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La fuite des talents, un risque pour les Lions de l’Atlas

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Pour le Maroc, un départ massif de jeunes joueurs talentueux comporte un double risque: celui de voir leur progression ralentie dans un championnat moins compétitif et celui d’un changement de nationalité sportive qui n’est pas à exclure. Le souvenir des athlètes marocains partis à Doha pour porter le maillot officiel qatari est toujours vivace.

Une alerte, objet d’un tweet publié par @SCCR_212, est passée presque inaperçue au Maroc. Elle est pourtant d’une grande importance, parce qu’elle concerne l’avenir quasi immédiat des Lions de l’Atlas. Ce tweet nous apprend que, sous prétexte de restructuration du championnat qatari, Antero Henrique, le Directeur Technique National de la fédération qatarie, a établi une liste de jeunes joueurs, d’origine maghrébine, qu’il souhaite attirer au Qatar. Son but est de renforcer le championnat local mais avec la perspective, non affirmée et non officielle, de les naturaliser plus tard afin de les intégrer à l’équipe nationale de l’Émirat.

Il a été nommé en mars 2022 et il est connu pour être un proche du Président du Paris Saint Germain, Nasser al-Khelaïfi, dont il a été Directeur Sportif entre 2017 et 2019.

Un avant-goût de ce qu’il prépare: les recrutements actés de deux joueurs Kais Najeh, un arrière gauche de 20 ans, ancien de la sélection marocaine U17, et Youness El Hannach, milieu défensif de 19 ans. Les deux jouaient au Paris Saint-Germain. Le premier a rejoint Al Rayyan l’année dernière et le second vient d’être recruté par un autre club qatari, Al Shamal SC. Les deux sont d’origine marocaines.

D’autres joueurs prometteurs sont dans le viseur des recruteurs qataris Khalil Fayad, Redouane Halhal des U23 d’Issam Charai, Kays Ruis-Attil, Naim Byar et Mohamed El Arouch. Tous ont un ou deux parents d’ascendants marocains.

Pour le Maroc, un départ massif de jeunes joueurs talentueux comporte un double risque: celui de voir leur progression ralentie dans un championnat moins compétitif et celui d’un changement de nationalité sportive qui n’est pas à exclure. Le souvenir des athlètes marocains partis à Doha pour porter le maillot officiel qatari est toujours vivace.

La plupart des joueurs mentionnés ont été formés en France. Ils étaient par conséquent également ciblés par l’équipe nationale française. Mais rien n’empêche de penser que d’autres talents, formés cette fois au Maroc au sein de l’Académie Mohammed VI, seront approchés par des intermédiaires à la recherche d’un coup de fusil.

Le cheminement naturel des joueurs formés localement est d’alimenter les clubs de la Botola et, pour les plus performants d’entre eux, de lancer leurs carrières en Europe. Il ne faudrait pas que l’Europe ne soit qu’une escale avant un départ vers le Qatar ou d’autres états du Golfe qui ne manqueront pas d’imiter leur voisin dans un très proche avenir.

La première motivation des jeunes talents est d’abord sportive, Ils veulent jouer dans des grands clubs, mais la motivation de l’entourage est souvent dictée par des considérations matérielles. C’est normal! les parents veulent toujours le meilleur pour leurs progénitures et pensent que la sécurité matérielle est prioritaire.

Parce qu’il faut le dire, il y a un gap salarial entre les joueurs des clubs européens et ceux des clubs du Moyen-Orient. En Europe, les équipes sont soumises à des règles strictes, le fairplay financier par exemple, et à des impôts importants. Ce n’est pas le cas des pays du Moyen Orient dont les revenus fiscaux comblent un nombre important de besoins de la société.

La migration sportive ou «fuite des talents» n’a jamais vraiment posé problème en club. Que la migration soit locale nationale ou même internationale. L’univers du football (joueurs, entraîneurs, dirigeants et supporters etc) accepte facilement qu’un très bon joueur puisse être transféré dans un club plus huppé. Les clubs les plus riches, les plus populaires et les plus titrés ont de tout temps attirés les plus grands champions. Le microcosme du football est un grand village sans véritable frontière. C’était le cas dans l’ancien monde, sans télévision et sans sponsors, c’est toujours le cas avec la mondialisation et la sur médiatisation de ce sport. 

Ce phénomène concernait, à une époque à la fois les clubs de football et les équipes nationales. De très grands joueurs ont pu ainsi jouer pour deux ou plusieurs sélections nationales différentes. Des joueurs comme Alfredo Di Stefano, Puskas ou Kubala ont porté les maillots de plusieurs sélections différentes. Ce n’était pas du goût du public. Ce qu’il accepte pour les clubs, il le refuse pour les équipes nationales.

Devant la multiplication des contestations, la FIFA a tranché en mettant un frein brutal à ces transferts entre nations qu’elle a fini par considérer comme illicites. Cette interdiction a toutefois généré des abus. Des sélectionneurs peu scrupuleux ont convoqué et fait jouer des joueurs à double nationalité, quelques minutes pour un pays, juste pour les priver d’une carrière internationale avec un autre.

La FIFA a à nouveau corrigé et un changement de sélection est à nouveau possible sous certaines conditions. C’est cette brèche que veut exploiter  Henrique pour améliorer l’offre technique du Qatar.

La fédération marocaine en a probablement conscience, il faudra qu’elle agisse vite pour le bien des Lions de l’Atlas dont le parcours en Coupe du Monde a aiguisé les convoitises.

Par Larbi Bargach

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