le 2 et le 3 aux latéraux, les 4 et 5 aux stoppeurs et Libéros le 7 et le 11 aux ailiers, le 6 au milieu défensif, le 8 au milieu offensif, le 10 au capitaine responsable du rythme et de la qualité du jeu et le 9 à l’avant-centre.

De tous ces numéros, le 6 est le mal aimé. C’est même une des sources de désaccords entre le public et les entraîneurs. Le public est fervent supporter des joueurs à l’origine du spectacle alors que les entraîneurs sont surtout responsables de l’équilibre et l’efficacité de leur collectif. Le numéro le plus prestigieux, le 10, a été porté par les plus grands monstres du football: Pelé, Maradona, Messi, Platini, Zidane en équipe de France, Modric, dont le talent a explosé sur le tard, et au Maroc post indépendance par Bamous, Petchou et Timoumi et bien d’autres.

Les 6 ont beaucoup souffert de leur manque de visibilité. Dans le trio, Xavi, Iniesta et Busquets ce sont les deux premiers qui ont attiré la lumière alors que le rôle du troisième a été beaucoup plus déterminant selon les observateurs du ballon rond.  Dans un autre registre Casimero a permis à Kroos et Modric de particulièrement briller, il les a souvent soulagés des taches défensives ingrates par nature.

Cette frustration est historique. Makelele, un brillant milieu défensif qui a fait le bonheur de Chelsea et l’équipe de France, a quitté le Real parce que le président refusait de l’aligner sur les salaires que touchaient les «Galactiques» de l’époque. Il laissera un grand vide derrière lui. Les Galactiques ne seront jamais au rendez-vous des résultats mais permettront au Real de gagner beaucoup d’argent. Et c’est là le paradoxe. Le football, censé être le sport de la balle au pied, a besoin de joueurs capable d’être utiles sans ballon.

En effet, les milieux défensifs sont appelés à fermer les angles, à anticiper les passes en profondeurs, à prévoir les intentions adverses et au final à faire preuve d’intelligence, une donnée qui n’est pas suffisamment mise en avant par le public et qu’a révélé la multiplication des caméras dans la transmission des matchs.

Combien de déplacements anticipés ont permis de briser des contre-attaques admirablement menées. Pour les comprendre, il fallait le concours de drones capables de montrer la totalité des actions filmées par le haut.

Le joueur capable d’imaginer un tel déplacement a une capacité d’abstraction et d’analyse des trajectoires digne des meilleurs mathématiciens. On en rencontre beaucoup dans le football de haut niveau d’aujourd’hui. Quelques exemples, Rodri n’a pas la visibilité qu’il mérite c’est pourtant un élément clé de Manchester City, le club le plus impressionnant de cette deuxième partie de saison, Kroos, dans un nouveau rôle plus en retrait fait parler, non seulement sa magie de la passe mais aussi à couper les passes adverses. Le Barça, en grande souffrance cette année, souffre à la fois du départ de Busquets et de la blessure de Gabi. Ces joueurs jouent pourtant à l’ombre des De Bruyne et Foden à City et de Modric et Bellingham chez les Merengues et de Pedri et Yamal au Barça.

Au Maroc, un joueur a beaucoup souffert de sa position en tant que numéro 6 au sein de l’As FAR des années 80. Il s’agit de Fadili, un des meilleurs milieux défensifs de l’époque dorée de l’équipe militaire. Fadili était un récupérateur hors pairs, il savait plus que quiconque bloquer les attaques adverses, couvrir les latéraux lorsqu’ils se projetaient vers l’avant et servir de soldat aux Timoumi, Dahane et Haidamou chez les Militaires auxquels il faudrait rajouter Bouderbala et Hadaoui en équipe nationale.

Le Ballon d’Or, qui est plus souvent attribué à des attaquants, n'a pu échapper à cette catégorie que de rares fois. Lev Yachine, en gardien de but, Matthias Sammer, Fabio Cannavaro ou Franz Beckenbauer en stoppeur ou libéro. Jamais un milieu défensif n’a été primé.

Franz Beckenbauer un des joueurs les plus élégants de l’histoire du football a commencé sa carrière en tant que milieu défensif. Il a dû reculer d’un cran pour briller au poste de libéro, un poste qu’il a réinventé.

Le football est un sport collectif qui nécessite du talent, une force mentale et un esprit collectif. Il se joue selon deux phases alternatives, une phase de possession et une autre de récupération. Elles doivent être complétement maitrisées par l’équipe qui souhaite remporter le match, sinon les meilleures équipes sur le papier souffrent. L’exemple des Galactiques est flagrant.

Sofyan Amrabat a été déterminant dans le parcours de l’équipe nationale au Qatar, il a parcouru 70 km tout au long du tournoi et a terminé 2ème au classement des kilomètres parcourus par un joueur. Son nom a été retenu, mais pas autant que ceux de Bounou, Ounahi, Hakimi ou Ziyech, c’est son poste qui veut ça, pas son talent.

Par Larbi Bargach

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