Le Maroc, favori malgré lui?

Même en 1976, quand les Lions ont gagné l’édition d’Addis-Abeba, ils ne partaient pas dans la peau du favori, rôle dévolu à l’époque au Sily national (Guinée), qui finit quand même deuxième. En 1988, la seule édition organisée sur le sol marocain, les Lions étaient favoris mais à reculons. Ils jouaient à domicile et ils restaient sur un beau Mondial 86, mais qui commençait à dater. Et la bande de Faria était déjà en fin de cycle.

Tout cela pour dire que le Maroc n’est pas habitué à endosser le costume du favori numéro un. Mais là, il l’est et pleinement, c’est-à-dire comme jamais. Et quand Regragui la joue modeste et appelle à la prudence, c’est pour protéger ses joueurs et aussi par respect aux adversaires.

Les Lions sont favoris pour deux raisons, pas seulement une. En plus de rester sur un Mondial incroyable il y a à peine un an, les Lions possèdent tout simplement le meilleur effectif du tournoi. L’ossature du Qatar est toujours là, plus forte que jamais. Il n’y a pas de blessés (en dehors d’Aboukhlal, qui n’était qu’un joueur de rotation), ni de méforme notoire. En plus, les petits nouveaux et ceux qui n’ont pas fait le Mondial (comme Harit, Adli ou Saïbari) sont bel et bien là.

En une phrase, le Maroc qui se présente à cette CAN 2023 est bien supérieur à celui du Mondial.

Maintenant, ce qui est vrai sur le papier doit l’être sur le terrain. Au-delà du talent intrinsèque, ce qui fait la différence et ce qui peut vous emmener tout en haut, c’est la force du groupe. C’est-à-dire la solidarité, le sens du sacrifice, les efforts que les uns feront pour les autres. Ces paramètres sont à leur tour liés à la vie du groupe, au vestiaire, aux coulisses, aux mille et un détails du quotidien. Et à la préparation tant foncière que mentale.

Autant de paramètres que l’on ne connait pas encore (même si les échos qui nous parviennent régulièrement sont plutôt rassurants), mais que l’on découvrira sur place, durant la compétition.

Et si le Maroc est le grand favori malgré lui de cette CAN, certains de ses adversaires sont capables de le priver de son rêve africain. Il y a d’abord cette sélection ivoirienne qui joue sur ses terres et qui a eu le temps de rebâtir un groupe jeune et de qualité. En amical, les Eléphants en ont fait voir de toutes les couleurs à nos Lions (1-1 en octobre dernier).

Une autre sélection dont on ne parle pas beaucoup, et qui a été l’une des rares à réellement dominer le Maroc en 2023, s’appelle l’Afrique du sud (2-1 en juin dernier). Et c’était en match officiel s’il vous plait. Il faudra donc surveiller cette sélection, qui revient lentement mais sûrement, et qui s’appuie sur une ossature du Mamelodi Sundowns, l’un des meilleurs clubs africains de ces dernières années.

Il faudra aussi faire attention à d’autres adversaires de qualité. Comme le Sénégal, tenant du titre et qui a joué les deux dernières finales de la CAN. La force des Lions de la Terranga ne s’appelle pas Sadio Mané mais le groupe, fort et uni, et le coach Cissé, probablement le meilleur en Afrique (avec notre Walid national).

Il y a, bien sûr, l’Egypte de Mohamed Salah qui a brisé le rêve marocain sur deux des trois dernières éditions de la CAN. Avant, les Lions étaient la bête noire des Pharaons. Aujourd’hui, c’est le contraire. Et puis l’Egypte n’a plus gagné le trophée depuis 2010, et Mohamed Salah mérite bien de soulever le trophée, lui qui n’est plus très jeune (31 ans).

Derrière ces sélections, on doit aussi faire attention à la Tunisie, qui reste la plus européenne (plus spécialement italienne) des sélections africaines, bien organisée, équilibrée et roublarde. Attention aussi au Nigéria, qui a le talent et la fougue. Et à l’Algérie de Belmadi, qui peut faire un beau parcours à condition de garder son calme, ce qu’elle n’arrivait plus à faire ces dernières années.

Pour compléter ce tour d’horizon, il restera toujours des voix pour miser sur des outsiders comme le Ghana, le Cameroun ou le Mali, dont la consécration constituerait malgré tout une réelle surprise, tant ces sélections semblent en retard par rapport au Maroc et aux autres.​