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Les Lionnes de l’Atlas, toutes voiles dehors

Zineb Ibnouzahir. © Copyright : Le360
En voulant absolument fustiger ce voile comme un symbole de soumission de la femme, on en oublie les codes, les tabous et les clichés que brise actuellement Nouhaïla Benzina.

Depuis leur entrée fracassante sur la pelouse de la Coupe du monde féminine de football en Australie et en Nouvelle-Zélande, les Lionnes de l’Atlas ont été particulièrement scrutées par les médias du monde entier. Seule équipe arabe de ce championnat, de surcroît qualifiée au second tour pour sa première qualification, là où de grandes équipes telles que l’Allemagne ou le Brésil ont échoué, il y a en effet de quoi attirer l’attention. Mais ce n’est pas pour leurs résultats et leurs compétences que ces jeunes femmes ont défrayé la chronique avant leur qualification en huitièmes de finale.

Exposées à la presse du monde entier, c’est ce qu’elles représentent, ce qu’elles incarnent qui a suscité l’intérêt de certains médias. Scrutées telles des curiosités exotiques, on s’est ainsi attaqué en conférence de presse à leur intimité la plus stricte, afin de connaître les tendances sexuelles des unes et des autres. Quel rapport avec le sport? Aucun, a bien voulu concéder la BBC, en présentant ses excuses aux joueuses au nom de son journaliste.

Puis, comme si cela ne suffisait pas, une campagne médiatique a été menée tambour battant contre une joueuse en particulier, Nouhaïla Benzina, en raison de son voile. En effet, la joueuse marocaine est la première de l’histoire à bénéficier d’un changement de législation de la FIFA au sujet du port du voile. Si cette grande première a été saluée par une grande majorité de pays et de médias, en France, sans grande surprise, l’affaire a fait scandale.

Certains experts invités sur les plateaux télévisés ont qualifié la chose de «régression incroyable», tandis qu’une majorité d’articles ont tenu à préciser sans surprise que «la position de la FIFA n’est pas la même que celle de la France» en matière de port de voile. La différence de réactions entre la presse anglo-saxonne et hexagonale est probante. D’un côté, on voit en cette jeune femme voilée l’avancée de l’inclusion dans le sport et on l’applaudit, de l’autre, on préfère y voir un signe de l’asservissement de la femme et d’intervention intempestive de la religion dans le sport, oubliant au passage les nombreux symboles et gestes religieux qui peuplent les pelouses de stade dans les défaites comme dans les victoires de toutes les équipes masculines.

Cette obsession toute française du voile vire à l’aveuglement haineux, au point de refuser de voir les nombreux symboles incarnés par cette équipe marocaine. Des femmes marocaines qui jouent au football et arrivent à ce niveau de performance, ce n’est pas rien. C’est une avancée sociale gigantesque et une preuve irréfutable du travail qui a été accompli sous le règne du roi Mohammed VI en matière d’égalité entre hommes et femmes, tant dans les lois que dans les mœurs. Voir dans les gradins des stades et dans les cafés du Maroc, autant d’hommes que de femmes soutenant les Lionnes de l’Atlas, applaudir leurs exploits, les encourager, ce n’est pas rien.

Considérer le sport à haut niveau comme une voie possible quand on est une femme, c’est un pari incroyable que remporte le Maroc haut la main.

Enfin, des femmes non voilées et voilées qui jouent ensemble, c’est là le reflet d’un pays où les différences sont intégrées et acceptées, et un symbole de plus du vivre-ensemble dont le Maroc peut être si fier.

Autant de symboles forts auxquels cette France si attachée à des valeurs désuètes est aveugle. En voulant absolument fustiger ce voile comme un symbole de soumission de la femme, on en oublie les codes, les tabous et les clichés que brise actuellement Nouhaïla Benzina. Allant à contre-courant de l’image de la femme voilée musulmane asservie dans sa cuisine que mâchonne un certain Occident comme un os qu’on ronge, cette jeune Marocaine est en train de couper l’herbe sous le pied de ses détracteurs. Oui, le voile peut être imposé aux femmes par certains, comme c’est le cas en Iran. Non, toutes les femmes ne sont pas pour autant asservies si elles portent le voile.

Cette évidence comprise par la majorité aura assurément bien du mal à faire son chemin en France, tant l’islamophobie ambiante, et désormais assumée, a catégorisé la femme musulmane comme la victime d’une religion patriarcale et rétrograde dès lors qu’elle ne correspond pas aux codes de l’occident. Se cacher derrière un titre de «patrie des droits de l’homme», qui ne lui sied plus depuis fort longtemps, n’y changera rien, car l’hypocrisie que cela cache est désormais exposée au grand jour. Comment peut-on militer prétendument pour le droit des femmes à être libres, tout en voulant interdire à l’une d’entre elles d’exercer sa passion et son métier au nom de ces mêmes droits?

Une chose est sûre, après avoir impressionné au Qatar lors de la Coupe du monde de football masculine, là où on ne l’attendait pas, le Maroc, avec cette incroyable équipe féminine qui brille alors qu’elle ne figurait dans aucun pronostic, est en passe de changer radicalement l’image des pays africains et arabo-musulmans.

Évoluant très loin des clichés rétrogrades dont on tente encore de l’affubler, le Maroc et les Marocains évoluent, se perfectionnent et excellent dans tous les domaines. «Pendant que le sage montre la lune, l’imbécile regarde son doigt», dit le proverbe chinois... Qu’ils continuent donc de nous sous-estimer. En attendant, rendez-vous mardi pour un match Maroc-France d’anthologie, et que les meilleures gagnent!

Par Zineb Ibnouzahir

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