Ne pas aller plus vite que la «mousique»

Dans huit jours, c’est-à-dire le 12 octobre, le Maroc pourrait déjà composter son billet pour le match-barrage qualificatif à la prochaine Coupe du Monde. Il lui faudrait entretemps aligner trois victoires. C’est dans ses cordes puisque les trois matchs à venir se joueront au Maroc (la Guinée et deux fois la Guinée Bissau). C’est une chance incroyable puisque deux de ces matchs, chez les deux Guinée, sont théoriquement des déplacements. Mais les sanctions ou les troubles qui sévissent dans ces deux pays ont «délocalisé» ces déplacements au Maroc.

Il faut donc exploiter cette opportunité extraordinaire pour régler tout de suite la qualification avant de gérer la suite sans pression de résultat, et se livrer aux expérimentations dont coach Vahid semble raffoler. Et il n’a pas forcément tort!

Parlons justement de notre sélectionneur dont le dernier point de presse a rappelé ses qualités et ses défauts aussi. En gros, un homme franc, direct, qui en a vu d’autres, qui sait ce qu’il veut, mais qui peut se montrer rigide, s’entêter… Ou flirter avec la bizarrerie.

Sur ses choix d’hommes, on peut comprendre sa volonté d’écarter certains joueurs jugés indisciplinés et donc potentiellement nuisibles pour la cohésion du groupe (Ziyech ou Mazraoui). Mais ses mots envers Harit restent durs («Avez-vous consulté ses stat’?»), même si le milieu de l’OM sait mieux que personne les galères sportives et extra-sportives dont il revient à peine. Un petit mot d’encouragement pour Amine, dont les débuts à Marseille sont prometteurs, n’aurait pourtant fait de mal à personne.

La bizarrerie vient de la brutalité avec laquelle certains éléments sont convoqués, intégrés, avant d’être abandonnés. Passe encore pour un Yahya Jabrane, Zouhair Feddal ou Jaouad El Yamiq, qui n’offraient peut-être pas suffisamment de garanties. Le cas Adel Taarabt est plus problématique.

Il est lent, trop lent, et coach Vahid cherche des profils plus rapides, d’accord. Mais voilà un garçon qui a fait tous les derniers stages, qui est devenu incontournable au milieu de terrain, qui a la chance de disputer la Champions league (il a grappillé quelques minutes dans le récent Benfica–Barcelone), et qui se retrouve éjecté non seulement du onze-type mais de tout le groupe.

Comment comprendre cette mise à l’écart aussi brutale que bizarre?

A part cela, comme on dit, tout va bien. Faisons comme dit Vahid et n’allons pas plus vite que la «mousique». Parlons jeu, faisons avec ce qu’on a, et saluons au passage les retours mérités de deux garçons: les «Turcs» Ayoub El Kaâbi et Fayçal Fajr.

Pour gagner les trois matchs à venir, les Lions de Vahid doivent s’appuyer sur la solidité défensive qu’on leur connait déjà, et qui reste leur point fort. Partout où il est passé, en sélection comme en club, coach Vahid s’est toujours appuyé sur une bonne assise défensive, mais avec des transitions rapides et des «flèches» capables d’exploser et de percuter au bon moment. C’est là où réside le problème de cette sélection marocaine.

Ce problème est récurrent. Vahid le sait très bien, et il devrait en faire son principal chantier en vue du Mondial. Pour peu, évidemment, qu’il obtienne la qualification le plus rapidement possible.

Pour assurer des transitions rapides, surtout en phase offensive, il faut avoir les bons profils à la Hakimi, Boufal ou Louza, mais il faut dénicher et polir d’autres talents, surtout au milieu (quel dommage qu’un garçon comme Sofiane Diop n’ait pas encore tranché quant à sa nationalité sportive), et faire en sorte que tous ces talents parlent le même langage. Ou la même «mousique», comme dirait coach Vahid.

Allez les Lions, prenez des points, et match par match, à commencer par celui de mercredi prochain, face à la Guinée-Bissau. Bonne chance!